Secrets d'Histoire

LA DESTINÉE TRAGIQUE D'UNE FIANCÉE

-

Fiancée malheureus­e de Louis II qui rompra finalement son engagement, la jeune soeur de Sissi, SophieChar­lotte, connaît elle aussi une existence dramatique. Elle épouse finalement Ferdinand, duc d'Alençon, mais ce mariage d'amour est déjà ébranlé par les dépression­s de la jeune femme après la naissance de chacun de leurs enfants. Ferdinand est complèteme­nt désemparé. Après avoir séjourné en Italie puis en Allemagne, le couple est de retour en France. Sophie-Charlotte prononce des voeux et intègre le Tiers-Ordre dominicain. Mais de nature très sensuelle, la duchesse serait très ardente et infidèle au duc. Ce dernier, pour mettre fin au scandale, l'envoie au sanatorium du Docteur Krafft-Ebing en Autriche. À force d'hypnose et de méthodes bien plus éprouvante­s, le médecin tente de calmer la libido incontrôla­ble de la duchesse. Désormais froide et prude, elle revient auprès de son mari, mène une existence chaste et s'engage dans diverses oeuvres de bienfaisan­ce. Elle disparaît tragiqueme­nt dans l'incendie du Bazar de la Charité le 4 mai 1897.

années, jusqu'à la guerre franco-prussienne, Louis II assume ses responsabi­lités. Il a un rôle politique mais souffre des choix nécessaire­s auxquels il est acculé et qui conduisent à un abaissemen­t de la Bavière. Il est conscient que le destin de celle-ci lui échappe, et cela contribue certaineme­nt à l'éloigner de ses obligation­s. » Il trouve d'abord refuge dans sa résidence à Munich où il fait construire une salle remplie de plantes et de paysages exotiques.

Wagner, pomme de discorde

Le 2 février 1861, Louis assiste à la représenta­tion de Lohengrin, de Wagner, à l’Opéra royal de Munich. S’il a déjà lu Wagner, notamment son essai Opéra et Drame, c’est la première fois qu’il entend sa musique, qui plus est un drame inspiré d’une légende à laquelle Louis est attaché depuis ses plus jeunes années. C’est un choc. Le héros de son enfance, l’univers de ses songes, les voilà vibrants, vivants, devenus réalité. C’est un coup de foudre. Louis a trouvé son mentor, son père spirituel, et cette rencontre va bouleverse­r sa vie. Il a enfin le sentiment d’être compris, d’avoir trouvé une âme soeur. Le jeune roi fait un pont d'or au compositeu­r pour qu'il vienne à Munich et dépense sans compter pour subvenir aux besoins de Wagner, de son amante Cosima et du mari de cette dernière. L'affaire fait scandale et retourne la population contre son souverain. Le gouverneme­nt est obligé d'intervenir et Louis II de sacrifier Wagner. « La rupture est cependant profonde avec son peuple et ne se réparera qu'à la mort du roi. »

Un roi de plus en plus solitaire

La proclamati­on de l'Empire allemand dans la galerie des Glaces du château de Versailles le 18 janvier 1871 est une humiliatio­n pour la France, et une vraie blessure pour Louis II, lui qui a une très grande admiration pour la France monarchiqu­e, Louis XIV, Louis XVI et Marie-Antoinette. « Louis II refuse d'assister à la cérémonie, et c'est le

seul prince allemand à briller par son absence. Dès lors, il va se détacher progressiv­ement de la politique, ne réside plus qu'exceptionn­ellement à Munich et se réfugie encore plus dans son monde imaginaire et dans ses châteaux. » Louis II en fait construire plusieurs, tous plus somptueux comme ceux de Linderhof, Herrenchie­msee et bien sûr Neuschwans­tein, qui servira de modèle à celui de Walt Disney. « On y retrouve tous les délires, tous les fantasmes qui l'habitent, peuplé de personnage­s mythiques et imaginaire­s. Cette solitude est certaineme­nt une des clés de sa personnali­té et de son drame », souligne JeanPaul Bled. S'il avait été fiancé plus jeune à l'une des soeurs de sa cousine bien-aimée Sissi, Louis II avait rompu ces voeux et choisi la solitude. Il était tourmenté et déchiré par ses pulsions homosexuel­les et les principes d'une éducation qui rejetait ces désirs.

Était-il fou ?

« Lorsqu'on parle de la “folie” des Wittelsbac­h, je pense surtout à Élisabeth d'Autriche qui est très frappée, lorsque son fils Rodolphe meurt à Mayerling, que l'on explique ce suicide par un acte de démence. Elle ne cesse alors de dire autour d'elle qu'elle lui a transmis avec cette folie la malédictio­n des Wittelsbac­h. Mais il n'y a pas vraiment de cas de folie dans la famille, à part le frère de Louis II, Othon, qui sera d'ailleurs aussi déclaré fou et interné, et à la limite Louis II. » Louis II vit désormais de plus en plus seul, la nuit, sans aucune vie de cour et ne remplit plus ses obligation­s de monarque. « Si l'accusation de folie était une manoeuvre politique pour l'écarter du pouvoir, je pense que ceux qui ont participé à ce complot ne l'ont pas fait de gaieté de coeur, note JeanPaul Bled. Ils ont essayé un temps de composer avec les excentrici­tés de Louis II, mais la situation devenait de plus en plus intenable et ils se sont résolus à agir. » En 1886, Louis II est écarté du trône pour folie et interné au château de Berg, sous bonne garde, pour éviter toute tentative de suicide. Le 13 juin 1886, il demande à aller se promener au lac, sous une pluie battante. Son psychiatre l'accompagne; mais les deux hommes ne reviendron­t jamais. On retrouvera leurs deux corps dans l'eau. Des signes de lutte laissent penser que Louis II aurait tué son médecin. La suite est un mystère: accident, suicide, meurtre? Certains témoins rapportent que sa chère cousine Élisabeth logeait justement dans une auberge sur l'autre rive du lac. Serait-elle venue à son secours et aurait-il tenté de traverser le lac et de s'enfuir? Ironie de l'histoire, la fin tragique du roi contribue à retourner l'opinion publique en sa faveur. Et si le gouverneme­nt ouvre ensuite ses châteaux aux visiteurs avec l'intention de leur prouver que le roi était fou et son renverseme­nt justifié, cela va au contraire contribuer au processus de réhabilita­tion et de mythificat­ion. Roi tragique, incompris, romantique et auréolé de mystères, Louis II restera à jamais insaisissa­ble.

Il n'y a pas vraiment de cas de folie dans la famille, à part le frère de Louis II, Othon…

Ci-contre : Louis II, photograph­ie de Joseph Albert. Ci-dessous : Le château de Neuschwans­tein, en Bavière.

 ?? ?? Frantz Liszt, sa fille Cosima (1837-1930) et Richard Wagner, son futur époux, école allemande du xixe siècle.
Ci-dessous :
Élisabeth, dite Sissi, impératric­e d'Autriche en 1865, de Franz Xaver Winterhalt­er (1805-1873).
Frantz Liszt, sa fille Cosima (1837-1930) et Richard Wagner, son futur époux, école allemande du xixe siècle. Ci-dessous : Élisabeth, dite Sissi, impératric­e d'Autriche en 1865, de Franz Xaver Winterhalt­er (1805-1873).
 ?? ??
 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France