Secrets d'Histoire

Balade en région Le Pays basque, terre de mystère

- Par Clio Bayle

Une aura de mystère entoure l’histoire du Pays basque et de son peuple. Ce territoire des Pyrénées occidental­es, partagé entre France et Espagne, se singularis­e en premier lieu par la pratique commune d’une langue ancestrale, l’Euskara. Chargé politiquem­ent, le débat autour de l’origine de ceux que Voltaire décrivait comme « un peuple qui chante et qui danse au pied des Pyrénées » continue de fasciner les spécialist­es.

Depuis le 1er janvier 2017, les 158 communes du Pays basque français sont regroupées au sein de la communauté d’agglomérat­ion Pays basque. Administra­tivement, les Basques bénéficien­t donc désormais d’une structure territoria­le unifiée, distincte de leurs voisins, les Béarnais. C’était leur revendicat­ion depuis la Révolution et la création du départemen­t des Basses-Pyrénées. En 1790, en effet, les provinces basques du Labourd, de la Basse-Navarre et de la Soule ont été placées sous l’autorité préfectora­le de Pau, la capitale du Béarn, pourtant moins peuplé que Bayonne. Commence alors une longue période de rivalité entre les deux territoire­s, reflet d’un profond clivage identitair­e qui perdure aujourd’hui. « Le pays des Neuf Peuples » Pour comprendre l’origine et l’enracineme­nt du sentiment identitair­e basque, il faut remonter plus loin. De l’invasion celtique, au vie siècle avant notre ère, à la chute du royaume de Navarre, au xvie siècle, bien des péripéties ont jalonné l’histoire des territoire­s basques. Mises bout à bout, elles permettent d’entrevoir comment les habitants des Pyrénées occidental­es ont réussi, malgré les peuplement­s successifs, la conquête

romaine et la christiani­sation, à préserver leur spécificit­é et leur langue ancestrale commune. Les premiers témoignage­s directs sur ces population­s datent de la moitié du ier siècle avant notre ère, lorsque les Romains investisse­nt le triangle que forment la Garonne, la côte Atlantique et les Pyrénées. Les historiens de l’époque baptisent « Aquitains » ceux qui sont au nord de la chaîne montagneus­e, et « Vascons » ceux au sud. Cette dernière dénominati­on devient générique et aboutit peu à peu aux « Gascons » et vraisembla­blement aux « Basques ». Le premier événement qui témoigne de la reconnaiss­ance des population­s proto-basques survient pendant cette occupation romaine. À la fin du iiie siècle, neuf peuples obtiennent leur séparation de l’Aquitaine seconde – qui englobe toute la façade atlantique, des Pyrénées à la Loire. La nouvelle province, qui s’étend des Pyrénées à la Garonne, est appelée la « Novempopul­anie » (le « pays des Neuf Peuples »).

Irréductib­les Vascons

Lorsque la domination romaine s’achève, les population­s des Pyrénées occidental­es se sont en partie « romanisées ». De ce long processus subsistent plusieurs témoins patrimonia­ux, dont le castrum de Lapurdum à Bayonne, le camp d’Imus Pyraeneus à Saint-Jean-le-Vieux, le trésor de Barcus dans la Soule ou encore les mines de fer et de cuivre dans les montagnes navarraise­s et bas-navarraise­s. Toutefois, une bonne partie des zones forestière­s et montagnard­es reste peu touchée par la latinisati­on et sa population continue de parler la langue préhistori­que. L’arrivée des Barbares au ve siècle change la donne. Les Vascons sont pris en tenaille entre les Francs au nord et les Wisigoths de la péninsule ibérique : leur résistance aux troubles qui agitent leur région forge le mythe d’un peuple irréductib­le. En 778, ils infligent d’ailleurs une cuisante défaite à l’arrière-garde de Charlemagn­e à Roncevaux. La lutte contre l’invasion des Francs et des musulmans, qui les menace pendant tout le Moyen Âge, contribue à les souder. De cette force naît le royaume de Navarre au ixe siècle, qui perdurera jusqu’au xvie siècle et dont le territoire se partage entre la France et l’Espagne, ennemies séculaires. Cette séparation est officialis­ée en 1659, à l’occasion du mariage « diplomatiq­ue » de Louis XIV et de l’infante Marie-Thérèse, quand les deux pays signent le traité des Pyrénées sur la Bidaossa, fleuve désormais frontière. Même rattachés au royaume de France, les territoire­s basques conservent des institutio­ns spécifique­s et un système politique original. Et ce, jusqu’à la Révolution, qui met fin aux particular­ismes basques.

Les Vascons se retrouvent pris en tenaille entre les Francs au nord et les Wisigoths de la péninsule ibérique. Leur résistance aux troubles qui agitent leur région forge le mythe d’un peuple irréductib­le.

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Descriptio­n exacte et particuliè­re des côtes et havres de Bayonne, Saint-Jean-deLuz, Labour, Fontarable et lieux circonvois­ins, par le graveur Hugues Picart (1587-1664).
 ??  ?? Mort de Roland à Roncevaux, en 778 : une enluminure extraite du manuscrit Grandes Chroniques de France (vers 1415), de Jean Fouquet.
Mort de Roland à Roncevaux, en 778 : une enluminure extraite du manuscrit Grandes Chroniques de France (vers 1415), de Jean Fouquet.

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