Rock & Folk

L’habit en rock

- VINCENT TANNIèRES

1982. On se préparait un beau mois de juin. Comme un air de printemps. Henri Krasucki remplaçait Georges Séguy à la tête de la CGT. On allait rire. Et puis la première Fête de la musique allait permettre aux braillards de se défouler en plein air. On allait pleurer. Mais on chantait à tue-tête en claquant des doigts “Town Called Malice”, Ooh yeah ! Sous un ciel qui semblait éternellem­ent bleu. Ou bleu-gris. Anglais. Oui… et puis… et puis, alors que les Jam étaient au sommet du truc, Weller allait bientôt décider de casser l’histoire. D’arrêter. De stopper ces trucs sublimes.

Fatigue. Pas envie de vieillir comme un rocker. A 25 ans à peine. Personne n’a fait comme lui, bien sûr ! Surtout pas les groupes sixties. Lui qui, avec les moyens du bord, avait réactivé, au-delà de sa musique, l’esprit et aussi le look mod tant bien que mal. Un polo Fred Perry par-ci. Une parka parfois...

Balayant d’une main gourmettée Perfecto et jeans troués ou T-shirts de son propre groupe comme en portait beaucoup trop souvent Joe Strummer à la même époque. Réussissan­t même à imposer le costume cravate. Parfois aux couleurs de l’Union Jack. Ce qui n’était pas joué si l’on en croit la fiche Wikipédia, ha, ha ! des Jam selon laquelle le groupe se serait formé après un concert de… Status Quo. Status Quo, davantage réputé pour son boogie que pour son élégance. N’est-ce pas. Relançant le débat originel de la possibilit­é de faire du rock en costume. D’être rock avec une cravate, hein.

Ce fut longtemps un sujet ici devant la machine à café… Absurde, bien sûr, mais force est de constater que le schisme existe encore. Deux vestiaires pour une musique. Irréconcil­iables comme le Parti socialiste. Ou Peter et Sloane.

Les Beatles, Wilko et Lee Brilleaux, Bijou, le Peter Doherty d’une période, Franz Ferdinand, Hives… pas rock ? Allez leur dire.

1982, donc, Weller choisit de laisser ses collègues — le boutonneux et celui à mulet — courir à côté, puis derrière le scooter. Sans un regard dans les 72 rétroviseu­rs du Vespa, pour partir fonder ce Style Council qui restera parmi les noms les plus moqués de cette musique, en tout cas l’un des mieux placés auprès des rieurs. Reconnaiss­ons que dans l’intitulé, on n’est pas loin du coiffeur visagiste ou des leçons de stylisme sur M6.

Mais ceci est une autre histoire.

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