Normandie : sur les chemins de l’Histoire dans le Calvados
Sous l’Ancien Régime, il existe un embryon d’administration régionale. Mais c’est l’Assemblée constituante qui procède, en 1790, au découpage de la France en départements. La Basse-Normandie, en l’occurrence les circonscriptions de Caen, d’Alençon et de Coutances, créées par Henri II en 1542, est ainsi partagée en trois secteurs : Calvados, Orne et Manche.
L‘Histoire du Calvados, lequel ne portera ce nom qu’à partir de la Révolution, est intrinsèquement liée à mer. De son union avec la Manche, sur 120 kilomètres de côtes, lui viennent les meilleurs profits comme les pires catastrophes… Au ixe siècle, les hommes venus du Nord ravagent le pays. Les abbayes édifiées au siècle précédent sont pillées, la ville de Bayeux est mise à sac. Par le Traité de Saint-Clair-sur-Epte, en 911, Charles III le Simple octroie au Viking Rollon le comté de
Rouen (l’actuelle Haute-Normandie). Ce dernier conquiert, les armes à la main, le Hiémois (entre Caen et Alençon) et le Bessin (pays de Bayeux). Guillaume, descendant de Rollon, revendique le trône d’Angleterre, qu’il obtient en 1066, en même temps qu’il gagne la bataille de Hastings. Cependant, il garde une tendresse particulière pour Caen, capitale (avec Rouen) de son duché de Normandie qu’il a urbanisée en édifiant un château et deux abbayes – « aux Dames » et « aux Hommes »: ils traverseront le temps jusqu’à nous. Bientôt, Caen est au coeur des échanges commerciaux entre
l’Angleterre et la France, comme de ceux menant en Terre sainte et dans le sud de l’Italie. Avec l’accession au trône des Plantagenêts, l’Empire anglo-normand s’étend jusqu’en Aquitaine (1152). Mais le désastreux règne de Jean sans Terre permet à Philippe-Auguste d’intégrer la Normandie, Haute et Basse, au royaume de France. Caen tombe entre ses mains le 21 mai 1204. La guerre de Cent Ans et la « chevauchée » d’Édouard III mettent la ville à feu et à sang. En 1417, Henri V d’Angleterre débarque à Touques et s’empare des grandes forteresses du pays (Honfleur, Caen, Bayeux). Elles seront rendues à la France lors de l’offensive victorieuse de 1450.
Calva Dorsa
À la Renaissance, la pression fiscale est terrible et l’insatisfaction générale. Les guerres de la Ligue se déchaînent. Les protestants prennent le contrôle de Caen en avril 1562. La guerre terminée, c’est la peste de 1584 qui, cette fois, met un frein au développement économique de la cité portuaire, laquelle n’a pas eu la chance, comme Le Havre ou Dieppe, de partir à la conquête du Nouveau Monde et de ses routes commerciales. Plus tard, la Révolution est plutôt bien accueillie. Comme il faut restructurer le pays, la Constituante décide, en 1790, que la Basse-Normandie sera divisée en trois départements: Manche, Orne et Orne-Inférieure. L’Orne-Inférieure prend bientôt le nom de Calvados, en référence aux falaises d’Arromanches – du latin Calva Dorsa, « hauteurs dénudées ». Le Calvados comprend le Bessin, la plaine de Caen, le pays d’Auge (environs de Falaise) et quelques territoires du bocage, notamment ceux de Vire et de Condé. Bien que Caen soit la proie, en 1793, d’une insurrection girondine, le département se soumet à l’autorité de la Convention. Le conflit entre Girondins et Jacobins n’y fait guère de vagues. Seul accès de rébellion contre la Terreur, celle de Charlotte Corday, élevée à l’abbaye aux Dames, qui assassine Marat, responsable selon elle des massacres révolutionnaires. Quelques foyers de chouannerie sont recensés mais, même sanglants, ils n’ont pas grande incidence sur le sort du nouveau « Calvados ». Ce n’est pas le cas des guerres napoléoniennes, qui provoquent quelques batailles navales. Parmi les plus notables, celle d’Arromanches, contre les Anglais, voit la victoire, le 8 septembre 1811, du commandant Jourdan de la Passardière, originaire de Granville.
L’invention du tourisme
Au milieu du xixe siècle, le Calvados redevient un lieu paisible, dévolu à l’industrie et à l’agriculture. Le pays d’Auge exporte ses fromages et Vire son andouille. Le canal de navigation reliant Caen et Ouistreham est mis en service en juillet 1857. À cette époque, la région accueille ses premiers touristes. La vogue des bains de mer amène la bonne société parisienne à Cabourg, Houlgate, Villers-sur-Mer ou à Deauville, cité de villégiature que le duc de Morny vient de fonder. Le Calvados est épargné par la guerre de 1870-1871 et même, plus relativement, par la Première Guerre mondiale. En 1944, il écrit le chapitre le plus tragique de son Histoire avec les journées du Débarquement.