La descente aux enfers
Complot mal conduit, trahison… Alors que tous croient le cardinal perdu, la conjuration de Cinq-Mars échoue lamentablement. La vengeance de Richelieu est impitoyable. Le favori est exécuté, son château saccagé, sa famille exilée. Une vraie tragédie à l’antique qui laisse Louis XIII meurtri à jamais.
Deux convois interminables quittent le château de Fontainebleau, en ce 3 février 1642. Dans le premier, Louis XIII, Cinq-Mars et une suite. Dans le second, Richelieu et ses gens. Tous font route vers Perpignan, que le roi veut reprendre aux Espagnols. La nouvelle campagne qu’il s’apprête à mener s’annonce sous les meilleurs auspices. Le Premier ministre devrait se réjouir. Pourtant, il s’inquiète grandement.
Tendresse calculée
Depuis quelque temps, en effet, Louis XIII montre à tous qu’il est très satisfait de Cinq-Mars et la popularité de ce dernier est à son apogée. « Deux cents gentilshommes le suivaient chez le roi… Les femmes se jetaient à sa tête, les ministres étaient à ses ordres », note dans ses Mémoires la princesse Palatine. En réalité, tous croient proche la fin de Richelieu. C’est dans ce climat que le cardinal, malade, se trouve immobilisé à Narbonne. Il fulmine à l’idée de voir le roi voyager seul avec son favori. À raison car Cinq-Mars montre au roi une tendresse inhabituelle. Pur calcul, bien sûr. Louis XIII doit être amadoué. Les conjurés projettent d’assassiner le cardinal lorsqu’ils seront à Lyon. Au dernier moment cependant, Cinq-Mars recule. Le traité avec l’Espagne vient d’être signé : à l’assassinat, il préfère un coup d’État.
Louis XIII se rapproche alors de Richelieu. « Quelques faux bruits qu’on fasse courir, je vous aime plus que jamais », s’enflamme le monarque.
Fin de partie
Les semaines passent. Le printemps venu, Louis XIII affiche un désamour soudain pour CinqMars. « Il y a six mois que je le vomis !», déclaret-il un jour, devant l’un de ses maréchaux. La raison ? Le favori est retombé dans ses travers. Il se montre odieux avec son protecteur. Heureux des batailles que ses armées remportent, le roi se rapproche alors de Richelieu. « Quelques faux bruits qu’on fasse courir, je vous aime plus que jamais », s’enflamme-t-il dans un courrier daté de début juin 1642. Or, quelques jours plus tard, un étonnant document parvient au cardinal : une copie du traité de paix signé avec l’Espagne ! Si son expéditeur (peut-être Anne d’Autriche) reste un des grands mystères de l’Histoire, la trahison du favori est mise au jour. Le 12 juin, Auguste de Thou est arrêté. Cinq-Mars est retrouvé le lendemain à Narbonne, caché dans une maison.
Morts en série
Après l’arrestation de son « cher ami », Louis XIII reste longuement prostré. Le 15 juin, on lui fait la liste des conjurés. Incrédule, il suggère : « Est-ce qu’on n’a pas mis un nom pour un autre ? » Ayant perdu espoir de sauver Cinq-Mars, il tombe malade de chagrin. À quelque temps de là, un confident lui révèle les mots cruels : « Il traîne », qu’aurait prononcés son bien-aimé pendant une de ses maladies. S’impatientait-il de le voir mort ? Le roi décède huit mois après la décapitation à la hache, le 12 septembre 1642 à Lyon, des comploteurs Cinq-Mars et Thou. Le 4 décembre, Richelieu rendait l’âme lui aussi.