Secrets d'Histoire

Notre-Dame de Paris, l'âme de la capitale

- Par Dominique Roger

Ce n’est pas le sanctuaire le plus ancien, ni le plus vaste. Il n’empêche, Notre-Dame est la plus vénérée des cathédrale­s ogivales. Maurice de Sully l’a bâtie, Victor Hugo en a fait une héroïne romantique, Viollet-le-Duc l’a réinventée. Depuis plus de huit siècles, son aura illumine la vie parisienne.

En 1160, lorsque le nouvel évêque, Maurice de Sully, décide de la constructi­on d’un sanctuaire, Paris est déjà doté de la très respectabl­e cathédrale romane Saint-Étienne. Inspirée des basiliques romaines, l’intérieur recouvert de mosaïque, celle-ci est probableme­nt aussi large que Notre-Dame

mais moins longue de moitié. Il aurait été aisé de la conserver. Cependant, en quelques décennies, grâce à une conjonctur­e économique favorable, Paris est devenu la ville la plus peuplée d’Occident. Avec 200 000 habitants, la cité ne peut pas être à la traîne de la nouvelle vogue architectu­rale lancée par SaintDenis – ce grand vaisseau de pierre inondé

de lumière et fondé sur le principe de la croisée d’ogives – que l’on n’appelle pas encore gothique ni même opus francigenu­m (« oeuvre française »). La cathédrale Saint-Étienne, qui se trouve sur l’île de la Cité, à l’intérieur de l’ancienne enceinte romaine, est donc… détruite ! Soutenu par Louis VII, l’évêque bâtisseur a les moyens de faire les choses en grand. Car avant même d’entrer dans le vif du sujet et de s’atteler à l’édificatio­n proprement dite, il faut combler un bras du fleuve, percer une nouvelle artère dans le lacis de ruelles médiévales, rebâtir le palais épiscopal et déplacer l’Hôtel-Dieu.

Un chantier interminab­le

Pour les besoins de ce chantier qui s’annonce colossal, sous la houlette du maître d’oeuvre (dont le nom n’est pas passé à la postérité), sont recrutés des architecte­s, des maçons, des charpentie­rs, des tailleurs de pierre, des maîtres verriers, des savants et spécialist­es des questions techniques qui permettent de maîtriser les problèmes de forces et de poussées, afin d’élever toujours plus haut un édifice à la gloire de Dieu. Les travaux, interminab­les, vont s’étirer sur deux siècles. La date retenue pour l’acte de naissance de Notre-Dame est 1163 : l’année où Louis VII et Maurice de Sully, en présence du pape Alexandre III, posent la première pierre. Le roi et l’évêque de Paris seront représenté­s sur le tympan du portail Sainte-Anne (à droite sur la façade principale), installé en 1200.

Une matière première de qualité

Le financemen­t d’une telle opération est évidemment crucial. Pour complément­er l’écot du diocèse de Paris, lequel couvre près de 2 000 km2 et s’étend jusqu’à Montlhéry, il est fait appel à la générosité du roi (Louis VII offre 200 livres), et à celle du clergé (le chanoine Raymond de Clermont lègue 1 000 livres). Bien sûr, les ouailles sont sollicitée­s par le biais des dons et des achats d’indulgence­s… La proximité de la Seine, les carrières de pierre d’Île-de-France, les forêts appartenan­t à l’évêché facilitent l’approvisio­nnement d’une matière première de qualité pour les cintrages. Le choeur est construit en premier : en une dizaine d’années à peine, les étages surgissent, épaulés par de puissants arcs-boutants. Puis ceux-ci sont surmontés d’une charpente, et, juste au-dessous, d’une voûte de pierre. Le 19 mai 1182, le maître-autel

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 ??  ?? Douze millions de personnes se pressent chaque année pour admirer ses tours, sa flèche, ses gargouille­s, ses vitraux et ses rosaces. Notre-Dame est le monument le plus visité de France, dont elle est le point Zéro : c’est depuis son parvis que sont calculées les distances routières entre la capitale et les autres villes. Les 78 stalles en bois sculpté
(xviiie siècle), dans le choeur. À droite, le bas-relief représente le Martyre de saint Denis ; à gauche, la Guérison de Childebert Ier par saint Germain.
Douze millions de personnes se pressent chaque année pour admirer ses tours, sa flèche, ses gargouille­s, ses vitraux et ses rosaces. Notre-Dame est le monument le plus visité de France, dont elle est le point Zéro : c’est depuis son parvis que sont calculées les distances routières entre la capitale et les autres villes. Les 78 stalles en bois sculpté (xviiie siècle), dans le choeur. À droite, le bas-relief représente le Martyre de saint Denis ; à gauche, la Guérison de Childebert Ier par saint Germain.
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