Art rupestre et art moderne : un dialogue à travers les millénaires
Tout en jouant un considérable rôle scientifique, les relevés d’arts rupestre ont transformé notre perception de la préhistoire, mais aussi bouleversé l’histoire de l’art. Plusieurs millénaires après avoir été tracées, d’une main virtuose, par des artistes préhistoriques sur des parois rocheuses, les peintures et gravures rupestres et pariétales ont été exposées aux yeux du monde dans l’entre-deux-guerres. C’est à Leo Frobenius que l’on doit ce fabuleux coup de projecteur : après sa rencontre avec l’abbé Breuil en 1929 à Johannesburg, l’ethnologue allemand intègrera en effet les cercles scientifiques et artistiques parisiens. Il organisera à Paris deux expositions : la première dès 1930 à la Salle Pleyel, la seconde en 1933 au Musée d’Ethnographie du Trocadéro (qui deviendra Musée de l’Homme en 1937).
Il entreprendra même une vraie tournée européenne : Amsterdam, Bâle et Zurich, Rome, Vienne, Berlin, Oslo et Bruxelles. Puis c'est le très prestigieux Museum of Modern Art (MoMA) à New York qui accueillera le travail de Frobenius. Il y exposera 150 relevés d’art rupestre africain et européen.
Alfred Barr, le directeur du MoMA, choisit de présenter ces relevés sans aucune information contextuelle, et accompagnés d’oeuvres modernes. Ce parti-pris marquera un tournant dans l’histoire des relevés.
Les critiques d’art et les artistes eux-mêmes, furent stupéfaits par le travail de ces peintres préhistoriques, consacrés « premiers surréalistes », et ils y trouvèrent une puissante source d’inspiration.
L'exposition retrace cette mise en lumière des relevés et cette irruption de la Préhistoire dans l’art moderne.
Enrichie de prêts consentis par le Centre Pompidou, elle donne notamment à voir une sérigraphie et un plâtre de Jean Arp, lequel s’est inspiré des relevés pour explorer des formes et des structures abstraites en utilisant des matériaux naturels ; deux peintures de Paul Klee, qui empruntent à l’art rupestre ses motifs et ses couleurs ; une oeuvre de Wilfredo Lam, évocation des êtres mythiques dessinés il y a des millénaires ; ou encore une toile de Jackson Pollock, peintre nourri de Préhistoire, qui a pu trouver dans le symbolisme abstrait de la peinture rupestre une source d’inspiration.