Marie Stuart, reine d’Écosse
La vie… ce n’est pas toujours du cinéma. Les films prennent parfois leurs aises, volontairement ou non, avec la réalité. Erreurs historiques, anachronismes, trucages font partie du jeu cinématographique. Saurez-vous démêler la fiction de la réalité dans le film Marie Stuart, reine d’Écosse, de Josie Rourke ?
Par Coline Bouvart
Reine d’Écosse et prétendante au trône d’Angleterre, Marie Stuart se heurte à sa cousine, Élisabeth Ire. La réalisatrice Josie Rourke concentre son récit sur sa vie en Écosse, après son retour de France. Le film dissèque la rivalité de deux reines aux destins inextricablement liés, certaines l’une et l’autre de leur légitimité et profondément attachées à leur devoir. Entourées de conseillers prompts à attiser les tensions entre elles ou à tirer profit de guerres civiles entre catholiques et protestants, elles tentent de conquérir leur indépendance. Pour cela, l’une utilise le mariage et la conception d’un héritier, l’autre choisit le célibat et un pouvoir sans partage. Un affrontement dont l’issue ne peut être que tragique.
Le mariage avec Lord Darnley
FICTION ET RÉALITÉ
Le remariage de Marie Stuart est d’une importance capitale pour la cour d’Angleterre. Élisabeth Ire suit l’affaire de près, et le jeu de dupes entre sa cousine et elle (« Épouse un prétendant qui me sied et je te reconnais comme mon héritière » ; « Non, reconnais-moi comme ton héritière et j’épouserai celui que tu voudras ») est authentique. Tout comme Élisabeth Ire propose bel et bien son propre amant, Lord Dudley, comme prétendant. Mais l’Écossaise se prend d’une folle passion pour Lord Darnley. Ce mariage est en effet malheureux, Darnley se révélant alcoolique, capricieux et jaloux. Cependant, son homosexualité n’est pas attestée, pas plus que sa relation avec David Rizzio, le secrétaire de son épouse.
La non-implication de Marie Stuart dans l’assassinat de Lord Darnley
FICTION ET RÉALITÉ
La relation entre les époux atteint un point de non-retour avec la responsabilité de Darnley dans la mort de David Rizzio. Comme dans le film, les conjurés surgissent dans les appartements de Marie Stuart, au palais de Holyrood, pour
massacrer son favori. Rizzio se cache derrière la reine qui tente de le protéger. En vain : il est lardé de coups de couteau et d’épée. Dans le film, cette énième trahison de Darnley décide son épouse à l’écarter du pouvoir mais elle repousse la recommandation de ses conseillers qui veulent l’éliminer une fois pour toutes. Dans la réalité, son jeu est plus trouble. Il semble qu’elle attire son mari pour le livrer à ses assassins ou, du moins, qu’elle ne l’informe pas du danger. Comme dans le film, Darnley est retrouvé mort étranglé dans un parc, après l’explosion d’un bâtiment, non loin du palais.
Le remariage avec Lord Bothwell
RÉALITÉ
Darnley meurt le 10 février 1567. Peu après, Marie Stuart épouse Lord Bothwell. Cette liaison, comme en témoignent certains écrits de la reine, aurait effectivement débuté dans la contrainte. Bothwell l’aurait enlevée et abusé d’elle. Quoi qu’il en soit, par la suite, elle conçoit pour lui un amour passionné. Ce remariage provoque une guerre civile et coûte son trône à Marie Stuart, accusée d’avoir fait tuer Darnley pour épouser son amant. En juillet 1567, elle abdique en faveur de son fils Jacques.
La mort de Marie Stuart
RÉALITÉ
La plupart des détails montrés au moment ultime sont vrais : la robe noire, la tenue écarlate en dessous, le courage de la condamnée, l’exécution à la hache – on lui a refusé l’épée. Marie Stuart, qui veut mourir en martyre catholique, porte chapelets et crucifix. Cependant, raconte Stefan Zweig dans la biographie qu’il lui a consacrée, un pasteur réformé tente de couvrir ses prières par un sermon. Dernier détail que le film nous épargne : le bourreau doit s’y reprendre trois fois avant de parvenir à détacher la tête du corps…
Le maquillage d’Élisabeth Ire
RÉALITÉ
Élisabeth Ire paraît de plus en plus fardée, le visage recouvert d’un plâtre épais. À l’époque, en effet, la mode est aux peaux très blanches et on exige que les femmes affichent une éternelle jeunesse. Cet impératif est d’autant plus grand pour une reine célibataire qui ne doit révéler aucun signe de faiblesse. Ni de vieillesse. Élisabeth Ire emploie de la céruse, une poudre à base de plomb, pour éclaircir un teint légèrement mat (hérité de sa mère Anne Boleyn) et camoufler les cicatrices de la variole. Sa perruque rousse lui sert à affirmer sa filiation avec son père Henri VIII, alors que sa naissance est entachée de soupçons de bâtardise.