Neil Young
“Barn”
Un an après la surprise “Homegrown”, album inédit arraché aux années 1970, et deux ans après “Colorado”, marquant le retour de Crazy Horse, son légendaire backing-band, le Loner persiste, et signe “Barn”, collection de dix chansons, impeccablement troussées et arrangées ; ce qui, à soixante-seize ans, n’est pas si mal. Passé l’évocation bucolique du passage des saisons, depuis une maison au bord d’un lac, assortie de celle du “vent dans les cheveux” de la bien-aimée et des “étoiles qui se penchent sur nous pour voir si tout va bien”, c’est du monde comme il va bien mal que Neil Young, rescapé d’un AVC et qui ne reconnaît plus rien, nous entretient. Le folk du “bon vieux temps”, traversé d’accordéon, d’harmonica, de pedal-steel et de piano honky-tonk, fait alors place à des guitares lancinantes, déchirées ou gondolantes, telles des signaux de détresse adressés au ciel, puis de franches déflagrations de colère à l’encontre de ceux qui nous ont “vendu le changement”, nous laissant récolter en retour “des incendies et des inondations” et qui, sous prétexte de lutter contre une pandémie, en profitent pour “nous contrôler et voler nos pensées”. Faut-il acheter ce CD ? Oui, car si la parenthèse avec le groupe Promise Of The Real n’était pas indigne, retrouver Neil Young avec Nils Lofgren, Billy Talbot et Ralph Molina pour la quatorzième fois depuis 1969 fait toujours plaisir, d’autant qu’ils sont parmi les derniers à jouer ce countryrock brinquebalant et étrangement attachant depuis que les Rolling Stones ont perdu Charlie Watts ; voire les seuls, sans doute, à chanter encore pour “ceux qui se sont perdus” et à nous enjoindre, au risque assumé du ridicule, à “ne pas oublier l’amour”.
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