39-45 : sa vie de résistante
Lorsqu’éclate la Seconde Guerre mondiale, Joséphine, devenue française par son mariage, veut se mettre au service de sa patrie et rejoint la Résistance. Un premier pas vers un engagement total contre les inégalités et le racisme.
Àla veille de la guerre, Joséphine Baker est partie pour une tournée mondiale qui, bien qu’épuisante, lui a mis un peu de baume au coeur après sa fausse couche. De retour à Paris, elle prépare sa prochaine revue au Casino de Paris mais la déclaration de guerre vient tout bouleverser. En accord avec le directeur du Casino, elle part donner un récital, avec Maurice Chevalier, sur la ligne Maginot pour donner du courage aux soldats. À Paris, son spectacle distrait des Parisiens bien éprouvés. Mais elle veut s’engager davantage pour son pays…
Précieuse informatrice Justement, un agent des services de renseignements français, Jacques Abtey, lui rend visite.
Joséphine accepte avec enthousiasme de se mettre au service du pays qui l’a adoptée. Mais elle refuse le titre d’espionne. Elle sera une « honorable correspondante ». Avec ses accès aux cercles mondains, diplomatiques et politiques, elle se révèle un atout précieux. Qui soupçonnerait l’adorable artiste, sous ses airs légers et charmants, de soutirer, mine de rien, des informations ? En juin 1940, devant l’avancée de l’armée allemande et sur les conseils d’Abtey, elle quitte Paris, en emmenant ses
Bien que sa santé soit fragile, Joséphine se lance dans une tournée au Maroc, en Algérie, en Égypte, en Libye et au Moyen-Orient pour soutenir les troupes.
animaux, ses bijoux. Direction les Milandes. Informée par Abtey de l’existence d’une résistance pilotée depuis Londres par le général de Gaulle, elle veut rallier la capitale anglaise. Le projet finit par être validé. Le prétexte est tout trouvé : Joséphine prétendra partir en tournée en Amérique du Sud pour passer en Espagne puis fera cap sur Londres. Dans ses bagages, Abtey, alias Jacques-François Hébert, qu’elle présentera comme son chorégraphe. Première étape, Vichy, où on leur remettra des informations sur les positions allemandes qu’ils cacheront dans les tenues de scène de Joséphine ou retranscriront à l’encre sympathique dans ses partitions pour les transmettre à Londres.
Algérie, Portugal, Maroc, Espagne… Finalement, changement de programme. Londres décide que Joséphine Baker sera plus utile ailleurs.
Elle s’exécute et, pour se créer une couverture, propose ses services à l’Opéra de Marseille. Son directeur est ravi. Joséphine reprend La Créole d’Offenbach devant un public enchanté. En janvier 1941, face à la menace d’une occupation du sud de la France, on lui ordonne de se réfugier en Algérie. Après une traversée éprouvante, Joséphine participe à un grand gala à Alger au profit des soldats, puis elle part « en tournée » au Portugal, les malles pleines de renseignements à destination de la Résistance. Elle s’installe ensuite au Maroc mais repart peu après pour recueillir des informations en Espagne au sujet de rumeurs d’invasion du Maroc. Entre spectacles et soirées mondaines, une fois encore, Joséphine récupère de précieuses données.
Malade, elle continue à s’engager Joséphine, hélas, tombe malade: péritonite, comas, occlusions intestinales, fièvres, embolie, paratyphoïde…
Elle passe plus de dix-neuf mois à l’hôpital, au seuil de la mort. Désespérée de ne pouvoir se rendre plus utile, elle suit l’avancée de la guerre, vouant une immense
admiration au général de Gaulle. Bien que sa santé soit encore fragile, Joséphine se lance dans une tournée au Maroc, en Algérie, en Égypte, en Libye et au Moyen-Orient pour soutenir les troupes, au bénéfice de la CroixRouge. À Alger, elle rencontre enfin Charles de Gaulle, qui lui remet une petite croix de Lorraine en or pour la remercier des services rendus à son pays. Joséphine est bouleversée. Pourtant, elle n’hésite pas, dans un élan de générosité, à mettre aux enchères ce souvenir si précieux lors d’un gala à Beyrouth. Les 300 000 francs récoltés sont entièrement reversés à la Résistance.
La patrie reconnaissante En 1944, Joséphine reçoit le titre de sous-lieutenant des troupes féminines auxiliaires, une fierté pour elle.
De retour à Paris après le débarquement allié, elle est accueillie, à sa grande surprise, par une foule en liesse. Elle accepte de se mettre encore au service de l’Armée, en donnant bénévolement des concerts devant les soldats et les habitants des zones libérées. Elle convainc Jo Bouillon, chef d’orchestre qu’elle a croisé des années plus tôt, de l’accompagner. Il deviendra son mari. Son action, publiquement saluée par de Gaulle et Churchill, lui vaut de recevoir décorations et médailles, dont celles de la Résistance française, de chevalier de la Légion d‘honneur et de la Croix de guerre. Après la guerre, Joséphine multiplie les concerts et les tournées mondiales mais, désormais, le spectacle n’est qu’un moyen de servir son plus grand projet : acheter les Milandes, dont elle n’est que locataire, et y créer le village du monde dont elle rêve (« capitale mondiale de la fraternité »), entourée des nombreux enfants qu’elle a décidé d’adopter. Joséphine Baker va aussi soutenir avec ferveur le mouvement des droits civiques et Martin Luther King. Elle est la seule femme à prendre la parole lors de la Marche sur Washington pour l’emploi et la liberté, le 28 août 1963, au cours de laquelle Martin Luther King a prononcé son fameux : « I Have a Dream… »