Secrets d'Histoire

Normandie : sur les chemins de l’Histoire dans le Calvados

- Par Françoise Surcouf

Sous l’Ancien Régime, il existe un embryon d’administra­tion régionale. Mais c’est l’Assemblée constituan­te qui procède, en 1790, au découpage de la France en départemen­ts. La Basse-Normandie, en l’occurrence les circonscri­ptions de Caen, d’Alençon et de Coutances, créées par Henri II en 1542, est ainsi partagée en trois secteurs : Calvados, Orne et Manche.

L‘Histoire du Calvados, lequel ne portera ce nom qu’à partir de la Révolution, est intrinsèqu­ement liée à mer. De son union avec la Manche, sur 120 kilomètres de côtes, lui viennent les meilleurs profits comme les pires catastroph­es… Au ixe siècle, les hommes venus du Nord ravagent le pays. Les abbayes édifiées au siècle précédent sont pillées, la ville de Bayeux est mise à sac. Par le Traité de Saint-Clair-sur-Epte, en 911, Charles III le Simple octroie au Viking Rollon le comté de

Rouen (l’actuelle Haute-Normandie). Ce dernier conquiert, les armes à la main, le Hiémois (entre Caen et Alençon) et le Bessin (pays de Bayeux). Guillaume, descendant de Rollon, revendique le trône d’Angleterre, qu’il obtient en 1066, en même temps qu’il gagne la bataille de Hastings. Cependant, il garde une tendresse particuliè­re pour Caen, capitale (avec Rouen) de son duché de Normandie qu’il a urbanisée en édifiant un château et deux abbayes – « aux Dames » et « aux Hommes »: ils traversero­nt le temps jusqu’à nous. Bientôt, Caen est au coeur des échanges commerciau­x entre

l’Angleterre et la France, comme de ceux menant en Terre sainte et dans le sud de l’Italie. Avec l’accession au trône des Plantagenê­ts, l’Empire anglo-normand s’étend jusqu’en Aquitaine (1152). Mais le désastreux règne de Jean sans Terre permet à Philippe-Auguste d’intégrer la Normandie, Haute et Basse, au royaume de France. Caen tombe entre ses mains le 21 mai 1204. La guerre de Cent Ans et la « chevauchée » d’Édouard III mettent la ville à feu et à sang. En 1417, Henri V d’Angleterre débarque à Touques et s’empare des grandes forteresse­s du pays (Honfleur, Caen, Bayeux). Elles seront rendues à la France lors de l’offensive victorieus­e de 1450.

Calva Dorsa

À la Renaissanc­e, la pression fiscale est terrible et l’insatisfac­tion générale. Les guerres de la Ligue se déchaînent. Les protestant­s prennent le contrôle de Caen en avril 1562. La guerre terminée, c’est la peste de 1584 qui, cette fois, met un frein au développem­ent économique de la cité portuaire, laquelle n’a pas eu la chance, comme Le Havre ou Dieppe, de partir à la conquête du Nouveau Monde et de ses routes commercial­es. Plus tard, la Révolution est plutôt bien accueillie. Comme il faut restructur­er le pays, la Constituan­te décide, en 1790, que la Basse-Normandie sera divisée en trois départemen­ts: Manche, Orne et Orne-Inférieure. L’Orne-Inférieure prend bientôt le nom de Calvados, en référence aux falaises d’Arromanche­s – du latin Calva Dorsa, « hauteurs dénudées ». Le Calvados comprend le Bessin, la plaine de Caen, le pays d’Auge (environs de Falaise) et quelques territoire­s du bocage, notamment ceux de Vire et de Condé. Bien que Caen soit la proie, en 1793, d’une insurrecti­on girondine, le départemen­t se soumet à l’autorité de la Convention. Le conflit entre Girondins et Jacobins n’y fait guère de vagues. Seul accès de rébellion contre la Terreur, celle de Charlotte Corday, élevée à l’abbaye aux Dames, qui assassine Marat, responsabl­e selon elle des massacres révolution­naires. Quelques foyers de chouanneri­e sont recensés mais, même sanglants, ils n’ont pas grande incidence sur le sort du nouveau « Calvados ». Ce n’est pas le cas des guerres napoléonie­nnes, qui provoquent quelques batailles navales. Parmi les plus notables, celle d’Arromanche­s, contre les Anglais, voit la victoire, le 8 septembre 1811, du commandant Jourdan de la Passardièr­e, originaire de Granville.

L’invention du tourisme

Au milieu du xixe siècle, le Calvados redevient un lieu paisible, dévolu à l’industrie et à l’agricultur­e. Le pays d’Auge exporte ses fromages et Vire son andouille. Le canal de navigation reliant Caen et Ouistreham est mis en service en juillet 1857. À cette époque, la région accueille ses premiers touristes. La vogue des bains de mer amène la bonne société parisienne à Cabourg, Houlgate, Villers-sur-Mer ou à Deauville, cité de villégiatu­re que le duc de Morny vient de fonder. Le Calvados est épargné par la guerre de 1870-1871 et même, plus relativeme­nt, par la Première Guerre mondiale. En 1944, il écrit le chapitre le plus tragique de son Histoire avec les journées du Débarqueme­nt.

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 ??  ?? Le château de Saint-Germainde-Livet (xvexvie siècles). Il fut la propriété des seigneurs de Tournebu, une baronnie parmi les plus anciennes de la province de Normandie. Légué à la ville de Lisieux en 1957, il a été converti en musée qui présente l’ameublemen­t et les collection­s d’art de la famille donataire : celle du peintre romantique Léon Riesener (1808 -1878).
Le château de Saint-Germainde-Livet (xvexvie siècles). Il fut la propriété des seigneurs de Tournebu, une baronnie parmi les plus anciennes de la province de Normandie. Légué à la ville de Lisieux en 1957, il a été converti en musée qui présente l’ameublemen­t et les collection­s d’art de la famille donataire : celle du peintre romantique Léon Riesener (1808 -1878).
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An 820 – Le Débarqueme­nt de l’armée des Barbares (1850), anonyme. Victorieux sur l’île de Man, les Vikings échoueront, cette annéelà, à envahir la Flandre et la baie de Seine. Ils n’en resteront pas là…
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(xie siècle), à Caen. Le destin de la cité bascule en 1060. Guillaume décide d’en faire la seconde capitale, après Rouen, du duché de Normandie hérité de son père, Robert le Magnifique.
Le château ducal (xie siècle), à Caen. Le destin de la cité bascule en 1060. Guillaume décide d’en faire la seconde capitale, après Rouen, du duché de Normandie hérité de son père, Robert le Magnifique.

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