So Foot

Peter Stöger.

Il a la lourde tâche de faire oublier les regrettés Jürgen Klopp et Thomas Tuchel tout en réparant les dégâts causés par Peter Bosz. Une semaine seulement après avoir été débarqué de Cologne, Peter Stöger, coach autrichien plutôt confidenti­el, s’est vu co

- Par Matthias Dersch pour Kicker – ALLEMAGNE

Récemment nommé à la tête du Borussia Dortmund, le coach autrichien doit faire oublier les regrettés Jürgen Klopp et Thomas Tuchel. Ça va être compliqué, mais il n’a d’autre choix que d’y croire. Très fort.

En regardant votre parcours, on remarque combien vous êtes tenu en haute estime au sein de vos précédents clubs. Ce n’est pas forcément habituel dans le milieu du football. Comment

l’expliquez-vous? Je suppose que cela a à voir avec le fait que mes résultats sportifs n’ont pas été spécialeme­nt mauvais dans l’ensemble. Mais aussi –et c’est sûrement la raison principale– parce que je traite avec respect et estime les gens avec qui je travaille. L’aspect humain joue un rôle important. Chacun tente de faire au mieux son boulot. Et je crois aussi que je tiens un discours détendu. Cela fait partie de ma personnali­té, d’être capable de rire de moi-même.

Lorsque vous étiez à l’Austria Vienne, le masseur, Georg Schreitl, disait que si vous n’aviez qu’un

défaut, c’était “d’êtretrophu­main”. On ne peut pas être trop humain. Je préfère tomber sur un os parce que j’ai été trop humain plutôt qu’aller dans la direction inverse et avoir des résultats. Je vous le dis le plus honnêtemen­t du monde. Lorsque l’on est amené à travailler avec des individus dans une discipline aussi émotionnel­le que le football, les sentiments sont forcément là. C’est pourquoi il est d’autant plus important de se rattacher à des valeurs –et l’humanisme en fait partie.

La devise de Dortmund est “Amourvérit­able”. L’été dernier, vous avez déclaré: “Làoùilya beaucoupd’amour,ontrouveso­itdelarêve­rie,

soitunesou­ffranceext­rême .” Qu’avez-vous ressenti lorsque vous êtes entré en fonction à la mi-décembre? (Rires) Pour commencer, le

mauvais temps…

Votre premier entraîneme­nt est tombé à l’eau à cause de la neige. De la folie! Tu as une seule séance de prévue et tu ne peux pas la mener à bien à cause de la neige. Mais plus sérieuseme­nt: la plupart du temps, les changement­s d’entraîneur laissent derrière eux quelque chose de négatif. À Dortmund, c’était l’incertitud­e. J’ai ressenti que cette équipe n’était pas insensible à ce qu’il se passait. (Il réfléchit) Les gens ont remarqué à quel point notre tâche allait s’avérer follement difficile. Mon sentiment était alors: peu importe ce que je fais, de toute façon, ça ne marche pas. Je n’ai fait que poursuivre.

Une semaine plus tôt, vous étiez limogé de Cologne, où vous êtes resté plus de 1600 jours en poste. Là-bas, vous avez marqué le club et vous êtes aussi tombé amoureux de la ville. La courte durée de votre contrat à Dortmund vous empêchera-t-elle de vous i mpliquer autant? C’est vrai que j’ai sué sang et eau pour ce club et sa ville. À un moment, c’était devenu normal pour les gens de me voir à tel endroit en ville ou au carnaval. Mais tout cela est venu avec les années. Si je n’étais resté qu’un an à Cologne, personne n’aurait dit que j’étais autant impliqué. Et pourtant, moi, je le ressentais exactement de la même manière. Donc non, cela ne changera pas à Dortmund. Je suis un homme très ouvert, qui va vers les autres.

“J’ai réfléchi dix secondes pour savoir si je relevais le défi ou non. À la onzième, j’ai accepté”

Vous avez tergiversé avant d’accepter le poste? J’ai réfléchi dix secondes pour savoir si je relevais le défi ou non. À la onzième, j’ai accepté. (Rires)

Certains à Cologne ont mal pris le fait que vous vous habituiez si vite à votre nouvelle situation. On a même critiqué le fait que vous portiez une tenue noire et jaune lors de votre premier match. Je peux comprendre ce genre de réactions –pour mes amis de Vienne, c’était aussi bizarre de me voir en noir et jaune alors que je ne portais que du rouge et du blanc pendant quatre ans et demi–, mais qu’est-ce que j’aurais dû porter? Sur le banc, je suis toujours en jean-baskets et je porte des accessoire­s du fanshop ou de l’équipement­ier. J’aurais dû porter des fringues de Cologne? Ou des chaussures vernies? Si j’avais fait ça, les gens auraient pensé que j’étais complèteme­nt perché.

Avec six points en deux matchs, vous terminez la phase aller à la troisième place. La pression est

elle évacuée? Absolument pas. À Dortmund, on ne se satisfait pas de la troisième place. Le BVB appartient à cette catégorie d’équipes qui doivent gagner chaque match. C’est pour cela qu’il n’y a aucune raison de se reposer sur nos lauriers. Ces victoires nous ont fait du bien et nous sommes dans la zone du classement où nous voulons être. Mais nous n’avons rien atteint de plus.

Beaucoup de vos collègues ont une conception précise de ce qu’ils veulent mettre en place. La philosophi­e vient, pour ainsi dire, avant l’équipe. Votre approche est-elle différente? Oui, mais je comprends ceux qui ont une philosophi­e de jeu et qui s’y tiennent coûte que coûte. Beaucoup d’exemples qui ont réussi vont dans ce sens.

Mais? J’ai entraîné de nombreuses équipes, et partout, j’étudiais où se situaient les qualités des joueurs et où ils se sentaient le plus en confiance. C’est comme ça que j’essaie de bâtir mon équipe. Il y a une différence entre développer une philosophi­e de jeu avec une équipe volontaire comme Cologne, tout juste promue en Bundesliga, et entraîner une équipe naturellem­ent dominante.

Lors de vos premiers matchs avec le BVB, vous avez été particuliè­rement attentif à la stabilité défensive de votre onze. Après quoi, vous avez promis aux fans une équipe “prêteàdonn­erdu plaisir”. Oui, mais ce n’est pas difficile. Même si je le voulais, je ne parviendra­is pas à lui faire jouer un football qui ne soit pas attractif… (Rires)

Contrairem­ent à vos précédents postes, vous n’avez à votre dispositio­n presque que des joueurs internatio­naux. Votre approche vis-à-vis

de l’effectif a-t-elle changé? Non, l’approche humaine est restée la même, même si mes joueurs présentent peut-être un peu plus de réussite. J’agis avec mes gars de Dortmund de la même manière que j’agissais avec mes gars de Vienne, ou avec ceux de Steiermark, en division régionale. Partout, on rencontre des joueurs qui sont sportiveme­nt efficaces et qui veulent continuer à se développer. Mais le fait que le potentiel de l’effectif de Dortmund soit très élevé me rend bien entendu la tâche un peu plus facile.

Lorsque vous avez commencé, vous vouliez apporter de l’empathie au sein de l’équipe. Avezvous trouvé la cause de la crise qui l’a traversée

pendant la phase aller? Non, c’est toujours difficile pour moi de trouver l’origine du problème. Mais c’est ce qui rend les sports collectifs encore plus passionnan­ts. On fait parfois face à des mécanismes, sans savoir quand ils sont apparus ni comment on aurait pu les arrêter. Cela se produit aussi au plus haut niveau et c’est ce qui rend le football imprévisib­le. La chance et la malchance jouent toujours un rôle important. Nous aurions tout aussi bien pu perdre contre Hoffenheim. Ce qui est important, ce sont les échanges humains pour tenter de découvrir où se cachent les problèmes. Jusqu’à présent, je n’ai rien décelé qui ne soit potentiell­ement pas réparable.

Le directeur sportif Michael Zorc parlait de la formation de petits groupes au sein du noyau. Je ne l’ai pas profondéme­nt ressenti. Mais je suis arrivé de l’extérieur. Lorsque tu es dedans depuis des années, tu perçois forcément les choses autrement. Lorsqu’on ne parvient pas à gagner, chacun au sein de l’équipe tente de sauver sa peau. C’est donc à la direction qu’il incombe d’inverser la tendance et de faire redémarrer la machine.

Le fait que Pierre-Emerick Aubameyang ait été autorisé à retourner à l’entraîneme­nt deux jours après les autres ne nuit-il pas à l’esprit d’équipe? Non, c’est plutôt une grande reconnaiss­ance qu’il ait été nominé pour le Ballon d’or africain. Les autres joueurs sont bien présents à la cérémonie du joueur européen de l’année, il n’y avait pas de raison qu’il n’en soit pas de même pour Aubameyang.

Au cours de la phase aller, Aubameyang s’est plusieurs fois fait remarquer pour des problèmes de discipline. Craignez-vous qu’il finisse par ne plus être en phase avec le reste du groupe au vu

des libertés qu’il prend? Aucun individu ne se ressemble. Nous respectons la personnali­té de nos joueurs. Lorsque le groupe est vraiment fort, il peut empêcher certaines choses de lui-même. L’esprit d’équipe est au-dessus de tout, c’est la clé de voûte de notre sport. Et il inclut le respect mutuel, y compris pour les piliers. Il n’y a pas de plus grand objectif que de parvenir à développer un esprit d’équipe avec des joueurs qualitativ­ement supérieurs. À partir du moment où le groupe et la structure interne sont fragilisés, cela devient plus difficile. Pour l’instant, je n’ai à me plaindre de rien, et surtout pas de la ponctualit­é d’Aubam’. – Traduction: Julien Duez / Photos: Imago/ Panoramic et Gepa/Iconsport

“Même si je le voulais, je ne parviendra­is pas à faire jouer au Borussia un football qui ne soit pas attractif…”

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Mannequin challenge pas évident.
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Les jaloux diront Photoshop.

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