Fanny Cosandey : « Chaque mariage royal est unique »
Spécialiste de la monarchie française sous l’Ancien Régime et directrice de centre à l’École des hautes études en sciences sociales, Fanny Cosandey est l’auteur de plusieurs ouvrages de référence sur le sujet. Parmi lesquels : La Reine de France, symbole
Qu’est ce qui définit un mariage royal ? C’est… lorsque le roi se marie ! Pour le reste de la famille, il s’agit de mariages princiers. C’est d’ailleurs le cas pour celui d’Henri II avec Catherine de Médicis, célébré alors qu’il n’est que prince du sang. Ce mariage d’abord princier est converti ensuite en mariage royal lorsqu’il est appelé sur le trône. Une modification du contrat de mariage est alors nécessaire, en passant d’une communauté de biens au régime de noncommunauté, comme pour tous les rois.
Quelles raisons motivent les mariages royaux ? Avant tout, assurer la continuité dynastique. Le mariage royal est un acte de paix et une affaire d’État parce qu’il crée des alliances et assure le fonctionnement dynastique de la monarchie et, donc, la stabilité du régime. Il constitue, avec son nécessaire corollaire qu’est la famille, la cellule de base de toute autorité. De rivaux, il fait des alliés, d’ennemis des parents. Au Moyen Âge et jusqu’à Anne de Bretagne et sa fille Claude de France, il s’agit surtout d’agrandir le domaine royal, en épousant des héritières régionales. Par la suite, le roi noue des alliances avec des princes puissants à l’étranger. Il choisit des filles aînées qui peuvent hériter du royaume en l’absence de mâle et, si possible, en âge de procréer. Il n’est pas évident de trouver des princesses du même âge que le roi, héritières et catholiques (après les guerres de Religion). Cela explique certaines alliances avec des femmes de rang inférieur, telles Marie de Médicis et Marie Leszczynska, qui cependant appartiennent toujours à des maisons souveraines. Les mariages royaux ne se font pas par amour mais par devoir. Il ne faut pas imaginer le roi
sélectionnant sa future épouse sur sa beauté : d’ailleurs, les échanges de portraits n’avaient lieu qu’une fois l’alliance conclue.
Quelles sont les étapes des mariages royaux ?
Il y a d’abord le temps des fiançailles, qui sont l’aboutissement des négociations des conditions du mariage. Comme elles peuvent se rompre aisément, un mariage par procuration est ensuite organisé : lors d’une cérémonie religieuse, un envoyé du roi passe l’anneau au doigt de l’épousée. Elle devient officiellement reine et sera accueillie en tant que telle en France et à la Cour. Puis le mariage est célébré en présence des époux qui donnent leur consentement avant de le consommer. C’est cette consommation qui, au regard de l’Église, rend l’union indéfectible. Généralement, les époux se rencontraient pour la première fois, le jour « J ».
Comment se déroule la cérémonie ?
Il n’y a pas de rituel, chaque mariage royal est unique. Contrairement aux cérémonies monarchiques (sacre, funérailles, entrées royales, lits de justice, États Généraux…), où le roi et la reine incarnent une fonction, le mariage royal n’obéit à aucun autre rituel que celui de l’Église. Il n’a pas de signification politique. Il n’y a donc pas de symbole ou de tenue particuliers, comme les regalia ou la tenue du sacre. Les époux sont richement vêtus, leurs parures rehaussées de leurs plus beaux bijoux. Il peut y avoir des fêtes de Cour mais rien de plus officiel. C’est pourquoi il existe peu de récits dans les chroniques contemporaines : les mariages royaux, en dehors des potins de courtisans, ne les intéressent pas spécialement.
Y a-t-il un âge minimum pour se marier ?
Les fiançailles peuvent se nouer entre enfants très jeunes mais le mariage effectif est alors repoussé à la puberté, entre 12 et 14 ans. En effet, pour que l’Église reconnaisse l’union, il faut que les époux soient en âge de consentir.
Enfin, quels sont les motifs d’annulation des mariages royaux ?
Le cas s’est très peu présenté mais la raison première est une reine infertile, ce qui permet alors de prétendre que le mariage n’a pas été consommé. Il y a eu Jeanne de Valois, première épouse de Louis XII, ainsi que Marguerite de Valois, séparée d’Henri IV.