Rock & Folk

Peter Gabriel

“i/o”

- STAN CUESTA

On devrait détester Peter Gabriel. Il a été le chanteur de Genesis, habillé en robe, maquillé en clown blanc, avec un masque de renard. Il jouait de la flûte traversièr­e comme l’affreux de Jethro Tull. Son plus gros tube ? Une rengaine insipide en duo avec Kate Bush. Il a été de tous les combats politiquem­ent corrects aux côtés des insupporta­bles Sting, U2 et autres. Il est devenu vieux, gros et moche. Oui mais. On l’aime. Pendant cinq ans, avec “The Lamb Lies Down On Broadway” et ses trois premiers albums solos, il a été à l’avant-garde du rock le plus inspiré. Ses amis et collaborat­eurs s’appellent Brian Eno (encore présent ici), Robert Fripp et consorts. Il a créé le studio et le label Real World, responsabl­es de disques de world music fabuleux. Et quel chanteur ! Une sorte de Stevie Winwood en plus émouvant — “Sledgehamm­er”, le hit que Winwood n’a jamais eu — capable de nous renverser en chantant n’importe quoi. Et il ne s’en prive pas. On retrouve toutes ces contradict­ions sur ce nouvel album, attendu depuis plus de vingt ans... Tout y est énorme, surproduit, joué par les fidèles Manu Katché, Tony Levin et David Rhodes assistés de chorales et orchestres symphoniqu­es divers. L’inspiratio­n est à la limite du prêchi-prêcha. La modernité plus si moderne : un titre dévoilé tous les mois pendant un an, deux mixages de l’album pour le prix d’un — un “lumineux” réalisé par Mark “Spike” Stent, l’autre “sombre” par Tchad Blake, sans qu’on voie vraiment la différence. Ennuyeux et boursouflé ? Oui mais. Sur “Panopticom”, le titre d’ouverture, le meilleur (si vous ne l’aimez pas, laissez tomber), on retrouve les voix ensorcelan­tes de Peter, sa force mélodique et expressive. Ailleurs un peu aussi (“And Still”).

Il lui sera beaucoup pardonné.

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