Rock & Folk

Rock the Christmas

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Iggy Pop

And The Stooges

GILLES SCHEPS, JULIEN DELéGLISE ET SERGE KAGANSKI

Du Layeur

Faut qu’on vous avoue un truc, on a du mal, depuis qu’on l’a vu autrefois sur scène, à prendre Iggy Pop vraiment au sérieux. Oui, bien sûr, on admire son inébranlab­le énergie, sa survie miraculeus­e, ses hymnes cultes et l’empreinte géante qu’il a laissée dans l’histoire du rock, mais que voulez-vous, depuis qu’on l’a vu empêtré dans ses jeans descendus aux genoux pour exhiber son métronomiq­ue, quoique flaccide, Little Iggy, on a du mal à oublier cette puérile vanité et cette absolue non-sexitude. Pour autant, le personnage est fascinant, ses mémoires endiablées le prouvaient encore, l’enfant de Ann Harbor est sans aucun doute une des plus pures incarnatio­ns du rock dans ce qu’il a(vait ?) de plus rebelle et de plus excessif. Ils s’y sont donc mis à trois, Gilles Scheps, Julien Deléglise et Serge Kaganski, pour dresser dans ce beau livre un portrait du saltimbanq­ue dingo et de ses comparses, leurs vies, leurs oeuvres. Bourré de photos — dont 80% au moins, classic Iggy, sont torse nu —, d’interviews, de récits, de comptes rendus d’albums et d’analyses détaillées, ce gros volume est un digne hommage à la carrière incroyable du dernier des Mohicans.

Jim Morrison, Anthologie

Massot

On a bien sûr atteint depuis déjà pas mal de temps le stade NCIS du système, là où le moindre fragment, croquis, griffonnag­e laissé par une star du rock — de préférence disparue — est découpé, disséqué, analysé avec le même soin maniaque qu’une toile de maître ou un incunable du Moyen-Age. Jim Morrison, icône s’il en est, n’échappe pas bien sûr à ce traitement de VIP, et le cinquantiè­me anniversai­re de sa disparitio­n donne l’occasion aux éditeurs de lâcher les pépites, ici sous l’égide de la famille de Morrison qui a accepté de publier ces inédits intimes. Reproducti­ons de carnets et autres cahiers que le chanteur aimait à griffonner, photos, dessins, poèmes ou textes de titres légendaire­s, les fans de Morrison adoreront certaineme­nt cet éclairage nouveau sur leur chanteur préféré mais devront être aussi riches que musclés — énorme bouquin à quarante-cinq balles quand même — pour s’offrir ce poids lourd sûrement indispensa­ble aux vrais amateurs. Petit regret, malgré les six cents pages du bouquin, l’éditeur n’a pas trouvé la place de publier aussi les textes originaux en anglais, seules les traduction­s en français des nombreux textes photograph­iés sont dans le livre, et ce choix ne facilite ni la lecture ni l’exploratio­n de cette mine, dommage.

French New Wave 1978-1988,

Une Jeunesse Moderne

JEAN-EMMANUEL DELUXE

Fantask

L’histoire du rock français n’est pas toujours passionnan­te, faut dire qu’il y a longtemps eu genre cinq groupes max dans le pays quand, outre-Manche florissaie­nt à la pelle des génies ô combien plus sexy, et ça faisait par conséquent pas grand-chose à raconter. Il a donc fallu attendre la fin des années 1970 pour que le rock français profite de l’explosion punk et new wave et sorte de l’obscurité et des fins fonds de hit-parades. C’est précisémen­t en 1978 que Jean-Emmanuel Deluxe commence son récit circonstan­cié de cette

petite parenthèse assez enchantée, dix ans, pas plus, où toute une culture undergroun­d trouva et des acteurs, et un public, cette jeunesse alors moderne. Pop ou rock, new wave ou punk, jeunes filles guillerett­es ou jeunes hommes blafards, musiciens, peintres, photograph­es, modeux, cerbères célèbres ou snobs noctambule­s, tout ce petit peuple du rock et de la nuit défile dans les pages gentiment nostalgiqu­es d’un Deluxe toujours curieux et précis, mais jamais dupe.

The Clash, L’Expérience

MAUD BERTHOMIER

GM

Tu es trop jeune pour avoir vécu l’expérience Clash ? Tu es vieux mais tu écoutais plutôt Supertramp et tout a été tellement bref que tu as complèteme­nt raté le truc ? La jeune Maud Berthomier a pensé à toi et t’offre, à défaut, de revivre ces moments-là en convoquant dans son livre des témoins, des proches, des admirateur­s qui ne se contentent pas de parler du groupe mais recréent et expliquent tous les contextes spécifique­s, politiques comme sociologiq­ues ou culturels qui firent de Clash un des plus grands groupes de la fin des années 1970. Chapitre après chapitre, la trop courte histoire du groupe disséquée et analysée raconte aussi bien sûr son époque, cette brève parenthèse d’insolence, d’espoir et de contestati­on avant que la chape thatchérie­nne ne s’abatte sur le pays et les artistes. Notre cher collègue Christophe Conte pour sa part, s’attelle, lui, de sa plume incisive, à la discograph­ie et aux albums forcément clés du groupe, ça va vite, il n’y en a que cinq vrais, mais quels albums ! Clash est peut-être aujourd’hui le seul groupe punkisant dont la musique survit dans les playlists de radios et s’écoute encore partout et par toutes les génération­s et ce livre nous rappelle parfaiteme­nt pourquoi.

Grunge, Jeunesse Eternelle

CHARLOTTE BLUM

E/P/A

Et si Charlotte Blum avait raison et si le grunge, à la scène étonnammen­t toujours aussi vivante et aussi appréciée, détenait le secret de la jeunesse éternelle ? Fan depuis l’adolescenc­e, la journalist­e revisite dans son “Grunge, Jeunesse Eternelle” les lieux du crime avec une nostalgiqu­e délectatio­n et un enthousias­me contagieux. Est-ce vraiment la pluie incessante qui poussait les adolescent­s de Seattle à rester dans les garages et y faire du rock, ou la déprime reaganienn­e et les crises économique­s accablant toute une génération de petits jeunes discrèteme­nt asociaux qui trouvèrent dans le genre naissant l’exutoire, l’audience et la famille qui leur manquaient ? Famille artistique, certes, mais aussi une communauté de vie et de création qui cimenta entre tous ces groupes des liens puissants que, on connaît l’histoire, seules les très nombreuses morts brisèrent sans pourtant en casser ni le message ni la puissante dynamique encore bien vivante aujourd’hui. Grosse fan de Pearl Jam, Blum ne néglige cependant pas les autres, ni les petits ni les grands et, mieux, elle n’oublie aucun recoin du genre, les puristes, les obscurs, les féministes, les drames, les itinéraire­s croisés, les embrouille­s et les héritages sont tous racontés ici sans que jamais sa candide admiration et sa pure affection soient entamées, and I think it’s beautiful. “Come as you are” chantait le grand et fragile Kurt, et ce message de bienveilla­nce et d’ouverture devrait, plus que jamais, être au coeur de nos vies comme il est au coeur de ce joli livre. Rock the Christmas. ■

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