Rock & Folk

Outer Range

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A priori, “Outer Range” est une série western on ne peut plus classique.

Où un rancher buriné est confronté à son ennemi local, un fermier richissime qui rêve d’accaparer ses terres pour agrandir son domaine. Le tout sur fond de rivalités et de tensions latentes, de foi en la famille et de bétail à gérer sous le soleil tapant du Wyoming. Et puis ça vrille un brin. Avec une rixe dans un bar, suivie d’un mort sur le bitume. Et un cadavre qui doit absolument être planqué. “Outer Range” démarre donc à la façon des westerns d’antan. Du temps où John Wayne et Gary Cooper faisaient la loi. Sauf qu’ici, l’époque n’est plus la même (on est en 2022) et qu’utiliser son six-coups pour un regard de travers ne s’accepte plus aussi facilement. Mais bon. L’ambiance poussiéreu­se et le Stetson vissé au front font quand même pencher les huit épisodes de “Outer Range” du côté western pur et dur. Mais pas du western-western. Plutôt du néo-western. Voire du Weird Western, sous-genre du cinéma populaire déviant mixant les films de cow-boys (comme on disait enfant) au cinéma de science-fiction et d’horreur. Pour prendre quelques exemples bigarrés : “La Vallée De Gwangi”, cow-boys contre dinosaures, “Le Bison Blanc”, Charles Bronson en chasseur de bisons géants, “Outland”, remake du “Train Sifflera Trois Fois” dans l’espace, “Vorace” (et son garçon vacher cannibale) ou, côté nanars gênants des sixties, les impayables “Jesse James Contre Frankenste­in” et “Billy Le Kid Contre Dracula”. L’exemple emblématiq­ue du Weird Western restant la série culte “Les Mystères De L’Ouest” où James West et Artemus Gordon maniaient d’invraisemb­lables gadgets à la James Bond pour contrer l’inconnu. “Outer Range” possède lui aussi sa part de Weird. Très précisémen­t quand le héros (incarné par Josh Brolin) se retrouve presque par hasard (ou non ?) face à un mystérieux et gigantesqu­e trou apparu soudaineme­nt en plein milieu de ses terres. Un gouffre béant rempli d’une étrange énergie qui semble être, du moins en partie, le reflet de sa conscience et de ses doutes. Mais est-ce vraiment le cas ? Surtout quand une mystérieus­e jeune femme, venue d’on ne sait où et qui campe pas loin de là, l’incite à faire une sorte de fusion, mentale et physique, avec le trou... Pendant ce temps, les intrigues parallèles suivent leur bonhomme de chemin. Avec, entre autres, une love story larvée, une shérif indienne trop accaparée par son job pour s’inquiéter des siens, et la disparitio­n toujours non résolue d’une femme de la région. A priori aucun rapport avec le trou. Sauf lorsqu’une montagne s’efface instantané­ment pour réapparaît­re quelques secondes plus tard. Ou quand un mystérieux bison avec une flèche plantée dans le flanc apparaît régulièrem­ent au détour d’une route ou au coeur d’une forêt. Comme un signe avant-coureur d’une éventuelle apocalypse. Mais que se passe-t-il au juste ? Le trou serait-il un passage vers l’Enfer ? Ou une ouverture dimensionn­elle vers un autre ailleurs ? Et si oui, pourquoi ? “Outer Range” laisse longtemps les questions en suspens. Questions qui n’amènent pas de réelles réponses. Juste pour laisser l’esprit du spectateur en éveil, presque en état second, à l’image même du personnage incarné par Josh Brolin. “Outer Range” rejoint ainsi la longue liste des séries what the fuck initiées par différente­s chaînes du câble (ici Amazon) depuis le succès internatio­nal de “Lost” il y a plus de quinze ans. Où les métaphores sur la vie et les univers parallèles permettent d’aborder l’existence sous un autre angle. Plus étrange. Plus décalé. Et plus cintré. Comme si le réel, finalement, n’était qu’une immense fake news depuis la nuit des temps... ■

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