PHILIPPE JOSSERAND : « JACQUES DE MOLAY DEVINE QUE LA MENACE VIENT DU ROI DE FRANCE »
Qui était Jacques de Molay ?
Il est né à la fin des années 1240 dans une partie de l’archevêché de Besançon qui dépendait du Saint-Empire germanique, mais était de culture française. Jeune chevalier, il rejoint l’ordre du Temple en 1265 à Beaune puis fait carrière en Orient. Il reste relativement dans l’ombre, apparemment désarçonné par les alliances avec les musulmans et la « realpolitik » du grand maître de l’époque, Guillaume de Beaujeu. Il émerge après la chute de SaintJean-d’Acre: sa volonté de réforme et son désir de relancer la croisade rallient les suffrages et il est élu grand maître en 1292. À travers ses lettres, on sent un homme résolu, disposant d’un bon réseau, un peu rigide. Et pas toujours très diplomate.
Quelles étaient ses relations avec Philippe le Bel ?
Au début pas si mauvaises. Ils se rencontrent une première fois en 1296 alors que Jacques de Molay est venu plaider la cause de la croisade auprès des souverains occidentaux. Philippe le Bel lui aurait alors demandé d’être le parrain de son dernierné. Le roi essaie même de protéger l’Ordre autant que possible. Il n’y a pas d’hostilité entre eux avant 1306.
Que se passe-t-il alors ?
Lors de son retour en Europe en 1306 à l’appel du pape, Jacques de Molay est saisi par les rumeurs qui circulent sur son Ordre, et comprend qu’elles sont instrumentalisées par le pouvoir capétien. Il sent le danger et fait la navette entre le pape à Poitiers et le roi de France à Paris. Il devine que la menace vient de Philippe le Bel en personne, qui a l’air d’y prêter foi. Jacques de Molay essaie de temporiser, demande une enquête au pape. Mais s’il sait qu’un danger plane, il ne mesure pas son imminence ni sa puissance.