La chasse aux sorcières
Et si on arrêtait de faire n’importe quoi ?
Dans la série bad buzz, la cosméto fait le plein. Juste derrière Laurent Wauquiez mais quand même devant les chips Lay's « réservées aux femmes ». Parabènes, silicones, filtres solaires... Depuis le passage à l’an 2000, des actifs utilisés passent au bûcher du tribunal populaire, parfois à raison mais souvent sans raison. « En cosmétique, il n’y a pas de syndrome du Galaxy 7 », insiste Jean-claude le Joliff, cosmétologue et président de la Cosmétothèque. En effet, avant de s’incruster dans une formule, un ingrédient doit se cogner une batterie de tests d’innocuité qui feraient passer le concours de L’ENS pour une partie de sudoku. « Ces scandales font bouger l’industrie, en la forçant à se renouveler et surtout en imaginant des modes de fabrication plus raisonnables pour l’environnement », tempère-t-il. Une petite mise à plat, histoire de calmer votre parano délirante.
SUR LE FEU : LES PARABÈNES
Ces conservateurs sont présents dans les formules contenant de l’eau (crème, shampooing, capillaires...), comme dans la plupart des médicaments et la nourriture.
Le procès : 2003, Philippa Darbre, professeure en sciences biomédicales à l’université de Reading, analyse vingt biopsies de tumeurs du sein. Dix-huit d’entre d’elles contiennent des traces de parabènes. Ça fait peur ? Oui. Des liens de cause à effet ont été établis ? Non.
Pourquoi il faut vous calmer : « On les accuse de perturber le système endocrinien mais cet effet est bien moindre à celui du soja », souligne Céline Couteau, maître de conférences à l’université de Nantes et co-créatrice du blog Regard sur les cosmétiques. Les labos ont cherché à les remplacer par d’autres conservateurs sur lesquels il y a moins de recul ou qui se sont avérés hyper-allergisants (comme les MIT qui ont déclenché une levée de boucliers chez les dermatos).
SUR LE FEU : LES PEG
Les polyéthylènes glycols sont des polymères humectants, qui préservent les formules du dessèchement, et la peau par la même occasion.
Le procès : plus que le fait que ce soit des dérivés de matière plastique, c’est leur procédé de fabrication qui est pointé du doigt. À raison : c’est l’un des plus polluants du game et leur biodégradabilité est en RTT. Et pour couronner le tout, ils seraient plus irritants que Cyril Hanouna.
Pourquoi il faut vous calmer : appliqués à très haute dose, ils irritent les peaux abîmées. Ce qui n’arrive quasiment jamais. À tel point qu’ils sont également présents dans les formules des médicaments topiques.
Post-it mental : si votre conscience écologique vous agite, alors oui, boycottez-les (vous en profiterez aussi pour jeter vos chaussures en pétrole fabriquées par des enfants séquestrés dans des caves).
SUR LE FEU : LES SILICONES
Leurs noms se terminent par -silane, -siloxane, -thiconol, -ane et -one. Dérivés du sable ou du quartz, ils sont presque partout dans les soins, le make-up et les capillaires.
Le procès : ça n’est pas naturel, ça donne des pellicules, c’est indestructible, ça tue la peau, les cheveux, les oiseaux et le soleil.
Pourquoi il faut vous calmer : non occlusives et parfaitement inertes, ces molécules ne sont pas une menace épidermique. Leur pouvoir sensoriel (qui détermine le glissant et le velouté d’une crème) et cosmétique (l’effet chevelure de pub et le coup de blur sur le teint) est tel que les formulateurs des 90’s se sont lâchés comme si demain n’existait pas. « Aujourd’hui, il y a une plus grande parcimonie, par exemple les coiffants n’en contiennent plus que très peu », rappelle Jean-claude Le Joliff.
Post-it mental : leur durée de vie est une vraie question. Avec une biodégradabilité qui résiste à plusieurs centaines d’années, les silicones étouffent l’environnement.
SUR LE FEU : LA PARAFFINE
Cette huile minérale émolliente et assouplissante donne aussi de la viscosité aux galéniques.
Le procès : huile minérale = dérivé de pétrole = pétrole = Saddam Hussein. OK, ce raccourci n’est peut-être pas celui de votre cerveau mais en tout cas, vous savez bien que votre baume à lèvres contient de la paraffine parce qu’il fait partie d’une grande conspiration pour toujours plus vous dessécher la bouche et vous forcer à acheter plus de baumes à lèvres. Ça va pas fort vous.
Pourquoi il faut vous calmer : cet ingrédient est safe, inoffensif pour la santé (à tel point qu’il est utilisé en post-intervention chirurgicale, comme après une opération des intestins par exemple). « Il n’est absorbé ni par les muqueuses, ni par la paroi digestive », précise Céline Couteau.
SUR LE FEU : LES SULFATES
Les SLES, SLS et ALS sont des tensioactifs moussants, nettoyants, qui lient les phases huileuses et aqueuses des formules des shampooings et des gels lavants.
Le procès : il y en a dans le liquide vaisselle et jusqu’à preuve du contraire, vous n’êtes pas une assiette sale. Vous avez la peau qui gratte ? Les sulfates. Vous avez des allergies ? Les sulfates. Votre couleur est nulle ? Toujours les sulfates. Vos cheveux sont pourris ? Bref, vous avez compris...
Pourquoi il faut vous calmer : pour qu’ils irritent la peau ou le cuir chevelu, il faudrait vous doucher très souvent. « Or, nous ne sommes pas censés nous laver deux fois par jour », rappelle Cyrille Telinge, fondateur de la marque Novexpert. De toute façon, seulement 57 % d’entre vous prennent une douche tous les jours selon les derniers chiffres publiés par BVA. Alors chillax hein.
Post-it mental : leur haut pouvoir détergent altère quand même plus vite la tenue des colorations chimiques et des lissages.