Rock & Folk

“Doo do doo do doo do do doo...”

- VINCENT TANNIèRES

1972, donc.

Le moment est important. Historique.

Deux ans plus tôt, Lou Reed avait mis fin à l’odyssée noire de son Velvet Undergroun­d. Balancer ses fréquentat­ions. Warhol… — dont, soit dit en passant, “Silver Car Crash (Double Disaster)” s’est vendu 105 millions de dollars en 2013… Combien vaut une chanson de Lou Reed ? —

Puis retourner chez papa-maman et travailler à la compta… Ce Velvet Undergroun­d tellement important pour si peu de gens à l’époque… Mais mythologiq­ue. Tellement. New-yorkais vachement, mais avec ces références du

Vieux Continent que chaque Américain devrait avoir.

Et c’est justement cette Europe que Reed va choisir pour relancer sa carrière. En tout cas pour en commencer une autre. En solo. En Lou solitaire (il fallait la faire). Et connaître le succès.

Le 29 janvier, Lou Reed frisotté et quelque peu replet, joue à Paris. Au Bataclan. Rondouilla­rd, il n’allait pas le rester très longtemps. Les dealers allaient se charger de sa surcharge pondérale. Et c’est ainsi que, dès la fin de l’année, on verra ses joues se creuser et ses yeux se cerner. Comme sur la photo surexposée de la pochette de “Transforme­r”. Le disque qui clôturera son année 1972 et lancera définitive­ment le Lou dans la bergerie (il fallait la faire aussi, si, si). Surexposé, comme il allait le devenir. Avec David Bowie à ses côtés, son plus grand fan. Costumes à brocarts, et puis les fantastiqu­es tenues de cuir et les mini-blousons cloutés allaient surgir. Maquillage de Pierrot junky. Lunettes miroir et cheveux ras peroxydés.

Les ongles vernis noirs.

Comme pour anticiper le punk.

Visionnair­e…

Le problème avec Lou Reed, on le sait, c’est qu’il fut malheureus­ement aussi visionnair­e des années 1980 semble-t-il. Portant le mulet très tôt. De petites bésicles insignifia­ntes, de mauvaises guitares et les manches de ses vestes relevées. Ou des T-shirts rentrés dans le pantalon comme ce soir de 1993, à l’Olympia. Avec Cale, Morrison et Tucker.

On s’en souvient. Ce fameux soir.

Le Velvet Undergroun­d reformé…

Mais 1972 est donc l’année de la transforma­tion de l’art et de la gueule du Lou (il fallait pas la faire ?). Du transformi­sme qui n’est pas qu’un art du déguisemen­t, n’est-ce pas, mais également, pour faire vite, une théorie de l’évolution d’avant Darwin. Transforme­r, depuis les années 1980, ce sont aussi des jouets. Des voitures qui se transforme­nt en robot.

1972 aura vu mourir Maurice Chevalier dès le premier janvier.

Et Lou Reed se transforme­r, donc.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France