L’orpheline du Temple
Avec la chute de Robespierre et la fin de la Terreur, les conditions de détention de la dernière survivante de la famille royale vont s’améliorer, jusqu’à ce qu’elle soit enfin libérée. Mais la jeune Madame Royale restera marquée à vie par la Révolution.
Née en 1778, Marie-Thérèse Charlotte, surnommée Madame Royale, est le premier enfant de Louis XVI et Marie-Antoinette. Lorsque s’ouvrent les états généraux en mai 1789, la famille royale vit une tragédie intime (et dynastique) : le petit dauphin, Louis-Joseph, âgé de 7 ans, agonise et meurt début juin. C’est encore meurtris par ce deuil qu’ils affrontent la Révolution. « Dès l’âge de 4 ans, la petite MarieThérèse Charlotte révèle un caractère orgueilleux, dur et têtu, explique sa biographe Anne Muratori-Philip. Aux premières heures de la Révolution, la fillette, tenue à l’écart des conciliabules familiaux, observe l’embarras de son père, le désarroi de sa mère et l’agitation de sa tante, Madame Élisabeth. Elle vit dans une angoisse permanente, mais elle ne dit rien, préférant masquer ses tourments. Face aux drames qui vont se succéder, elle fait preuve d’un grand courage. »
Marie-Thérèse et la solitude
Réclusion aux Tuileries, fuite stoppée à Varennes, prise des Tuileries, Madame Royale partage le destin de sa famille. « Jusqu’au 11 août 1792, Madame Royale est au premier rang des événements avec ses parents. Elle a 13 ans et demi et rien ne lui échappe, ni les maladresses de Lafayette, ni le double jeu de Pétion, ni l’attitude servile de Roederer. Madame Royale se rend bien compte que la situation se dégrade chaque jour davantage. Pire, elle voit les canonniers tourner leurs canons contre le roi. Le 13 août, la famille royale est emprisonnée au Temple. Marie-Thérèse Charlotte veille sur sa mère la reine. Après la mort du roi, elle l’observe à la dérobée, prête à lui venir en aide à la moindre défaillance. Le dauphin est enlevé à sa mère. Puis c’est la reine qui part, suivie sept mois plus tard de Madame Élisabeth. Madame Royale ne saura rien de ce qui leur est advenu, idem pour la mort de son frère. Elle se heurte à un mur de silence. »
Une amie enfin… et la libération
À la fin de Terreur, ses conditions de détention s’améliorent, même si elle reste sous étroite surveillance : il faut passer sept guichets pour lui rendre visite. On lui accorde une dame de compagnie, Mme de Chanterenne, qu’elle surnomme bientôt Rénette. C’est elle qui lui annoncera la mort de ses proches. Marie-Thérèse a plus de 16 ans, et pleure pendant des heures. Seule survivante, elle devient un symbole, la victime des dérives révolutionnaires, l’Orpheline du Temple. La Convention cherche une solution. « Madame Royale emprisonnée n’est pas dangereuse et peut servir de monnaie d’échange. Expulsée à l’étranger, elle deviendrait une menace. Par exemple, en faisant valoir ses droits à la couronne de France, puisque la Convention a supprimé la loi salique. En réalité, la France l’a échangée contre des prisonniers politiques français livrés par Dumouriez à l’Autriche. » Marie-Thérèse est donc envoyée à Vienne où elle ne se plaira guère, regrettant toujours la France. Elle y reviendra, en sera de nouveau exilée, et sera même la dernière reine de France (et non des Français) pendant vingt minutes, entre l’abdication de Charles X, et celle de son mari, le duc d’Angoulême !