Notre-Dame de Paris, l'âme de la capitale
Ce n’est pas le sanctuaire le plus ancien, ni le plus vaste. Il n’empêche, Notre-Dame est la plus vénérée des cathédrales ogivales. Maurice de Sully l’a bâtie, Victor Hugo en a fait une héroïne romantique, Viollet-le-Duc l’a réinventée. Depuis plus de huit siècles, son aura illumine la vie parisienne.
En 1160, lorsque le nouvel évêque, Maurice de Sully, décide de la construction d’un sanctuaire, Paris est déjà doté de la très respectable cathédrale romane Saint-Étienne. Inspirée des basiliques romaines, l’intérieur recouvert de mosaïque, celle-ci est probablement aussi large que Notre-Dame
mais moins longue de moitié. Il aurait été aisé de la conserver. Cependant, en quelques décennies, grâce à une conjoncture économique favorable, Paris est devenu la ville la plus peuplée d’Occident. Avec 200 000 habitants, la cité ne peut pas être à la traîne de la nouvelle vogue architecturale lancée par SaintDenis – ce grand vaisseau de pierre inondé
de lumière et fondé sur le principe de la croisée d’ogives – que l’on n’appelle pas encore gothique ni même opus francigenum (« oeuvre française »). La cathédrale Saint-Étienne, qui se trouve sur l’île de la Cité, à l’intérieur de l’ancienne enceinte romaine, est donc… détruite ! Soutenu par Louis VII, l’évêque bâtisseur a les moyens de faire les choses en grand. Car avant même d’entrer dans le vif du sujet et de s’atteler à l’édification proprement dite, il faut combler un bras du fleuve, percer une nouvelle artère dans le lacis de ruelles médiévales, rebâtir le palais épiscopal et déplacer l’Hôtel-Dieu.
Un chantier interminable
Pour les besoins de ce chantier qui s’annonce colossal, sous la houlette du maître d’oeuvre (dont le nom n’est pas passé à la postérité), sont recrutés des architectes, des maçons, des charpentiers, des tailleurs de pierre, des maîtres verriers, des savants et spécialistes des questions techniques qui permettent de maîtriser les problèmes de forces et de poussées, afin d’élever toujours plus haut un édifice à la gloire de Dieu. Les travaux, interminables, vont s’étirer sur deux siècles. La date retenue pour l’acte de naissance de Notre-Dame est 1163 : l’année où Louis VII et Maurice de Sully, en présence du pape Alexandre III, posent la première pierre. Le roi et l’évêque de Paris seront représentés sur le tympan du portail Sainte-Anne (à droite sur la façade principale), installé en 1200.
Une matière première de qualité
Le financement d’une telle opération est évidemment crucial. Pour complémenter l’écot du diocèse de Paris, lequel couvre près de 2 000 km2 et s’étend jusqu’à Montlhéry, il est fait appel à la générosité du roi (Louis VII offre 200 livres), et à celle du clergé (le chanoine Raymond de Clermont lègue 1 000 livres). Bien sûr, les ouailles sont sollicitées par le biais des dons et des achats d’indulgences… La proximité de la Seine, les carrières de pierre d’Île-de-France, les forêts appartenant à l’évêché facilitent l’approvisionnement d’une matière première de qualité pour les cintrages. Le choeur est construit en premier : en une dizaine d’années à peine, les étages surgissent, épaulés par de puissants arcs-boutants. Puis ceux-ci sont surmontés d’une charpente, et, juste au-dessous, d’une voûte de pierre. Le 19 mai 1182, le maître-autel