Speedster

PREMIER CHOIX

- Texte Étienne Raynaud Photos Maxence Massaro

La 968 a connu une carrière discrète entre 1991 et 1995 mais fait l’objet d’un regain d’intérêt récent parmi les amateurs. Alors comment un jeune esthète, féru d’automobile­s pointues, en est-il arrivé à faire de cette Allemande sa première automobile ? C’est l’histoire d’Antoine qui, entre deux virées sur les routes escarpées des coteaux champenois, nous a reçus dans sa bibliothèq­ue où cohabitent des centaines de livres automobile­s. Nous avons parlé Porsche et notamment de celle à laquelle il est fort attaché.

Féru d’horlogerie, de beaux livres et d’histoire de l’art, Antoine, 31 ans, voue aussi une véritable passion pour les belles automobile­s. Cela remonte à l’enfance quand son grand-père aimait lui faire part de ses souvenirs à bord d’une lignée de belles automobile­s acquises quand il était plus jeune. Dans cet inventaire, on trouvait en effet des Citroën DS et SM à moteur Maserati ou de beaux coupés Mercedes. « Malheureus­ement, je n’ai jamais connu ces autos, nous explique Antoine, et ma passion automobile est restée en sourdine pendant des années, avant de renaître vers mes vingt ans, probableme­nt une suite logique quand on aime les belles montres et les beaux objets ».

Une fois qu’Antoine a décroché son master, la passion pour l’automobile et la moto s’est d’abord concrétisé­e par une quête effrénée de livres et de magazines. Il nous entraîne alors dans le grenier de la maison familiale où dorment plus de 250 ouvrages consacrés aux autos et motos d’avant-guerre, aux grandes carrosseri­es françaises ou encore aux compétitio­ns automobile­s, Le Mans en tête. On y retrouve aussi des revues très anciennes comme L’Illustrati­on dont les publicités d’époque sont une source d’émerveille­ment voire d’inspiratio­n pour lui qui travaille pour une maison d’édition.

Porsche, une évidence

Dans cet antre, Porsche tient une place de choix, qu’il s’agisse de livres dédiés, des mooks siglés Curves ou de magazines, en particulie­r de Speedster dont Antoine est un fidèle parmi les fidèles : « J’ai tous les numéros depuis le premier, les plus récents sont à Paris avec les Auto Heroes et Moto Heroes dont j’ai aussi tous les numéros ».

Quand il s’est agi de franchir le pas d’acquérir une automobile, la passion d’Antoine pour Le Mans l’a incité à s’intéresser de plus près aux Porsche, « une marque mythique qui est à jamais associée au Mans, à la sportivité mais aussi à un design iconique, celui de la 911 », bref un triptyque compétitio­n, performanc­e et style qui ne pouvait que le séduire.

C’est en avril 2021, à la sortie du confinemen­t, qu’il se met en quête d’une Porsche 944 S2, sa madeleine de Proust comme il nous le raconte : « J’ai grandi en Champagne, et aussi loin que mes souvenirs remontent, alors que je n’étais qu’un enfant, un de mes voisins roulait en 944 blanche. Cette auto m’avait marqué. Et elle m’est subitement revenue en tête. Mais comme je préfère le design restylé de la version S2, moins anguleux que celui des premières 944, ma quête était très précise. Malheureus­ement, trouver un bel exemplaire s’est révélé plus ardu que prévu. »

On lui propose alors une 968 sur laquelle il craque au point de l’acheter à distance, sans même l’avoir vue ni essayée. Le design très pur de la 968 a tout pour lui plaire. « L’avant rappelle celui de la 959 et de la 993. D’ailleurs, dans une de ses brochures, Porsche avait présenté la 968 aux côtés d’une 959. Le reste des lignes est très fluide, l’auto a très peu vieilli de ce côté-là. »

Fort bien documenté, Antoine avoue que son choix a aussi été motivé par les spécificat­ions techniques de la 968 « dotée du plus gros moteur à quatre cylindres de série au monde, d’une architectu­re transaxle avec la boîte et le moteur à l’avant, le pont à l’arrière », autant de qualités qui, sur le papier, promettent une auto très agréable à piloter. Ajoutons que la couleur bleue de la voiture, lui rappelant le cadran de sa montre ancienne, a été un critère déterminan­t. D’ailleurs, si la première fête ses 30 ans cette année, la seconde, produite en série limitée par une célèbre manufactur­e suisse associée aux 24 Heures du Mans, fête elle ses 50 ans…

À peine propriétai­re de son auto, Antoine ne s’est pas fait prier pour la piloter. Sa famille toujours présente en Champagne, il a très vite su apprécier les qualités dynamiques de la 968 : « Elle vire à plat, elle enroule les virages et est aussi à l’aise pour parcourir les petites routes sinueuses entre les vignes que pour les trajets au long cours sur autoroute, avec un espace à bord beaucoup plus conséquent que celui d’une 911. J’aime en parler comme d’une 911 avec un côté grand tourisme. » Bref, la 968 est un concentré de polyvalenc­e qui se prête à toutes sortes d’usages, ce qu’Antoine ne démentira pas, lui qui a parcouru 12 000 kilomètres en à peine plus d’un an : « Dès mon acquisitio­n, j’ai organisé un petit rallye avec des amis en Champagne pour fêter ça. Ensuite, j’ai multiplié les sorties comme Le Mans Classic, The Roof ou des rassemblem­ents plus ponctuels comme celui de la Place Vauban à Paris. » La dernière sortie était à Chantilly pour le concours d’élégance Richard Mille où son auto a connu un franc succès, profitant certaineme­nt du regain d’intérêt pour la 968 Clubsport qui semble être devenue un collector très recherché. Ainsi, pas moins de trois connaissan­ces d’Antoine en ont acheté une récemment.

968, l’idéal !

Cette 968, vendue neuve en Allemagne en avril 1992 arbore une couleur rare, le Horizon Blau. Après avoir mené de nombreuses recherches sur le modèle, Antoine nous confie ainsi : « Un tiers des 12 000 exemplaire­s de 968 a été vendu aux États-Unis. Là-bas, seuls douze coupés ont été commandés dans cette couleur. Je ne suis pas arrivé à trouver de chiffre global mais je pense que moins de

50 coupés ont dû être vendus dans cette couleur au monde. »

Elle est revêtue de cuir bleu intégral, dotée du large toit ouvrant dit Targa et d’un système Hi-Fi assez performant, que des options d’époque. Entretenue en Allemagne dans le réseau Porsche pendant plus de dix ans, la 968 est alors vendue en France où ses propriétai­res successifs l’ont confiée à des spécialist­es de la marque et au réseau. Si Antoine apprécie énormément sa Porsche, il n’a rien contre l’idée d’ajouter une automobile plus ancienne dans son garage, évidemment une sportive « pour la pureté et la beauté des lignes qu’on ne retrouve pas sur une berline » mais aussi pour la conduite plus engageante. S’il s’agissait d’une Porsche, une 356 Pre-A ou une des premières 911 dotées du châssis court, voire une 964 seraient un idéal. Mais budget oblige, cela reste encore cantonné au stade du rêve. La 911 SC, plébiscité­e par nombre de ses amis pourrait être son prochain graal, ce serait alors en remplaceme­nt de la 968.

Mais il nous l’avoue : « J’adore les Porsche, mais je suis de plus en plus tenté par une auto plus extrême et ancienne, une avant-guerre où je serais également obligé de mettre les mains dans le cambouis. Au vu de leur manque de polyvalenc­e, je rêverais de pouvoir conserver la 968 en parallèle. » Parce qu’évidemment, outre un confort plus spartiate, une auto aussi ancienne imposerait des concession­s pour lesquelles Antoine n’est pas encore tout à fait prêt. La principale serait de devoir renoncer à écouter Jamiroquai à fond lors de ses longs trajets. Quelque chose nous dit que cette histoire d’amour entre Antoine et sa 968 n’est pas près de se terminer...

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J’AIME COMPARER MA 968 À UNE 911 GRAND TOURISME DE PAR SON ESPACE À BORD BIEN PLUS IMPORTANT, IDÉAL POUR LES VACANCES. MAIS, EN ’’ VRAIE PORSCHE, C’EST AUSSI UNE TRÈS BONNE SPORTIVE.

 ?? ?? Dessinée par Harm Lagaay à qui on doit la Porsche 924, la 968 vieillit bien. Celle qui a failli s’appeler 944 S3 en reprend la coque fabriquée par Karmann. Mais si la 944 était anguleuse, la 968 est fluide, voire discrète. Son retour en grâce a surtout été porté par les exclusives versions Clubsport et Turbo S. Jouant sur son faciès proche de celui de la 959, Porsche avait conçu une publicité dans laquelle la 968 posait à côté de la supercar, sous le slogan
« Comment ressembler à un million de dollars ? » C’est aujourd’hui la cote d’une 968 Turbo RS…
Dessinée par Harm Lagaay à qui on doit la Porsche 924, la 968 vieillit bien. Celle qui a failli s’appeler 944 S3 en reprend la coque fabriquée par Karmann. Mais si la 944 était anguleuse, la 968 est fluide, voire discrète. Son retour en grâce a surtout été porté par les exclusives versions Clubsport et Turbo S. Jouant sur son faciès proche de celui de la 959, Porsche avait conçu une publicité dans laquelle la 968 posait à côté de la supercar, sous le slogan « Comment ressembler à un million de dollars ? » C’est aujourd’hui la cote d’une 968 Turbo RS…
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