ASSURANCE
Le prix de votre assurance va grimper (si elle existe encore)
La projection a été publiée par la Fédération française de l’assurance en décembre 2015: le coût des dégâts liés aux aléas climatiques (sécheresse, inondations, submersions marines et tempêtes) devrait atteindre les 92 milliards d’euros entre cette date et 2040, contre 44 milliards entre 1998 et 2013, soit une hausse de 110% due en partie au réchauffement et à l’augmentation de la valeur des biens touchés. Et d’après François Nédey, directeur technique des assurances de biens et de responsabilité civile chez Allianz France, la menace principale n’est pas celle que l’on croit: “Dans les dix ou vingt prochaines années, l’évolution la plus importante pour nous est l’augmentation des épisodes de sécheresse. Selon les régions, une grosse partie des maisons individuelles en France sont en effet construites sur du sol argileux qui se rétracte puis gonfle en cas de sécheresse, entraînant des dégâts structuraux pouvant être considérables. En 2003, lors de la canicule, le coût pour Allianz a été équivalent à celui de la tempête Xynthia, par exemple. Il y a 20 ans, aucun assureur n’aurait imaginé cela.” Comment, alors, imaginer que le prix des assurances n’augmente pas dans les années à venir? “C’est inévitable, admet Jeanlouis Charluteau, directeur de la réassurance et de la modélisation catastrophe chez Generali. Simplement, je pense que des efforts collectifs sont indispensables pour que cette augmentation reste supportable.” Par exemple, Generali a embauché des géographes et un climatologue pour mieux prévoir les risques et ainsi construire un portefeuille d’assurés équilibré. “Avant, notre travail consistait à regarder ce qui s’était passé dans les 20 ou 30 dernières années. Aujourd’hui, ça a changé”, analyse Charluteau. Ce qui risque également de changer, c’est que vous pourriez bientôt recevoir plus de textos de votre assureur que de vos proches. “Nous allons devenir le risk manager de l’assuré, explique l’homme de Generali. Nous allons lui donner toute une panoplie d’outils pour réduire son exposition aux risques. Nous développons aussi un partenariat avec Météo France pour envoyer des alertes avant un événement potentiellement catastrophique, et des infographies sur ce qu’il faut faire ou pas.” Les assurances pourraient également être impliquées dans l’édiction de nouveaux règlements, et pousser les collectivités locales à appliquer plus rigoureusement ceux qui existent, notamment sur les constructions en zones inondables. Les assureurs peuvent-ils aller plus loin? Pour Lucie Pinson, chargée de campagne “banques et finances privées” aux Amis de la Terre, “il faut travailler autour des plus gros producteurs de risques, qui restent les grandes multinationales et leurs activités polluantes. Depuis le début de l’année, Axa est le premier assureur mondial à ne plus couvrir certaines entreprises actives dans le charbon”. Personne ne veut l’évoquer pour le moment, mais les effets du réchauffement climatique pourraient aussi un jour remettre en cause le régime français d’indemnisation des catastrophes naturelles créé en 1982, qui “proclame la solidarité et l’égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales”. “C’est un système quasiment unique au monde, qui permet à ceux qui vivent le long des côtes ou dans des zones inondables d’être protégés alors qu’ils devraient payer un prix très élevé pour être assurés , comme cela se pratique dans d’autres pays”, juge François Nédey. Le fameux modèle social à la française a décidément bien du souci à se faire.