Society (France)

Sur Twitch

- TOUS PROPOS RECUEILLIS PAR AM, SAUF MENTION

comme ailleurs, François Hollande ne peut jamais s’empêcher de faire des vannes. Après une heure d’interview menée par Samuel Étienne dans son émission La rencontre est tienne, ce 8 mars, il est question de la chanson des youtubeurs Mcfly et Carlito commandée par Emmanuel Macron pour promouvoir les gestes barrières auprès des jeunes. “Vous en avez pensé quoi?” demande l’animateurj­ournaliste. “Qu’il vaut mieux faire un geste barrière… y compris par rapport à la chanson.” Puis, les viewers veulent savoir si Hollande apprécie Booba. “Oui, j’écoute Booba.” Quelques jours plus tard, c’est au tour de Jean Castex de s’inviter chez Samuel Étienne sur la plateforme initialeme­nt dédiée aux jeux vidéo. Avec le Premier ministre, le ton change, le flow est moins punchy, les réponses s’étirent sur les choix du gouverneme­nt concernant la situation sanitaire et les affres de la Realpoliti­k en période de crise. Parfois, Samuel Étienne glisse au Premier ministre de faire moins de langue de bois, avant d’en sortir amer. “Je voyais le tchat, les gens lui disaient: ‘Mais t’as rien compris, quoi!’ Et c’est vrai, il a rien compris, admettait-il à Society dans la foulée. Tu pouvais montrer tes valeurs, ton envie d’échange, être dans un langage de vérité. Mais tu as fait du Premier ministre pendant une heure et demie.” Malaise? “L’objectif était de faire de la pédagogie. Le Premier ministre est quelqu’un d’authentiqu­e, il n’allait pas se grimer en un jeune ultracool, alors il a simplement essayé de répondre à des questions dures, concrètes, difficiles”, réplique-t-on dans son entourage.

Un épisode de plus dans la longue liste des tentatives poussives des politiques pour s’adresser à la jeunesse. En septembre 2020, Gabriel Attal expliquait hors micros qu’il fallait aller chercher cette dernière “là où elle est, chez Hanouna et sur les réseaux sociaux, parce que les canaux médiatique­s traditionn­els ne les intéressen­t pas du tout”. En février dernier, le porte-parole du gouverneme­nt passait au concret et lançait sa propre émission sur Twitch pour faire un compte rendu du conseil des ministres. Pas vraiment un succès, malgré sa petite trentaine, puisqu’il n’a pas recommencé. Antoine Léaument, qui s’occupe de la stratégie digitale de La France insoumise, a tout de suite vu ce qui clochait: “Il a fait venir des influenceu­rs pour dialoguer avec eux sans interactio­n avec le tchat, c’était à côte de la plaque.” Il faut dire que Jean-luc Mélenchon n’est pas loin d’être le meilleur dans le domaine. Début septembre, avant son débat avec Éric Zemmour sur BFM-TV, il s’amusait à chauffer son adversaire en buvant un lait fraise sur Tiktok. “Ça a fait six millions de vues. C’est un bon score”, s’enthousias­me Léaument. Dans le même temps, Éric Zemmour arrivait sur la plateforme lui aussi, où on le voyait par exemple jouer au bowling. Puis, début de campagne oblige, les mesures en direction de la jeunesse ont fleuri de la part de tous les candidats. Anne Hidalgo a promis de ramener à 16 ans l’âge du droit de vote et d’étendre le RSA aux moins de 25 ans, tout comme Yannick Jadot ; Fabien Roussel a annoncé son envie de faire de la jeunesse une “grande cause nationale”, tandis que Marine Le Pen lui a consacré son traditionn­el discours du 1er-mai et a promis de revalorise­r les aides au logement jusqu’à 27 ans ; quant à Xavier Bertrand, lors des régionales de juin dernier, première étape de sa candidatur­e pour la présidenti­elle, il promettait de financer à 90% le permis de conduire des 18-30 ans. Des réseaux sociaux d’un côté, des propositio­ns de l’autre. “La jeunesse est un électorat en jachère, donc tous les candidats qui réfléchiss­ent à l’élection présidenti­elle se disent que c’est un endroit où ils peuvent monter”, analyse Stéphane Fouks, vice-président d’havas et ancien conseiller de Dominique Strauss-kahn. Alors qu’ils n’ont pas grand-chose à lui dire? “C’est vrai qu’on n’arrive pas à faire autrement que des vieilles recettes, avec d’un côté des promesses politiques programmat­iques et un bénéfice direct pour la jeunesse, et de l’autre de la communicat­ion où vous essayez de partager le langage du réseau. Et quand les deux sont assez disjoints, c’est gênant”, constate Robert Zarader, communiqua­nt proche de François Hollande et d’emmanuel Macron.

Le verlan contre Madonna

La thématique du “vote jeune” remonte à loin, mais pas tant que ça. Elle apparaît en réalité pour la première fois lors de l’élection présidenti­elle de 1981, après que l’âge du droit de vote a été abaissé de 21 à 18 ans en juillet 1974 par Valéry Giscard d’estaing. Cela coïncide avec l’après Mai-68, le moment où les enfants du baby-boom entrent à l’université. “D’un coup, la France compte plus d’étudiants que de paysans, et les problèmes de la jeunesse deviennent les problèmes du pays”, resitue Pierre Kanuty, élu socialiste et fin connaisseu­r des mouvements étudiants de cette période. “L’université est un endroit

où on se forme à la citoyennet­é, ajoute enfin Julien Dray, alors vice-président de L’UNEF-ID. La politisati­on de la jeunesse est alors très forte, la question ne se pose pas, c’est l’époque des combats.” Et à l’époque, à gauche, c’est surtout au syndicat étudiant que ça se passe. “Quand on voulait parler à la jeunesse, on savait par qui il fallait passer”, ajoute le “baron noir”, même s’il faut aussi compter sur les organisati­ons de jeunesse des partis: la Jeunesse communiste et les Jeunes socialiste­s à gauche, le Mouvement des jeunes giscardien­s à droite. Pour autant, la relation politique-jeunesse n’est pas uniquement descendant­e. Au contraire: “Cette jeunesse de gauche politisée n’a pas eu besoin d’être ‘draguée’ par Mitterrand, complète l’ancien premier secrétaire du Parti socialiste Jean-christophe Cambadélis, président de L’UNEF-ID entre 1980 et 1984. On ne s’adressait pas à la jeunesse, c’est plutôt la jeunesse qui s’adressait au monde adulte.” Pour cette première fois, nul besoin de faire “jeune”. Face à Giscard, qui leur a pourtant donné le droit de vote, Mitterrand apparaît, sur le fond, comme le candidat naturel des jeunes, de l’avenir, d’un profond changement de société, qui comprend, entre autres choses, l’abolition de la peine de mort. Dans une élection serrée comme celle-là, “dans laquelle le vote Mitterrand décroît avec l’âge des électeurs, le vote jeune a été déterminan­t”, observe Stéphane Fouks. En 1984, SOS Racisme est créée avec la bienveilla­nce de l’élysée, alors que des crimes racistes alimentent la chronique en France et que le Front national monte. L’organisati­on est capable de mettre un million de jeunes sur la place de la Concorde le 15 juin 1985 lors de la “Fête des potes”, une série de concerts jusqu’à 5h du matin, diffusée sur TF1. La relation avec le pouvoir fonctionne bien: “Mitterrand ménageait les ‘orgas’ de jeunesse. Jamais il ne nous donnait d’ordre ni ne nous négligeait. Il nous recevait tout le temps. La jeunesse avait aidé à l’élire et il avait besoin de nous”, rejoue Julien Dray. Craint-il de la perdre un jour? Peu à peu, le président socialiste se sent en tout cas obligé de rajeunir sa com. Le 28 avril 1985, dans l’émission

Ça nous intéresse, monsieur le président, la star du

JT Yves Mourousi lui lance, devant 19 millions de téléspecta­teurs: “Vous savez ce que c’est, ‘chébran’?” Réponse: “‘Chébran’, ça veut dire branché, mais c’est déjà un peu dépassé, vous auriez dû dire ‘câblé’.” Tout cela a été “hyper-préparé”, remet aujourd’hui le communiqua­nt Frank Tapiro, qui s’extasie encore: “En une phrase, il a ringardisé tous les autres.”

Est-ce ce jour-là qu’en politique, la communicat­ion a vraiment commencé à l’emporter sur le fond?

Que “les jeunes” sont devenus un concept, une catégorie marketing, que l’on a pensé pouvoir séduire simplement en parlant leur langue et en s’affichant au bras de leurs idoles? La campagne de 1987-88 offre en tout cas un florilège d’exemples en la matière: du côté de Mitterrand, alors que

Jacques Séguéla invente le slogan “Génération Mitterrand”, Tapiro, qui a intégré son équipe en tant que stagiaire, a l’idée de miser sur la popularité du chanteur Renaud. Un jour, il propose cette autre formule, sur le ton de la blague: “Tonton, laisse pas béton.” “Il se passe un truc aberrant, Séguéla trouve ça formidable et c’est parti”, se remémore Tapiro. À droite, Jacques Chirac tente en réponse un move en direction de la jeunesse: une rencontre avec Madonna en août 1987, l’annonce d’une baisse de la TVA sur les disques et des interviews, notamment à Podium, où il pose casque de Walkman sur les oreilles, puis à Paris Match, où Claude Chirac raconte que son père a “craqué” pour la chanteuse. Le Matin titre alors “Rocking Jacques”. Aujourd’hui, son fidèle lieutenant Jean-louis Debré tranche: “C’était surfait. Ça ne parlait qu’à une partie des gens, c’était bobo.”

Et surtout, c’était raté. Une nouvelle fois, les jeunes voteront massivemen­t Mitterrand, qui recueiller­a 36,5% de leurs voix au premier tour et 60% au second. C’est la dernière fois, pourtant, que le vote des jeunes sera décisif.

“Depuis 1988, celui qui arrive en tête chez les vieux l’emporte systématiq­uement”, résume Frédéric Dabi, de L’IFOP, auteur de La Fracture, une longue enquête sur la jeunesse française d’aujourd’hui. Un phénomène qui s’explique notamment par l’abstention: lors de la dernière élection présidenti­elle, en 2017, ils sont 34% parmi les 18-24 ans à ne pas être allés voter, contre 19% chez les seniors. Après Mitterrand, rares sont ceux qui se sont imposés comme les candidats naturels des jeunes et à obtenir un tel plébiscite. Sauf, peutêtre, Ségolène Royal, qui lors du second tour de mai 2007 perdu face à Nicolas Sarkozy, avait rassemblé 58% des voix des 18-24 ans. C’est d’ailleurs sa facilité à s’adresser à eux qui lui avait permis de lancer sa campagne et de l’emporter à la surprise générale à la primaire socialiste en 2006, face à Laurent Fabius et Dominique Strauss-kahn. Peu avant, en avril, Royal s’était affichée avec Jamel Debbouze et Diam’s sur le plateau du Grand Journal de Canal+. La rappeuse s’était lâchée: “Plus ça va, plus je me dis que ce serait vachement chouette que ce soit vous.” “Ce n’était pas prémédité”, feint aujourd’hui Sophie Bouchet-petersen, la conseillèr­e politique de Royal à l’époque. Mais la stratégie de la candidate envers les jeunes ne s’arrête pas là. “Très consciente de la crise de la représenta­tion”, dixit son ancienne conseillèr­e, elle ne veut surtout pas se laisser enfermer par le vieil appareil socialiste. Elle crée Désirs d’avenir et la Ségosphère, deux structures dont elle confie les sites internet à des geeks. Parmi eux, Benoît Thieulin, alors militant des libertés numériques: “C’est une histoire méconnue mais à l’époque, toute une génération d’activistes demandait un moratoire sur les peines pour télécharge­ment illégal qui visaient des jeunes sans le sou. C’est la seule candidate qui nous avait écoutés, alors on a fait sa campagne numérique.” Dans les faits, cela donne, peu de temps avant l’explosion de Facebook, deux sites

“La jeunesse ne vous fait pas gagner une élection, mais si vous la perdez, c’est terminé pour vous. Parce qu’elle vous donne un dynamisme” Philippe Moreau Chevrolet, patron de MCBG Conseil

participat­ifs très actifs avec de nombreux blogs, des forums et un système d’adhésion où “tout le monde pouvait s’inscrire, adhérer gratuiteme­nt, trouver son référent local et faire des actions rapides et décentrali­sées. Comme un petit air d’en marche avant En marche”, rejoue Laurent Grave-raulin, dans l’équipe à l’époque. Celui-ci est convaincu que si Ségolène Royal s’était connectée à la jeunesse pendant cette campagne, c’est parce qu’elle s’était saisie des bons sujets comme “l’écologie, la France métissée, la démocratie participat­ive” et “exprimait un ras-le-bol face à une démocratie représenta­tive vieillissa­nte”. Le meeting de Charléty du 1er-mai avant le second tour, qui verra des jeunes escalader les barrières du stade pour rentrer, paraît aujourd’hui un souvenir d’une époque lointaine.

Il n’y a guère que la campagne de Jean-luc Mélenchon en 2017, grand vainqueur chez les jeunes au premier tour (30% des 18-24 ans) et qui s’arrêtera à 600 000 voix du second tour, pour raconter sensibleme­nt la même histoire, avec une stratégie très rodée et avant-gardiste de campagne sur les réseaux sociaux et Youtube. “Notre spécificit­é par rapport aux autres, c’est qu’on n’essayait pas de faire de la com, mais de l’info”, précise Antoine Léaument, qui s’occupait déjà de la communicat­ion digitale du candidat. Ainsi, La Revue de la semaine, qui existe encore et dans laquelle Mélenchon commente l’actualité, cumulera 20 millions de vues sur la campagne. “On a toujours considéré que la jeunesse était un espace à travailler pour nous et elle le sera encore en 2022. On va essayer de lutter contre l’abstention et de parler aux primo-votants”, annonce Manuel Bompard, directeur de campagne. Le tout sans évoquer les “sujets jeunes”, une erreur selon lui: “On pense que lorsqu’on parle à la jeunesse, il faut lui adresser les grandes questions du pays et du monde –la VIE République, l’écologie, le féminisme, le partage des richesses–, et pas seulement le Crous et les bourses.” La campagne a bien entendu aussi eu son lot d’opérations de com un peu gênantes, censées rajeunir et moderniser “Méluche”: les meetings avec l’hologramme du candidat et le jeu Fiscal Kombat, dans lequel il se bastonnait contre des oligarques.

Un enjeu d’image

Pourquoi se donner tout ce mal? C’est que, malgré leur taux d’abstention et leur faible poids dans les urnes, les jeunes restent un enjeu d’image fondamenta­l. “La jeunesse ne vous fait pas gagner une élection, mais si vous la perdez, c’est terminé pour vous, résume Philippe Moreau Chevrolet, patron de MCBG Conseil. Parce qu’elle vous donne un dynamisme.” Pour preuve, il évoque le débat de Jacques Chirac avec la jeunesse du 14 avril 2005 sur TF1, au moment du référendum sur le traité constituti­onnel européen. L’émission promettait de faire débattre le président à l’élysée avec 83 jeunes de 18 à 39 ans. Deux heures pénibles pour Chirac qui se termineron­t par un étonnant moment de sincérité de sa part, quand il avoua que le “pessimisme” de ces jeunes lui avait fait “de la peine”. “Je ne le comprends pas”, ajouta-t-il. Chevrolet: “Là, il a réalisé qu’il avait perdu cette bataille électorale et que c’était fini pour lui.” Une leçon retenue par son dauphin, Alain Juppé, 70 ans. En 2017, le candidat à la primaire de la droite, pourtant haut dans les sondages, essaie de se rajeunir en faisant du “beer-pong” dans un pub de Pigalle entouré de Jeunes avec Juppé, sur fond de “Il est des nôtres, il l’a bu cul sec comme les autres” –une vidéo relayée sur sa chaîne Youtube. Sans effet.

En vue de la prochaine présidenti­elle, Emmanuel Macron, pour qui 23% des électeurs entre 18 et 24 ans avaient voté en 2017 (moins que Mélenchon, mais plus que les 21% de Marine Le Pen), n’a, lui, cessé de creuser ce sillon. Avec toujours cette double tactique mesures/communicat­ion. Le Pass culture, le plan “un jeune, une solution” et le contrat d’engagement furent les mesures politiques ; l’interview donnée fin décembre 2020 à Brut et le concours d’anecdotes

En 1985, devant 19 millions de téléspecta­teurs, Yves Mourousi demande à François Mitterrand: “Vous savez ce que c’est, ‘chébran’?” Réponse: “‘Chébran’, ça veut dire branché, mais c’est déjà un peu dépassé, vous auriez dû dire ‘câblé’”

organisé en mai dernier avec les youtubeurs Mcfly à Carlito à l’élysée furent les moments de communicat­ion. Les jeunes, une niche de plus dans la stratégie de “communicat­ion sectoriell­e” du président de la République, comme la théorise Stéphane Fouks? “En efficacité électorale, c’est malin, embraye un ancien élu macroniste. En validation de l’état de la société, c’est dangereux. Chacun parle à sa niche et plus ça va, plus les niches sont fines. La politique ne pose pas le débat au bon niveau.” Fini les grand-messes nationales. Chaque classe d’âge ou sociale a désormais son média et attend donc son discours, et Emmanuel Macron l’a compris mieux que personne. C’est ainsi qu’il assouplit très légèrement son propos en fonction de ses interlocut­eurs. Chez Brut, par exemple, il reconnaiss­ait qu’il y a “des membres de la police qui ont des comporteme­nts violents qu’il faut pouvoir traquer et sanctionne­r”. Le 7 mars 2019, lors d’une étape du grand débat, il avait pourtant affirmé: “Ne parlez pas de ‘répression’ ou de ‘violences policières’, ces mots sont inacceptab­les dans un État de droit.” Autre exemple: lors du fameux concours de vraies et fausses anecdotes avec Mcfly et Carlito, ce dernier raconte le jour où il s’est fait arrêter par des policiers alors qu’il venait de fumer un joint. Le président sourit et ne dit rien. Une réaction loin de sa politique en la matière. “Je ne l’ai pas trop bien compris, ce passage. On ne peut pas rigoler, avoir une forme de laxisme sur la question quand Darmanin explique que fumer un joint, c’est contribuer au terrorisme”, soupire un poids lourd de la majorité. Philippe Moreau Chevrolet: “Emmanuel Macron veut tout faire pour éviter que la jeunesse sorte dans les rues. Il ne veut pas non plus que les images des étudiants qui font la queue devant des banques alimentair­es deviennent celles de la jeunesse en France, d’où ce saupoudrag­e budgétaire assez ciblé et sa com. Mais c’est comme ça depuis des décennies avec la jeunesse, et ce sera comme ça tant qu’elle ne votera pas davantage.” À moins que le personnel politique ne prenne le problème à l’envers: n’est-ce pas en considéran­t la jeunesse comme un concept à la fois flou et uniforme et une cible publicitai­re qu’il manque de l’intéresser? “Le fait de considérer que parler à la jeunesse est au mieux un investisse­ment incertain est le signe de l’acceptatio­n de notre déclin, se désespère ainsi Raphaël Glucksmann, qui vient de sortir Lettre à la génération qui va tout changer. Cela crée un sentiment d’impuissanc­e, c’est ce contre quoi je me bats.” “Sondeurs et communican­ts vous disent tous la même chose: on a intégré le fait que les vieux décident. Ça me fascine”, monte en pression Jean-christophe Cambadélis. À tel point qu’on pourrait se demander aujourd’hui si le fait d’essayer de faire jeune ne serait pas juste devenu une façon pour les candidats de se moderniser à peu de frais aux yeux de leur électorat senior. Une chose est sûre, la campagne ne changera pas des précédente­s sur ce point, et les paris sont d’ores et déjà ouverts: aura-t-on droit, comme en 2017, aux playlists des candidats (Benoît Hamon avait publié la sienne)? À de nouveaux passages chez Konbini, comme ceux d’hamon et de François Hollande en avril 2017, qui tentait alors de “raccrocher les jeunes”?

Son conseiller Gaspard Gantzer rit jaune: “Les gens se sont moqués de nous mais le fait est qu’aujourd’hui, tout le monde y va, tout le monde le fait.” Après tout, peu importe si cela sonne faux et si les jeunes n’écoutent pas: l’important, c’est que le reste de l’électorat, lui, y croie.

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France