Comprendre les cancers du cerveau
En étudiant un modèle de gliome (tumeur cérébrale) avec différentes méthodes originales de résonance magnétique nucléaire (RMN liquide et solide et IRM), des chimistes et biologistes du CNRS ont pu élucider les mécanismes biochimiques du cancer du cerveau et confirmer le potentiel thérapeutique d’un récepteur de la sérotonine.
Tumeurs cérébrales les plus fréquentes, les gliomes représentent 50% des cancers du cerveau. Les altérations moléculaires impliquées dans ces cancers affectent principalement les récepteurs membranaires à activité tyrosine kinase : ceux-ci agissent comme des « interrupteurs » d'activation ou d'inhibition de nombreuses fonctions comme la division ou la migration cellulaire. On observe notamment une amplification et/ou des mutations du récepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR) et des voies de signalisation qui lui sont associées. Ceci entraine une division cellulaire incontrôlée et, à terme, l’apparition de tumeurs. Plusieurs thérapies ciblées ont été développées mais les traitements actuels restent inefficaces contre les glioblastomes, les formes les plus graves de ces cancers du cerveau. Il est donc essentiel d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques pour traiter ces cancers.
Des scientifiques du CNRS, au Centre de biophysique moléculaire et au laboratoire Conditions extrêmes et matériaux haute température et irradiation, ont étudié un modèle de ces cancers du cerveau chez la drosophile pour mieux comprendre les perturbations métaboliques associées. La surexpression des récepteurs de l’EGF et d’une enzyme (la phosphoinositide 3-kinase, PI3K) dans les cellules gliales, les cellules du système nerveux central qui soutiennent et protègent les neurones, provoque une hypertrophie du cerveau nettement visible par IRM et l’apparition d’une cachexie (fonte du tissu adipeux et des muscles). Les scientifiques ont ensuite exploré l’altération du métabolisme cellulaire en utilisant la RMN à angle magique haute résolution (HR-MAS) et la RMN liquide 2D. Ils ont de cette façon pu mettre en évidence des modifications des voies métaboliques dans le gliome, en particulier des modifications caractéristiques de la cachexie. Si l’intérêt de cibler le récepteur 5-HT7 de la sérotonine pour le traitement de maladies neurologiques et psychiatriques est bien décrit, son rôle dans le contrôle de la prolifération tumorale demeure peu exploré. Pour tenter de répondre à cette question, les chercheurs ont génétiquement modifié les drosophiles porteuses du gliome pour qu'elles expriment à la surface des cellules gliales le récepteur R5-HT7 humain. Ils ont ainsi pu montrer que l'expression de ce récepteur de la sérotonine atténue plusieurs effets qui sont associés au développement du gliome, tels que l'hypertrophie du cerveau, observable par IRM, et la cachexie.
La combinaison des techniques d’analyses RMN utilisées ici se révèle être un outil efficace pour mieux comprendre les mécanismes biochimiques de certains cancers du cerveau : une étape cruciale pour développer de nouvelles thérapies ciblées.