Brunehaut, la régente réformatrice
Née princesse espagnole, elle devient la plus grande reine mérovingienne, en s’imposant comme la régente au nom de son fils et de celui de ses petits-fils. Brunehaut impulse des réformes juridiques favorables à l’amélioration de la condition féminine. La haine d’une autre femme, la reine Frédégonde, causera finalement la perte de celle qui a dominé tant de rois.
Brunehaut (543-613), fille du roi des Wisigoths d’Espagne Athanagild, se convertit au catholicisme pour épouser Sigebert Ier, petit-fils de Clovis. Le roi d’Austrasie (nord-est de la France) s’enorgueillit d’avoir convolé avec une vraie princesse, alors qu’il méprise ses belles-soeurs. Les quatre frères se partagent alors les anciennes provinces de la Gaule romaine, passées sous le contrôle des peuples germaniques. Estimée de son mari et fière de son ascendance, Brunehaut prend sa fonction de reine d’Austrasie très au sérieux. Chilpéric Ier, roi de Neustrie (nord-ouest de la France), suit l’exemple de son frère et épouse en secondes noces Galswinthe, la soeur de Brunehaut. Tous les éléments semblent réunis pour assurer une saine collaboration entre les deux royaumes… Une vengeance privée Mais un matin, Brunehaut apprend que sa soeur a été étranglée dans son lit, et que Chilpéric Ier s’apprête à épouser une intrigante, fille de serfs, Frédégonde. L’honneur d’une princesse ne peut se laver que dans le sang. La reine exige de son époux une « faide », une vengeance privée issue de la tradition germanique. Sigebert Ier voit là, un moyen d’étendre ses territoires. Une guerre fratricide commence en 570, alors que Brunehaut récupère le douaire de Galswinthe, composé de
quelques cités en Aquitaine. Après plusieurs victoires mettant en péril la Neustrie, Sigebert Ier est assassiné par des émissaires de Frédégonde ; Brunehaut, elle, est faite prisonnière. Leur fils, Childebert, mis en sécurité par la noblesse d’Austrasie, ceint la couronne de son père, avec le soutien de son oncle Gontran.
Trahison et tortures
En 576, coup de théâtre! Mérovée, le fils aîné de Chilpéric Ier, épouse Brunehaut. Ont-ils été liés par la volonté de s’affranchir de l’autorité du roi de Neustrie? Brunehaut a-t-elle séduit un homme trop faible pour s’opposer seul à son père et à sa marâtre Frédégonde? Le mystère demeure, mais Mérovée paye cher sa trahison. L’année suivante, il est assassiné sur ordre de son propre père. Brunehaut a profité de ces événements, pour rejoindre Childebert dans sa capitale de Metz. Là, elle constate que son fils est une marionnette actionnée par les conseillers de la Cour. Lesquels lui rétorquent qu’une femme n’a rien à faire au sommet du pouvoir et la menacent même de mort sous couvert d’acerbes plaisanteries… En 585, Childebert âgé de 15 ans est reconnu majeur, et Brunehaut prend la place des conseillers, en douceur mais avec fermeté. La mort prématurée de Childebert, en 596, propulse la reine dans la position de régente. Elle gère les intérêts de ses petits-fils, Thierry roi de Burgondie et Thibert roi d’Austrasie. Elle préserve la couronne de ce dernier, en luttant contre les attaques de Frédégonde, qui défend les intérêts de son fils Clotaire II. Mais elle doit se réfugier chez Thierry, après s’être heurtée à l’hostilité des aristocrates austrasiens. Désormais âgée, Brunehaut voit, impuissante, ses deux petits-fils se battre pour s’approprier le territoire de l’autre. À la mort de Thierry, elle devient la régente pour son arrièrepetit-fils Sigebert II… Clotaire II, roi de Neustrie, parvient enfin à mettre la vieille femme à genoux, en prenant par le fer les terres des descendants de Sigebert. À 70 ans, Brunehaut est torturée trois jours durant. Pour finir, son corps, attaché à un cheval et traîné, est disloqué. Ses restes sont brûlés. Elle connaît une fin infamante, après n’avoir vécu que pour le pouvoir. Elle reste la plus grande politicienne de son temps.