Renouer avec les ancêtres
Les co-auteurs du livre « Chamanisme, rapport aux ancêtres et intégration transgénérationnelle », ont montré que les sociétés traditionnelles géraient les héritages transgénérationnels de multiples manières. Le culte des ancêtres, par exemple, entretenait la mémoire des histoires de familles, ce qui prévenait le manque de transmission (contrairement à ce qui se passe dans nos sociétés hypermodernes). Cette manière d'entretenir la mémoire familiale permettait de limiter les aliénations transgénérationnelles qu'ils nommaient « maladie des ancêtres ». Avec le culte des ancêtres, les anciennes traditions cherchaient à préserver une certaine harmonie avec le passé et maintenir l'équilibre du monde.
Le culte des ancêtres se pratiquait bien avant les religions. Très répandu en Asie, en Afrique, même en Europe, il s'inscrivait dans ce désir d'harmonie globale, entre les morts et les vivants, entre le monde invisible et celui visible. Dans les régions d'Asie, Chine, Corée, Japon et Vietnam en particulier, le culte des ancêtres était très important. Se relier à ses ancêtres était autant une pratique de ressourcement personnel qu'un précieux privilège. Lorsqu'il fut incorporé au bouddhisme, il fut associé à de nouvelles règles.
En Chine par exemple, seul le roi pouvait célébrer ses ancêtres jusqu'à la 7e génération. Les princes ne pouvaient aller au-delà de la 5e, les grands officiers la 3e, et les gens ordinaires n'avaient qu'un seul ancêtre. Quant à l'Empereur, se faisant appeler « Fils du Ciel », il se devait d'honorer le Ciel et la Terre, ses « parents » au sens mythologique et symbolique du terme. Au Vietnam, le culte des ancêtres avait aussi une signification pratique de transmission. Les plus jeunes apprennent de leurs ancêtres les principes moraux, l'amour pour le travail, le courage de surmonter les difficultés, afin de bien élever à leur tour leurs descendants. Au Japon, un autel était installé à l'endroit le plus solennel de presque chaque maison. On y déposait des tablettes sur lesquelles étaient inscrits les noms des ancêtres.
Lors des cérémonies d'anniversaire - aujourd'hui encore pratiquées - on se les remémorait et les vénérait à travers différents rituels ; offrande d'encens, sucreries et thé, en psalmodiant des soutras. Source : Chamanisme, rapport aux ancêtres et intégration transgénérationnelle, Th. Gaillard, C. Michael Smith, Olivier Douville, Pierre Ramaut, Elisabeth Horowitz, Iona Miller, Myron Eshowsky, 2016, Ecodition Editions, Genève.