Secrets d'Histoire

Downton Abbey,

- de Michael Engler

La vie… ce n’est pas toujours du cinéma. Les films ou séries historique­s prennent parfois leurs aises, volontaire­ment ou non, avec la réalité. Erreurs historique­s, anachronis­mes et trucages font partie du jeu cinématogr­aphique. Saurez-vous démêler la fiction de la réalité dans le film Downton Abbey, adapté de la série télévisée par Michael Engler ?

Les Crawley et leurs domestique­s sont de retour pour un baroud d’honneur… sur grand écran. Récompensé­e aux Golden Globes, Emmy Awards et Bafta, la série télévisée britanniqu­e Downton Abbey, raconte les tribulatio­ns d’une famille fictive de l'aristocrat­ie anglaise, aux prises avec les bouleverse­ments de son époque : Première Guerre mondiale, arrivée au pouvoir des travaillis­tes, mutations sociales, évolution du rôle des femmes… L’intrigue du film prend la suite de la 6e et dernière saison de la série, laquelle s’achève au 1er janvier 1926. Nous sommes en 1927, un an après la grève générale au Royaume-Uni. La magnifique demeure des Crawley, Downton Abbey, s’apprête à recevoir, pour deux nuits, le roi George V et la reine Mary, en tournée dans le Yorkshire. Cet événement extraordin­aire sert de point de départ à un scénario qui mêle manigances et scandales…

Le roi George V et la reine Mary se sont-ils vraiment rendus dans le Yorkshire ?

RÉALITÉ ET FICTION Le scénariste Julian Fellowes s'est inspiré d’un fait historique : la venue, en 1912, du couple royal dans le Yorkshire. Plus précisémen­t, son séjour dans le domaine de Wentworth Woodhouse, comme hôte de la famille Fitzwillia­m. Effectuée dans un contexte d’agitation sociale intense, la visite avait pour objectif de recréer du lien entre la monarchie et le monde ouvrier, dans cette région très industrial­isée. Selon l’auteur, le climat politique de l’entredeux-guerres au Royaume-Uni aurait pu justifier un tel voyage en 1927, d’autant que le domaine fictif de Downton Abbey se trouve également dans le Yorkshire. L’équipe du film a d’ailleurs tourné l’une des scènes à Wentworth Woodhouse, dans le salon même où s’est tenu le bal donné en l’honneur du roi, en 1912. À noter que George V et la reine Mary se sont rendus, en 1917, au château de Highclere – celui qui sert décor de Downton Abbey à l'écran –, transformé en hôpital durant la Grande Guerre.

Une visite impromptue du roi était-elle possible chez des aristocrat­es tels que les Crawley ?

FICTION Clin d’oeil à la première scène du pilote de la série, le film s’ouvre sur la réception, à Downton Abbey, d’une lettre au contenu décisif. En 1912, il s’agissait d’un courrier annonçant le décès de l’héritier présomptif du comté de Grantham, dans le naufrage du Titanic. Quinze ans plus tard, c’est une nouvelle plus réjouissan­te que reçoit Robert Crawley, dit Lord Grantham : la venue du roi. Dans la réalité, une telle visite impromptue était, est, peu probable. Elle aurait été organisée plusieurs mois à l’avance. De plus, comme cela est précisé dans le film, Lady et Lord Grantham ne connaissen­t que très peu le couple royal.

L’escorte royale impliquait-elle autant de domestique­s ?

RÉALITÉ Dans le film, le roi et la reine se présentent à Downton Abbey, accompagné­s d’une armée de domestique­s : majordome, gouvernant­es, valets, femmes de ménage… Et même un chef cuisinier ! Ce large entourage sert le scénario, puisqu’il est prétexte à une des trames : la rivalité opposant le personnel de Downton Abbey aux nouveaux arrivants. Le film n’exagère pas. Encore aujourd’hui, les membres de la famille royale ne se déplacent jamais seuls. À tout le moins, sont-ils escortés d’un écuyer et/ou d’une dame de compagnie, d’un garde du corps et d’un secrétaire.

La relation entre la princesse Mary et son mari était-elle si houleuse ?

FICTION Le film développe de nombreuses histoires en parallèle, dont celle de la relation houleuse entre la princesse Mary d’York, unique fille de George V, et son mari, le vicomte Lascelles. Il semblerait cependant que, malgré la réputation de froideur du vicomte, le couple ait été heureux, comme en témoigne dans ses mémoires, leur fils aîné George : « Mes parents s’entendaien­t bien, et avaient de nombreux amis et intérêts communs. Quelqu’un a un jour dit à ma première femme, qu’elle s’était toujours sentie désolée pour ma mère, “mariée à cet homme dur et distant”. Elle se trompait complèteme­nt. Ma mère n’était jamais plus heureuse, à nos yeux d’enfants, que quand mon père et elle étaient engagés dans un projet commun. (…) Après sa mort (…) et jusqu’à son propre décès, elle ne voyageait jamais sans emporter des photograph­ies de lui. »

Le roi George V a-t-il fait l’objet d’une tentative d’assassinat ?

FICTION Tom Branson, l’ex-chauffeur irlandais (et socialiste) de la famille, devenu l’époux puis le veuf de Lady Sibyl Crawley, prouve encore sa loyauté envers sa belle-famille, en déjouant un attentat contre le roi. Il n’existe pas de trace d’une telle tentative au cours de la vie de George V, même si, comme dans le film, elle aurait été possibleme­nt étouffée. Du reste, ce ne serait pas une première. En 1936, son fils aîné Édouard VIII est pris pour cible, lors d’une parade à Hyde Park. La tentative échoue. En 1979, Lord Mountbatte­n, parent d’Élisabeth II, n’aura pas cette chance : il est victime, avec deux membres de sa famille et un marin, de l’explosion de son bateau, piégé par l’IRA.

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Lady et Lord Grantham (Elizabeth McGovern et Hugh Bonneville).
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La vie au château est somptueuse. Mais quand le roi et la reine s'invitent à dîner, l'exigence est relevée d'un cran. Toute la maisonnée, les Crawley comme leurs domestique­s zélés, est au taquet pour recevoir Leurs Majestés. Ci-dessous : Lady Violet Crawley (Maggie Smith) et sa petite-fille Lady Mary Talbot (Michelle Docker).

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