Gov’t Mule

“Heavy Load Blues”

FANTASY RECORDS

On relèvera, pour l’anecdote, que “l’album blues” de Gov’t Mule s’ouvre par le même morceau que “l’album blues” que publia Eric Clapton en 1994 : “Blues Before Sunrise”, d’Elmore James. Du Chicago blues avec force giclées de guitare slide. Pour le reste, on s’en doute, rien à voir. Déjà parce que Warren Haynes signe plusieurs titres de sa main, rappelant au passage que c’est en offrant d’impeccables blues rock à la cantonade (John Mayall,

Joe Bonamassa…) qu’il se fit aussi un nom au début des années quatrevingt-dix. On sortira du lot ses deux titres acoustiques, la sombre rumination au dobro “Heavy Load”, et “Black Horizon”, son pendant optimiste, qui conclut l’album, exemplaires de fluidité dans le rapport guitare/ voix.

Pour les reprises, aucune limite. Toutes les nuances de bleu sont abordées. Le funk roublard de Junior Wells, pour une version jouissive de “Snatch It Back And Hold It”, traversée d’une longue improvisation qui retombe sur ses pattes comme un félin ; les splendides incantations du “Make It Rain” de Tom Waits ; la soul de Bobby Blue Bland (“Ain’t No Love In The Heart Of The City”), le british blues des Animals (“(Brother Bill) Last Clean Shirt”)... Assis sur une musicalité sans équivalent — mention spéciale au claviériste Danny Louis —, le quatuor de Warren Haynes ne s’interdit aucune transfiguration, telles les versions de “Feel Like Breaking Up Somebody’s Home” (Ann Peebles) ou de “I Asked Her

For Water (She Gave Me Gasoline)”, de Howlin’ Wolf, qui feraient passer Cactus ou Vanilla Fudge pour des chorales de boy-scouts.

Une réussite évidente.

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