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DÉPRESSION STRATOSPHÉ­RIQUE

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En libérant la parole sur la santé mentale, notamment dans les milieux militants, Twitter a permis une certaine dé-stigmatisa­tion de la dépression, mais pas toujours pour le meilleur. Comment les réseaux

sociaux ont-ils transformé le rapport à la santé mentale ? Pour Simone Fullagar, sociologue, professeur­e à l’université de Bath (Royaume-uni) et spécialist­e des questions de santé mentale, de genre et des usages féministes des réseaux sociaux : « La plupart des discours publics sur l’anxiété et la dépression ignorent les inégalités (de genre, de race, de sexualité). Les réseaux sociaux ont ouvert un espace où des conversati­ons plus critiques sur ces relations de pouvoir et leur rôle sur la santé émotionnel­le (des femmes notamment) pouvaient avoir lieu.» Mais cette libération de la parole n’est d’après la sociologue pas forcément sans risques. « Il y a un risque que la sphère publique soit saturée, d’une part, d’histoires de dépression qui font la part belle à l’expérience “personnell­e” de la souffrance et aux efforts individuel­s faits pour s’en sortir. D’autre part, d’histoires qui se concentren­t sur les explicatio­ns neuroscien­tifiques pour conférer une sorte de “sérieux” au problème. Perpétuer l’idée de la dépression comme pure et simple maladie, et/ou n’en faire qu’une affaire individuel­le, c’est prendre le risque d’ignorer les questions d’injustice et les forces sociocultu­relles qui façonnent nos vies émotionnel­les.»

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