Le Défi Titicaca et son radeau écoresponsable
Depuis le 10 novembre et jusqu’au 20, le nageur paralympique Théo Curin, la vice-championne olympique Malia Metella et l’éco-aventurier Matthieu Witvoet traversent à la nage et en totale autonomie le lac Titicaca. Pour l’occasion, la Direction Innovation et la R&D D’EDF ont développé un radeau tractable écoconçu pour héberger les trois nageurs. Objectif: limiter l’impact environnemental.
Lorsqu’il renonce à participer aux Jeux paralympiques de Tokyo en 2021, le nageur Théo Curin a bien une idée derrière la tête. Pourquoi ne pas tenter de traverser à la nage et en totale autonomie le mythique lac Titicaca, entre le Pérou et la Bolivie? Le tout avec une empreinte carbone la plus faible possible. Un an plus tard, le 10 novembre 2021, le voilà en route pour l’expédition aux cotés de la vice-championne olympique de natation Malia Metella et de l’éco-aventurier Matthieu Witvoet. Tractant un radeau de 500 kilos surmonté d’une plateforme de vie, couvert de panneaux solaires et coiffé d’une tente de toit pour dormir, les trois nageurs termineront leur périple de 122 kilomètres à 3800 mètres d’altitude et dans une eau entre dix et quatorze degrés. Un défi rendu possible grâce à l’expertise et au savoir-faire de la Direction Innovation (DI) et de la R&D D’EDF pour la conception et la fabrication d’une embarcation légère, réparable et écologique, baptisée Pachamama.
Dès septembre 2020, les ingénieurs et la designer consacrent leurs journées à étudier les besoins de l’équipage lors de la traversée en tenant compte des conditions climatiques extrêmes du lac. Puis c’est sur le terrain que se poursuit l’expérimentation. “Dans un souci de limiter l’impact environnemental, on récupérait au départ ce qui existait autour du lac de Compiègne pour concevoir quelque chose qui pouvait ressembler à une embarcation tractable”, décrit Olaf Maxant, responsable de la performance à la DI D’EDF. Pour les premiers tests, les embarcations étaient volontairement faites “de bric et de broc”: deux kayaks assemblés avec des tasseaux, chargés de deux personnes et lestés de sacs de sable. Si imaginer une embarcation de A à Z et sans modèle donne du fil à retordre aux équipes D’EDF, celles-ci ont misé sur les entraînements en lac des athlètes et leurs observations. “Au début, on a eu pas mal de déconvenues,
poursuit l’ingénieur. Par exemple, lors du deuxième test, les nageurs ont eu un mal fou à tracter et piloter le bateau, qui, entraîné par la force du vent, partait dans tous les sens.” L’équipe technique a alors passé au peigne fin les propriétés de l’air et tenté d’améliorer la prise au vent de l’embarcation pour éviter sa dérive. Pas à pas, ils ont fait évoluer les maquettes en considérant le repos, l’alimentation, le réchauffement et la sécurité des nageurs ainsi que la légèreté et le confort du radeau.
Pensé dans une démarche d’économie circulaire, le radeau du “Défi Titicaca” est construit dans les ateliers de la Grande Berthe, en Touraine, à partir de matériaux recyclés ou recyclables. Ses coques viennent tout droit du catamaran Ulysse, un prototype de bateau à moteur propulsé aux déchets plastiques conçu par l’équipe du projet Plastic Odyssey en 2018 et lui-même issu d’un catamaran dessiné en 1967 par l’architecte britannique Rodney March pour les Jeux olympiques. Sans perdre le fil de l’écoconception, les équipes munissent le radeau d’un moteur électrique hors-bord Torqeedo, d’une tente de toit achetée sur Leboncoin ou encore de plaques de contreplaqué issues d’un ancien décor de théâtre pour constituer la plateforme de vie. Coté énergie, nécessaire pour se réchauffer, éclairer et alimenter le moteur, le Pachamama est habillé de six panneaux solaires souples, ultralégers, 100% made in France et conçus par Solar Cloth pour assurer une totale autonomie.
Force est de constater que l’équipe du Défi Titicaca ira jusqu’au bout dans sa démarche écoresponsable en imaginant offrir une troisième vie à l’embarcation. Après l’expédition, celle-ci voguera vers l’institut de recherche pour le développement (IRD) et ses partenaires de l’université de La Paz, qui prévoient d’envoyer le radeau en mission de recherche sur le lac Titicaca. Longue vie au Pachamama!