Envoyés spéciaux
Une tête et un torse coincés entre une grosse caméra et un événement parfois dramatique.
Voilà l’image d’épinal du ou de la journaliste envoyé(e) sur le terrain pour une chaîne de télé, et voilà ce qui a sauté aux yeux du photographe slovaque Martin Kollar alors qu’il parcourait les rues détruites de la Nouvelle‑orléans après l’ouragan Katrina, en 2005. “La couverture médiatique massive m’a fasciné, mais aussi le fait que quand on fait un pas en arrière, on se rend compte que ces gens sont parfois dans un décor incongru ou habillés très différemment en haut et en bas”, évoque‑t‑il aujourd’hui. L’année suivante, il décide donc de photographier ces anchormen et anchorwomen avec deux règles: le faire dans plusieurs pays du monde et se limiter à une série courte. Le tout afin de montrer que ces symboles de la mondialisation se ressemblent tous, où qu’ils soient. Un journaliste slovaque les pieds dans l’eau pour illustrer les intempéries, un envoyé spécial sur une plage à Cannes, un accident de voiture à Los Angeles… À l’époque, Martin Kollar pense aussi documenter une pratique amenée à disparaître, effacée par le traitement ultraréactif de l’information par l’internet mobile. “Seize ans plus tard, force est de constater qu’ils sont toujours là, admet le photographe. L’évolution est plus lente que je ne pensais.” Autre possibilité: l’anchor(wo)man n’est peut-être pas plus perméable au temps qui passe qu’au mauvais temps.