The Jesus And Mary Chain
“Glasgow Eyes” FUZZ CLUB RECORDS/ WAGRAM
Nous avions retrouvé les frères Reid en 2017 avec un “Damage And Joy” qui marquait la fin de cette ère glaciaire consécutive à leur séparation brutale de 1998, en plein concert à Los Angeles. “Munki”, grandiose épilogue conçu mâchoires serrées achevait une discographie en six chapitres sur un oraculaire “I Hate Rock’n’Roll” (à 2’37, montez le volume, constatez). Ces retrouvailles, aussi inespérées que le retour de l’imam Mahdi, pour LE fleuron de la scène noise-pop sous speed et larsen de la fin du siècle XX, faisait passer la pilule d’un album très inégal, voire poussif. Nous aimions dès lors un fétiche, mais nous pardonnions : mort, le roi n’en perd pas pour autant sa couronne. Confirmation avec ce huitième album, et là, soyons clairs : c’est absolument étourdissant. Les deux frangins électrifiés d’East Kilbride sont clairement de retour aux consoles démoniaques du grand rock’n’roll. Dès l’ouverture (“Venal Joy”), tout ce qu’on a adoré chez eux est là : rythme mötörik déflagratoire, voix blanche de Jim, guitare saignée de William, débauche d’effets, de vitalité, de morgue, et ce cool abrasé qui fit leur attitude (“I’m on fire/ I won’t give up and die”). Au final, douze salves sans temps mort, aucun répit, douze stations d’apnée sous saturation granuleuse et climax épileptiques (“American Born”, “Jamcod “Pure Poor” – tout !). Au milieu de cette violente orgie, un chef-d’oeuvre : “Chemical Animal”, réminiscence en apesanteur de leur diamant noir de 1987, “Darklands”. Comme Proust le fait dire à Odette :
“Qu’avez-vous besoin du reste ? […] C’est ça, notre morceau…” ★★★★