Jackson Browne
“Downhill From Everywhere”
Le précédent album de Jackson Browne s’intitulait “Standing
In The Breech” (“Debout Dans La Brèche”) et représentait un paysage de désolation. Celui-ci s’appelle “Downhill From Everywhere” (“La Débandade De Partout”) et représente un paysage à peine plus engageant, où d’épaisses murailles d’acier surplombent des silhouettes sur une plage. Faut-il craindre, derrière cette volonté de frapper les esprits, une oeuvre pontifiante sur les affres de ce monde ? La réponse est non. Jackson Browne, soixante-douze ans, a quelques références en matière de songwriting subtil, tel “Late For The Sky”, sur le grand désenchantement américain des seventies. Son intelligence consiste, plutôt qu’à donner des leçons, à écrire du point de vue des individus. Cet homme hésitant à saisir les promesses d’un amour tardif (“Minutes To Downtown”), cette femme venue du Mexique des rêves plein la tête qui apprend sa notification d’expulsion (“The Dreamer”). Les paroles sont fines, suggèrent les choses sans les dire. Extrêmement directes lorsque Browne dépeint la déliquescence de son pays (“Downhill From Everywhere”, “Until Justice Is Real”). Sur le plan musical, l’auteur de “These Days” offre ses constructions les plus abouties de longue date. Mélodies douces-amères, voix enveloppante et tempo medium ou rapide (“Still Looking For Something”, “My Cleveland Heart”), jolies ballades (“A Little Too Soon To Say”). Il furète du côté d’Haiti (“Love Is Love”), du Mexique (“The Dreamer”), et surtout de l’Espagne sur “A Song From Barcelona”, majesteux final résolu dans des torsades de guitares — celles de Greg Leisz et Val McCallum — à faire pâlir d’envie ses vieux camarades des Eagles. ✪✪✪✪