Villa Fantôme
“Villa Fantôme”
Il y a souvent de quoi se méfier lorsqu’un groupe se reforme quelques décennies après ses premiers ébats… la nostalgie n’est pas une baguette magique. Mais parfois, comme dans ce cas, la réactivation s’avère une bonne surprise. Dans les années quatrevingt-dix, La Ruda Salska fut le fer de lance d’un rock alternatif frénétique et eut à son actif dix albums et mille concerts déchaînés aux quatre coins de l’Hexagone et de l’Europe. Ses deux leaders, Manu et Pierrot, reprennent du service en ayant le bon goût de ne pas revendiquer le nom de leur ancienne formation. Et dès le morceau d’ouverture, le flamboyant “Fantômes Dans Les Rues Fantômes”, toutes les appréhensions initiales disparaissent : l’intro cuivrée est de toute beauté, la fièvre ska irrésistible, et la voix un peu atone entretient un contraste intéressant avec la chaleur des cuivres. Et quand “Série Noire” donne la priorité aux guitares véloces et à l’orgue, la fièvre est loin de retomber. Mais la continuité est évidente, conjointement à une évolution flagrante. Si la fibre ska-rock est toujours entretenue avec une allégresse contagieuse, la tendance punk est minorée et les tempos, moins rapides, sont aussi moins précipités. La Ruda bénéficiait d’une fougue ahurissante mais pâtissait d’un son souvent approximatif ou défaillant ; malgré de petites baisses de régime avec quelques morceaux moins pertinents, Villa Fantôme soigne l’enregistrement et le mixage, les cuivres sont rutilants avec des chorus ébouriffants (“Sentimentale N’est Pas La Foule”), la voix claire (en retrouvant sur “Dieu N’Est
Pas Bon Danseur” le phrasé à la Bashung), les guitares acérées, les rythmiques évidentes et les textes francophones habiles.
★★★