Secrets d'Histoire

Portrait de Marie de Médicis, d'Anton van Dyck

- (par Anton van Dyck ) Par Dominique Roger

Au xviie siècle, les peintres excellent dans l’art des tableaux d’apparat des reines et des rois, qu’ils représente­nt « en majesté ». Ce portrait en pied de Marie de Médicis, réalisé en 1631 par l’artiste flamand Anton van Dyck, est d’autant plus émouvant qu’il figure une reine déchue, très digne malgré les affres d’un exil qui lui sera fatal.

L’année 1631 est une année noire pour Marie de Médicis. Celle qui, veuve d’Henri IV, a été une régente redoutée, qui s’est créé de puissantes inimitiés, voire de profondes haines, n’est plus rien. Les rapports destructeu­rs qu’elle entretient avec son fils Louis XIII vont gangréner sa vie. Sur le trône depuis 1617, suite à un coup de force, Louis XIII se débarrasse d’une reine mère bien encombrant­e en l’exilant au château de Blois. Elle s’y évade d’une manière des plus rocamboles­ques dans la nuit du 21 au 22 février 1619. Après un habile retour en politique, elle se retrouve bientôt en opposition au cardinal de Richelieu, qu’elle a pourtant introduit auprès de son roi de fils. Le 10 novembre 1630, lors d’un événement resté connu sous le nom de « journée des Dupes », Marie de Médicis exige la destitutio­n du ministre Richelieu. Elle va tout perdre. Contre toute attente, Louis XIII favorise Richelieu au détriment de sa mère. Il prononce alors cette phrase terrible: « Je suis plus attaché à mon État qu’à ma mère » ! À 56 ans, dépossédée de tous ses titres, ne touchant plus aucune pension, Marie de Médicis erre en Europe, dans les pays ennemis de la couronne; elle finit par se réfugier aux Pays-Bas espagnols, dans la ville d’Anvers. Active mécène lorsqu’elle était au pouvoir, elle a noué des relations amicales avec nombre de peintres flamands, dont Pierre Paul Rubens. Il lui fait rencontrer l’un de ses meilleurs élèves, ayant même acquis une immense réputation, Anton van Dyck. Ce dernier exécute, sur commande de Marie de Médicis, ce portrait dans une mise en scène inédite de la grandeur et de la dignité d’une reine déchue.

1 – SIGNE EXTÉRIEUR DE TRISTESSE

La veuve d’Henri IV porte une robe de soie noire montante, très couvrante et sans reflets, ornée d’une collerette blanche. Le vêtement de deuil symbolise le reflet du chagrin le plus intime, mais aussi de la douleur collective de la famille. C’est également l’expression du rang social auquel on appartient et du niveau de respectabi­lité qui lui revient.

2 – UNE COURONNE TERNIE

Reine de France et de Navarre, Marie de Médicis l’a été de 1600 à 1610 par son union avec Henri IV. C’est avec une immense fierté qu’elle a coiffé la couronne, comme le montre le tableau de Frans Pourbus, dit le Jeune, peint vers 1609-1610, Marie de Médicis (15731642), reine de France depuis 1600. L’attribut royal, s’il rappelle son rang, n’est plus qu’un lointain souvenir, relégué ici dans un coin sombre de la toile.

3 – S’IL N’EN RESTE QU’UN…

Aussi petitement et discrèteme­nt représenté soit-il, le chien couché aux pieds de Marie de Médicis est un élément important de la toile. Il s’agit d’un épagneul nain continenta­l, race familière des cours royales françaises (en Angleterre, les souverains lui préfèrent bien évidemment le King Charles). Symbole de fidélité, tant au roi que sur le plan conjugal, cet animal lui aurait été offert par l’infante Isabelle. Mais il est peu probable que ce soit le même chien qui figure sur la toile illustrant la naissance de Louis XIII.

4 – ANVERS ET CONTRE TOUT

La reine pose devant la ville d’Anvers, où elle a séjourné à la fin de l’année 1631. On reconnaît, derrière elle, le château fort du Steen (xie-xve siècles), les rives de l’Escaut et la tour-clocher de NotreDame d’Anvers, la plus grande cathédrale gothique des Pays-Bas.

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