LA PESTE DE 1720 : LA GRANDE TRAGÉDIE MARSEILLAISE
Alors que le système de contrôle sanitaire en vigueur aurait dû l’empêcher de pénétrer dans la ville, la peste va tuer près d’un tiers de la population.
Pourquoi la peste de 1720 a-t-elle autant marqué les esprits ? « Elle n’aurait jamais dû arriver », assène l’historien Régis Bertrand. Au début du xviiie siècle, elle dispose d’un système de lutte contre les épidémies qui a fait ses preuves. Des lazarets ont été créés sur la terre ferme, à Arenc, et sur les îles Ratonneau, dans l’archipel du Frioul, et Jarre, plus au sud. Les navires, les hommes et les marchandises y observent une période de quarantaine après présentation à la consigne sanitaire de patentes établies par les consuls de France lors de chaque escale. »
En 1720, le Grand-Saint-Antoine quitte la Syrie pour Marseille, chargé de soie et de coton. En mai, il présente aux autorités de la ville des patentes « nettes » et part mouiller au Frioul pour respecter le délai d’isolement. « Durant la traversée depuis l’Orient, des décès suspects sont intervenus à bord mais on tarde à reconnaître leur origine. La quarantaine est écourtée car la cargaison doit être vendue à la foire de Beaucaire, sur les rives du Rhône, en juillet. De plus, lors de la quarantaine, des portefaix débarquent les marchandises les plus précieuses pour les aérer dans les bâtiments de l’infirmerie. Des marins internés auraient aussi fait passer par-dessus le mur des lazarets du Frioul de la “pacotille”, des pièces de textile achetées hors taxe qui auraient pu contenir les puces pestiférées. » La peste gagne la ville et s’étend en Provence. À Marseille, elle aurait fait près de 30000 victimes sur une population de 90000 habitants. Le Grand-SaintAntoine est convoyé jusqu’à l’île Jarre, incendié et coulé. Son épave a été identifiée à la fin des années 1970 et son ancre de 4 mètres est exposée au musée d’Histoire de Marseille. ∫