Louis XV et la marquise de Pompadour, une indissoluble entente
Si la relation entre Louis XV et la Pompadour devient rapidement platonique, le roi conservera une indéfectible amitié pour son ancienne maîtresse. Devenue sa conseillère privée la plus écoutée, elle est la première favorite royale à jouer un rôle politiq
Comment lui résister ? Grande, se mouvant avec grâce, elle affiche une silhouette parfaite. Sous une chevelure châtain clair, son visage est animé d’un regard gris, doux et captivant. Lorsqu’elle sourit, sa bouche découvre des dents d’une blancheur rare. Elle chante à ravir, joue très bien la comédie et a reçu la plus soignée des éducations.
Toujours joliment parée
Comment résister? Même le roi n’a pas pu! Louis XV, qui vient d’avoir 35 ans, est follement épris de Jeanne-Antoinette Le Normant d’Étiolles, 24 ans. En cette année 1745, il la reçoit depuis peu dans ses « Petits Cabinets ». Comment se sont-ils rencontrés ? Le hasard s’est fait bienveillant : le château de Madame d’Étiolles se trouve près de la forêt de Sénart, où il aime chasser. La belle a pris l’habitude d’y faire stationner son phaéton sur le passage du cortège royal. Toujours si joliment parée que Louis XV ne manque pas de la remarquer…
Une favorite qui fait scandale
Madame Le Normant d’Étiolles est née roturière, fille de François Poisson, homme à tout faire des frères Pâris, de célèbres financiers. S’il s’est enrichi, il s’est aussi compromis et a dû s’exiler en Allemagne. Madeleine de la Motte, la mère de Jeanne-Antoinette, mène une vie de courtisane. Parmi ses amants figure l’oncle de Le Normant d’Étiolles : c’est lui qui a arrangé le mariage de la jeune fille avec son neveu… À la Cour, le scandale est retentissant lorsque s’y répand la rumeur que le roi s’est amouraché d’une roturière issue, qui plus est, du milieu de la finance, abhorré de l’aristocratie ! Louis XV n’en a cure. Il revit : il a rencontré la femme de sa vie. Dépressif depuis la mort de la favorite madame de Châteauroux, il a retrouvé l’amour. Cette dernière n’est pas enterrée depuis un an que Jeanne-Antoinette, divorcée et titrée marquise de Pompadour, s’installe à Versailles.
Elle fait et défait les ministres
Le premier à s’apercevoir de la prodigieuse emprise que la marquise exerce sur le souverain est le ministre Philibert Orry. Contrôleur général des Finances, jusque-là très apprécié de Louis XV, il a la mauvaise idée de s’opposer aux
Si elle défait les ministres, la Pompadour les fait aussi. Ses protégés, Bernis, Choiseul…, héritent des meilleures charges.
frères Pâris, demeurés proches de madame de Pompadour. Le conflit porte sur les marchés d’approvisionnement des armées ; le royaume est alors engagé dans la guerre de succession d’Autriche. Le trésorier ne voit que le désastre financier et prêche pour le désengagement de la France. Les Pâris font intervenir leur alliée. Orry démissionne, tandis que le frère de la Pompadour, Abel Poisson, devenu marquis de Vandières de Marigny, hérite de son poste de directeur des Bâtiments du roi. Le comte de Maurepas, secrétaire d’État à la Marine, suit Orry sur la route de la disgrâce, en 1749. Si elle défait les ministres, la favorite les fait aussi. Ses protégés, Bernis, Choiseul…, héritent des meilleures charges. Les ambassadeurs étrangers sollicitent des entrevues avec elle et lui adressent des courriers diplomatiques. « Elle tranche, elle décide, elle regarde les ministres comme les siens… », rage le comte d’Argenson, ministre de la Guerre, un ennemi de la marquise dont elle finit par obtenir la disgrâce. Louis XV ne sait plus rien décider sans sa maîtresse ! Ainsi, c’est elle qui, en 1753, le décide d’exiler le Parlement de Paris, dont le régent avait rétabli le « Pouvoir de remontrances » et qui, depuis, s’oppose à lui. Mais, surtout, c’est elle qui le persuade de marier le Dauphin à Marie-Josèphe de Saxe, fille du roi de Pologne. De cette jeune fille qui lui devra tout, la marquise pense se faire une alliée. Cette union vise aussi à réconcilier la France avec la Pologne, après la guerre de succession d’Autriche.
La tentation de la politique
Cinq ans après le début de leur liaison, l’amour charnel qui l’a unie à Louis XV s’est mué en une amitié profonde, qui n’a fait qu’accroître l’ascendant de la Pompadour. C’est alors que l’ancienne favorite réussit son coup de maître : provoquer la plus grande crise diplomatique du xviiie siècle ! Le fameux Renversement des alliances va casser les codes de la diplomatie européenne. Concrétisé par la signature du traité de Versailles, le 1er mai 1756, ce bouleversement rapproche la France de son ennemie de toujours, l’Autriche des Habsbourg ! Et cette alliance se noue contre les alliés d’hier, l’Angleterre, la Prusse, la Turquie. Choix qui jette la France dans la coûteuse et désastreuse guerre de Sept Ans, perdant au passage l’Acadie, le Canada et la Louisiane. L’affection de Louis XV ne faiblit pas. Il la fait même, en 1756, distinction suprême, « Dame du palais de la reine », continuant de l’inonder de cadeaux – dont l’hôtel d’Évreux, l’actuel palais de l’Élysée.
L’amour contre la dépression
Louis XV est-il si faible de caractère pour se laisser influencer ainsi ? Il a, en réalité, une haute opinion de lui-même et de sa fonction. Mais il est neurasthénique et seule la marquise a l’art d’apaiser son tempérament dépressif. Elle le distrait, organise fêtes et spectacles, l’initie au théâtre, développe son goût pour l’architecture et les jardins. Et, par-dessus tout, elle le rassure, lui insuffle la force de supporter la charge du pouvoir. Atteinte de tuberculose, Madame de Pompadour s’éteint à 42 ans. Elle est la seule favorite royale à qui il a été permis de rendre le dernier soupir à Versailles…