1967-1980 BOULEVARD DU CRÉPUSCULE
En 1967, le scandale éclate. Des lettres écrites par la princesse Margaret à Robin DouglasHome, qui ne laissent aucun doute sur la nature de leurs relations, sont vendues aux enchères à New York, et leur contenu rendu public. Rien ne va plus à Kensington Palace.
Des disputes homériques, du verre brisé, des réconciliations sur l’oreiller… Margaret et Tony rejouent à la mode anglaise le couple mythique du cinéma Taylor-Burton. S’il y a encore de l’attachement dans le couple princier, il ne suffira pas à sauver le bateau qui coule. Les époux tentent de se tenir à la règle qu’ils ont établie: unis en public, ils vivent séparés dans le privé. Seul l’amour pour leurs deux enfants les unit encore. L’un et l’autre s’emploient à leur assurer une enfance équilibrée, loin des rumeurs et des scandales. De plus en plus décidé à ne pas ressembler à Philip, coincé dans le rôle du prince consort, Tony développe ses activités de photographe, entre autres pour Vogue et Vanity Fair. Et plus son étoile grimpe, plus le moral de Margaret dégringole, sur fond de désoeuvrement et d’angoisse. L’alcool ne l’aide pas à retrouver un semblant de sérénité, au contraire, il la pousse à ruminer et à rabaisser celui qui, avant de l’épouser, n’était que Mr. Jones. Elle qui n’en avait que faire, pointe désormais
les origines sociales de son époux, manière comme une autre de se recentrer sur la seule chose qui lui reste, son sang royal.
MARGARET ET RODDY
Tony est infidèle, Margaret aussi. Tous les deux aiment les plaisirs du lit, et, hormis les rares fois où ils continuent malgré tout à les jouer ensemble, vont chercher ailleurs
S’il y a encore de l’attachement dans le couple princier, il ne suffira pas à sauver le bateau qui coule.
d’autres partenaires. Autour de Margaret, on voit revenir des ex-soupirants, comme Dominic Elliot ou Antony Barton, le parrain de sa fille, ce qui fait la joie des tabloïds. De son côté, Tony n’est pas insensible aux charmes des jolies jeunes femmes de son entourage. Mais de divorce, il ne saurait être question. La comédie aurait pu durer encore longtemps. Sauf qu’en 1973, Margaret rencontre Roddy Llewellyn, jeune baronnet épris de dilettantisme et de jardinage. Elle a 43 ans, lui 25, mais le coup de foudre semble réciproque. Roddy est ébloui par la princesse, et sans doute sa propre capacité à en séduire une, Margaret cherche désespérément un homme qui soit heureux de l’accompagner partout. Ces deux-là étaient faits pour s’entendre. À Londres, ils se cachent pour vivre heureux. Quand on l’interroge, Margaret répond que Roddy est un ami. Tout bascule quand elle l’invite à la rejoindre sur son petit paradis de l’île Moustique. Quelques paparazzis prennent des photos qui vont faire scandale, où Margaret et Roddy sont en maillot de bain sur la plage et dans les eaux cristallines. Si leur attitude n’a rien de choquant, c’est l’intimité qu’elle suggère qui enflamme l’opinion. Il faut dire que pendant ce temps-là, l’Angleterre s’enfonce dans la crise économique et sociale, et le bonheur insouciant de Margaret fait mal aux Anglais.
NAUGHTY GIRL
Tony, qui de son côté a rencontré sa future seconde femme, Lucy Lindsay-Hogg, s’engouffre dans la brèche et demande la séparation de corps, puis le divorce. Il est enfin prononcé le 24 mai 1978, après dix-huit années d’une union chaotique, enflammée et somme toute malheureuse. Margaret accuse le coup. Un reliquat d’amour pour Tony? Le constat d’un échec? La peur que Roddy ne comble pas toutes ses attentes? Sans doute lui demandet-elle trop et le jeune homme disparaît pendant près d’un mois, prétendument en Inde, mais incapable d’aller plus loin qu’Istanbul, sans donner de nouvelles à personne. Il est dépassé par les événements et Margaret doit affronter sa plus grande angoisse, la solitude. Au retour de Roddy, leur relation reprend, en principe comme avant. Mais les critiques pleuvent sur Margaret, la naughty girl (vilaine fille), la presse et l’opinion lui reprochent de vivre aux crochets du pays. Elle continue de boire et s’empâte, Roddy s’accroche, mais ne sait plus trop bien à quoi. Alors que ses 50 ans approchent, Margaret met brusquement fin à sa liaison avec Roddy, enfin consciente qu’elle ne les mène nulle part. Elle suit un régime, ralentit l’alcool et un an après, reçoit chez elle Roddy et sa future épouse, avant de leur envoyer quelques semaines plus tard un télégramme qui leur souhaite tout le bonheur du monde pour leur mariage. À cinquante ans, Margaret semble enfin apaisée.