SUMMER OF LOVE
“Je crois que beaucoup de personnes aujourd’hui vont à des festivals pour se sentir libres”, avance le photographe anglais Tom Hunter, dont les nus capturés pendant les dernières éditions pré-covid du festival de Glastonbury constituent une ode revendiquée aux grands rassemblements hippies des années 1970. Ce nostalgique des modes de vie alternatifs prend son premier shoot de contre-culture à Stonehenge (voir p.48) au début des années 1980, lors d’un festival freak gratuit où il se rend en stop après avoir séché l’école: “C’était une expérience incroyable, il y avait des groupes comme Hawkwind, des gens nus qui dansaient, des drogues, tout un monde parallèle qui s’ouvrait à moi.” Imprégné des récits peace and love de sa mère, qui assista dans sa jeunesse au mythique festival Isle of Wight, ainsi que de son propre passif de baroudeur cosmique (“J’ai vécu dans un bus pendant les années 1990 et traversé l’europe en y organisant des free parties”), Hunter décide alors, en 2017, de faire revivre à sa façon l’esprit originel de Glastonbury. Son idée? Une cabine photo fabriquée de bric et de broc, destinée à accueillir celles et ceux prêts à “ressentir l’amour généré pendant le premier Summer of Love à Woodstock”. “Une fille a pleuré après la séance, en disant que c’était une expérience incroyablement libératrice”, confie le photographe, qui explique sans trace d’ironie avoir choisi ses modèles parmi la foule de festivaliers “pour leur façon de s’habiller et leur aura”. Dans le contexte d’un festival aux allures de parc d’attractions boomer –l’apparition récente de Paul Mccartney en duo “virtuel” avec John Lennon pose certaines questions– et globalement mainstream, la démarche d’hunter ne participerait-elle pas du même phénomène de récupération des révoltes passées? “C’est facile d’être cynique, rétorque l’intéressé. Je crois que mes modèles viennent tous d’horizons différents.” Avant de juger utile de préciser: “Si Glastonbury est un parc d’attractions géant, alors c’est un parc d’attractions géant sous drogues.” Peace, dude.
Voir: “Where Have All the Flowers Gone”, à la Martin Parr Foundation, à Bristol, jusqu’au 10 juillet 2022.