Culturist

L’égalité femmeshommes n’est pas pour demain sur cette Terre, mais sur la Lune, peut-être.

Des idées pour se coucher moins bête

On ne sait pas qui est le premier à avoir fait le lien entre la durée du cycle de la Lune et celui de nos règles (« mensis » en latin > « mois lunaire » > « menstruation »), mais faut croire que c’est resté. Les femmes seraient « lunatiques ». Tout comme la Lune ne produit pas sa propre lumière mais reflète celle du Soleil, la femme s’inscrirait en double funèbre de l’homme doué de raison. Ce serait la Reine de la nuit de Mozart, bête et superstitieuse ; la déesse Hécate qui incarne la fertilité mais aussi le passage vers les enfers. L’immaculée conception porte un croissant de lune ; les ondines, âmes de

jeunes filles mortes, alpaguent les gentilshommes allemands la nuit. Inconstante, mystérieuse, la Lune est source de fantasmes et de peurs, l’attribut préféré des sorcières… et donc l’objet d’oeuvres pop formidables, de David Bowie à Pink Floyd. La fascination (et l’incompréhension) des hommes pour cet autre monde donne lieu à une expo géniale au Grand Palais. On démarre sur l’astre, avec la mission Apollo 11 qui largue Armstrong sur place. Déjà, on note que sur les douze astronautes qui ont piétiné ce gros symbole féminin, il n’y a pas une femme (le seul qui aura osé en envoyer une, c’est Fritz Lang dans son film La Femme sur la Lune). Pour moquer cette proto-colonisation spatiale déjà sexiste, Sylvie Fleury propose une fusée rose bonbon quand Aleksandra Mir invente le premier pas féminin sur une fausse lune (en fait une plage des Pays-bas). L’expo laisse ensuite le réel pour détricoter le spleen lunaire des poètes du XIXE siècle (Dieu qu’ils étaient tristes tous ces garçons qui pleurent à la lune !), et s’intéresse à ce que pourrait être la lune-utopie. Si la lune était vraiment le double inversé du soleil, la société qu’on y créerait serait-elle l’inverse de celle raciste, sexiste, discriminatoire que l’on connaît ? C’est l’utopie folle portée par Kader Attia, qui en fait un symbole de paix et de coexistence. Et si la Lune, c’était le grand Autre ? M.C.

La Lune, du voyage réel aux voyages imaginaires, Grand Palais, Paris-8e, jusqu’au 22 juillet.