Society (France)

L’été, c’est la liberté pour nos vaches, pour nous, pour tout le monde!

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Les génération­s d’éleveurs laitiers défilent, mais une tradition perdure: la transhuman­ce. Dans le Beaufortai­n, où Caroline Frison élève son troupeau, on préfère parler de “montée en alpage”. Quoi qu’il en soit, tous les étés, elle emmène ses vaches pâturer en altitude, où l’herbe est bien fraîche et grasse. Une coutume qui présente plus d’un bienfait pour la qualité du lait et le bien-être animal, mais qui n’échappe pas aux effets du changement climatique.

En tant qu’éleveuse de vaches laitières, à quoi ressemble votre quotidien?

Je travaille dans une exploitati­on familiale qui existe depuis cinq génération­s! Nous sommes trois associés –ma mère, mon père et moi– et nous avons 85 vaches laitières, en plus de nos génisses et de nos veaux. Lorsqu’on monte en alpage, les journées sont rythmées par les traites. La première est vers 4h30. Dans la matinée, on s’occupe de l’entretien des pâturages, on surveille le troupeau. À midi, on s’autorise une sieste puis on repart sur une traite. Notre lait est ramassé deux fois par jour pour être transformé dans une coopérativ­e. C’est une chaîne donc on doit attaquer tôt, au risque de mettre en retard les fromagers. Cela paraît un peu rébarbatif, mais en réalité, c’est tous les jours différent, car nous travaillon­s avec du vivant.

Comment parvenir à nouer une relation de confiance avec vos bêtes?

Dès que les veaux naissent, il faut sans cesse les bichonner, leur donner des petits noms et des gourmandis­es pour qu’ils nous reconnaiss­ent. Le gros sel, c’est comme un bonbon pour les enfants, ils adorent ça! Nous avons besoin d’elles, donc c’est important de leur montrer que nous sommes aussi là pour elles. Je n’aimerais pas avoir des vaches trop sauvages, j’aime les vaches très collantes et qui aiment les câlins.

Quels sont les bienfaits de la montée en alpage?

C’est la vie au grand air! L’été, de juin à octobre, c’est la liberté pour nos vaches, pour nous, pour tout le monde. Notre alpage se trouve entre 1 600 et 2 300 mètres d’altitude. Cela nous fait gagner en surface et en qualité de l’herbe. Elle est plus fraîche, ce qui permet une qualité et une quantité de lait supérieure­s. Pour nous, c’est une période assez atypique. Nous montons toutes nos affaires pour habiter dans un chalet à l’alpage. C’est fatigant, mais si je pouvais vivre ces quatre mois d’été le reste de l’année, cela m’irait complèteme­nt!

Cette tradition a-t-elle aussi un impact positif sur la biodiversi­té?

Sur l’alpage, les vaches mangent l’herbe à mesure de la pousse. Tous les matins et tous les soirs, on leur ouvre une petite partie d’herbe fraîche, donc elles ne restent jamais sur la même parcelle et cela évite le piétinemen­t. C’est très important pour régénérer la flore. En plus, cela permet de garder les paysages ouverts. Ainsi, les touristes peuvent profiter des beaux chemins de randonnée et venir voir notre travail.

Cet été fut très chaud. Votre troupeau en a-t-il souffert?

Une bonne gestion des ressources est primordial­e, et on s’en aperçoit d’autant plus avec le changement climatique. Si les bêtes ne sont pas suffisamme­nt abreuvées, cela peut avoir des conséquenc­es terribles. J’ai la chance d’avoir eu un grand-père et un père assez visionnair­es sur le sujet. Ils ont beaucoup travaillé sur des systèmes de captage pour stocker l’eau qui provient de la pluie et de la neige. Heureuseme­nt, à 1 800 mètres d’altitude, la canicule s’est moins fait sentir. Mais nous avons tout de même noté une baisse de la production laitière, signe que les vaches ont souffert de la chaleur.

Mi-octobre vient le moment du retour à l’étable. Comment cela se passe-t-il?

Pendant l’été, nous embauchons un employé qui reste dans la vallée et s’occupe de couper l’herbe, la faire sécher et en faire du foin pour l’hiver. Quand on redescend de l’alpage, il y a une période de transition. Les vaches broutent l’herbe fauchée autour du bâtiment. Lorsqu’il ne reste plus rien, la période hivernale en intérieur peut commencer. Jusqu’à l’été suivant!

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