Rock & Folk

Eddy De Pretto

“A Tous Les Bâtards”

- H.M.

Variation sur “J’Me Voyais Déjà” de Charles Aznavour en version hip hop atmosphéri­que, “Bateaux-Mouches” impose d’emblée la quintessen­ce d’un style et trouve le ton juste pour épingler la réalité la plus triviale et les fantasmes les plus éthérés. La force poétique du texte est portée par une voix qui oscille entre flow véloce hérité du rap et tentation mélodique de la chanson, et Eddy De Pretto a peaufiné ce mélange vocal garant de sa particular­ité. Trois ans après “Cure”, l’album de tous les succès (ventes records, tournée des Zénith), il remonte au créneau avec un second essai très attendu qui remplit les promesses de sa brillante ouverture, malgré sa durée excessive (quinze morceaux) et l’uniformisa­tion des ambiances et des rythmes. Privilégia­nt mid tempo et groove moelleux d’une soul electro, il délaisse le minimalism­e initial pour convoquer cordes, guitares ou claviers et enrichir sa musicalité, au diapason d’un chant qui a acquis une aisance perceptibl­e entre envolées et voix de tête. D’une plume acérée, il se fait “le papier buvard d’une société qui bouge” lorsqu’il évoque avec finesse les violences policières dans “Val De Larmes” (“Maintenant tu sais pourquoi ça rage”), les affres de l’écriture (“Tout Vivre”), ou les pièges de la cocaïne (“Désolé Caroline”), mais il sait aussi tâter de la ballade existentie­lle (“Parfaiteme­nt”) ou cultiver la fibre nostalgiqu­e à travers les souvenirs de son enfance dans “Rose Tati” ou “Créteil Soleil” (“Ils ont enlevé le soleil/ Ils ont décroché mes rêves”). Et il n’a pas son pareil pour donner leurs lettres de noblesse à toutes les victimes de leur différence, “tous les bizarres, les étranges, les bâtards” (“Freaks”). ✪✪✪1/2

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