STRASBOURG, LE RENOUVEAU ALLEMAND
À l’issue de la guerre de 1870, la France cède une partie de son territoire, l’Alsace-Lorraine, à l’Empire allemand, et Strasbourg devient capitale du nouveau Reichsland. La création de la Neue Reichstadt, une véritable seconde ville, va en faire une des plus grandes cités impériales.
« À la période impériale, Strasbourg, qui était restée une ville médiévale enfermée dans son enceinte, voit sa population multipliée par trois et entre dans la modernité, avec la construction d’une nouvelle gare, de Bains municipaux, de piscines, l’amélioration de l’hygiène, la création d’égouts et l’installation de gaz dans les immeubles », souligne Robert Betscha, professeur d’histoire à Strasbourg.
« L’ÉTABLE POUR ÉLÉPHANTS »
Pièce maîtresse – mais tout aussi décriée de la Neue Reichstadt, le palais impérial et ses écuries : le nouvel empereur, Guillaume II, les inaugure en grande pompe en 1889, et déclare « qu’il est heureux d’être chez lui à Strasbourg ». Le palais a coûté trois millions de marks or et des rumeurs circulent rapidement: l’empereur n’aimerait pas vraiment le palais, et l’aurait même surnommé « l’étable pour éléphants »! Devenu symbolique de la période allemande, le palais impérial verra défiler devant ses fenêtres les troupes françaises du général Gouraud en 1918. Renommé palais du Rhin, on songe même à le détruire après la Seconde Guerre mondiale, mais il est finalement classé monument historique.
DES ÉQUIPEMENTS MODERNES
Construite juste après la guerre de 1870, la nouvelle gare de Strasbourg a été imaginée par l’architecte Johann Eduard-Jacobsthal dans un style néo-Renaissance. Trois salons privés avaient été aménagés pour l’empereur et son épouse, et ont conservé leur mobilier, luminaires et décorations d’origine. Les Bains municipaux, boulevard de la Victoire, sont également un témoin époustouflant de l’époque impériale. Construits entre 1905 et 1908 dans un style néobaroque mâtiné de touches Art nouveau, ils comportent des bains romains évoquant les thermes antiques (salles chaudes et froides, sèches et humides), des piscines, et un sauna-hammam. Leur architecture extrêmement élégante et même luxueuse en fait l’un des beaux établissements du genre en France. Autre étape de la
Nouvelle Strasbourg, la Grande Poste. Cet immense bâtiment, construit entre 1896 et 1899 dans un style néogothique, était orné des statues de Frédéric Ier Barberousse, de Maximilien Ier, Rodolphe de Habsbourg, Guillaume Ier, Frédéric III et Guillaume II, comme un symbole de la continuité entre le Saint Empire germanique et le IIe Reich proclamé en 1871. Elles sont détruites après la Première Guerre mondiale. Une partie de la Poste est bombardée en 1944, et elle est devenue depuis quelques années une résidence de luxe.
LE STRASBOURG DE LA CONNAISSANCE
Longtemps considéré « comme le plus beau bâtiment civil du Nouveau Strasbourg d’après 1880 » (Strasbourg secret, de Bernard Vogler, Élisabeth Loeb-Darcagne, éd. Les Beaux Jours), l’édifice de la Gallia, le long des quais de l’Ill, a été bâti pour les assurances Germania. Alternant brique et pierre de taille, il a perdu son pignon principal lors de la Seconde Guerre mondiale, mais conserve une allure certaine et abrite désormais une résidence universitaire, et le plus ancien restaurant universitaire français. À voir également, le musée zoologique de style néo-Renaissance, construit en 1888. Ses remarquables collections sont en partie héritées du cabinet d’histoire naturelle de Jean Hermann (1738-1800), un savant et botaniste strasbourgeois qui avait fréquenté les plus grands esprits et scientifiques du temps. Son cabinet fait d’ailleurs l’objet d’une reconstitution.