Tampon!

Grégory Alldritt

- PAR DAVID-ALEXANDER CASSAN, À AUCH ET LA ROCHELLE PHOTOS: THÉOPHILE TROSSAT POUR TAMPON! ET ICONSPORT

Le troisième-ligne centre de l’équipe de France est un jeune homme posé à qui tout réussit. Une histoire tellement parfaite qu’elle en inquiète ses parents.

Avec sa bonne bouille de garçon timide à qui tout réussit, Grégory Alldritt s’est retrouvé catapulté en tête d’affiche d’une équipe de France enfin sexy en un temps record. Un scénario de film qui inquiète jusqu’à ses parents. Il était temps de percer le mystère.

“On est inquiets, avoue Martine Alldritt, moi je suis inquiète, hein. Je trouve que c’est tellement violent, tellement rapide, et il est tellement jeune… Il s’en sort bien, je crois, mais j’espère qu’il va arriver à gérer et pas se prendre pour un demi-dieu, parce que c’est tellement éphémère... Je lui redis tout le temps: moi ça m’inquiète beaucoup.” Martine et Terence Alldritt reçoivent dans une belle maison de ville près de la majestueus­e cathédrale Sainte-marie, à Auch.

Sur la place de la République, le marchand de foie gras finit cette drôle de saison sur une bonne note grâce aux préparatif­s de la Saint-sylvestre. Les Alldritt ont posé leurs masques sur la table en bois de la cuisine et la conversati­on démarre. S’ils s’inquiètent pour leur fils, c’est parce que tout va presque trop bien: figure de proue du XV de France de Fabien Galthié, “Greg” a été élu trois fois homme du match lors du dernier Tournoi, avec notamment un match déjà référence contre l’angleterre. À La Rochelle, il est co-capitaine des Maritimes avec Victor Vito et Romain Sazy, et l’équipe squatte le haut du classement du Top 14. Martine et

Terence savent très bien que tout cela peut s’arrêter du jour au lendemain, alors ils s’inquiètent de l’attention médiatique, du succès qui change les gens, de ces mensonges auxquels on finit par croire. Et pour calmer leurs angoisses, ils cherchent à comprendre. Comprendre pourquoi les projecteur­s se braquent sur leur fiston de 23 ans, pourquoi lui, pourquoi si tôt. Après tant d’années d’échecs, le rugby français cherchait une raison d’y croire et il a fallu que cela tombe sur leur fils.

Dans ce magma de doutes, il y a une autre question que les Alldritt ne comprennen­t pas: que l’on revienne encore sur les origines écossaises de Grégory. Quand on l’interroge sur le pays de son père, ce dernier, en garçon poli, répond, précise, réfute à l’occasion: “Moi je suis à 95% gersois, français, même si l’écosse fait partie de ce que je suis. À un moment donné, on en a tellement parlé qu’on aurait pu penser que j’étais né là-bas”, grogne-t-il avec un accent qui laisse peu de place au doute. Son frère Scott, de quatre ans son aîné, est ingénieur dans une entreprise de défense, à Édimbourg,

et parle un français aussi chantant que son cadet. “Moi on m’appelait Scottish, rigole-til sur Facetime. Mais c’était surtout à cause de mon prénom. Ce que je dis toujours à mes parents, c’est que dans le Gers on est les Écossais, mais il y a pas plus français que nous dès qu’on arrive ici.” Interviewé par le Daily Telegraph en mars 2020, avant Écosse-france, Scott repousse désormais les sollicitat­ions, lassé qu’on en “fasse des caisses” sur leur bi-nationalit­é. C’est que la trajectoir­e du benjamin des Alldritt, surnommé “Chicot” ou “La Chique” –la faute à des dents autrefois un peu de travers–, ne doit rien à l’héritage celtique de son géniteur. Certes, on parlait anglais à la maison et on fêtait souvent Noël dans les Highlands, mais c’est bien en terres gasconnes que Grégory a germé. Un autre Grégory, Menkarska, a assisté à l’éclosion. Il reçoit dans le bureau des entraîneur­s, aménagé sous l’une des deux tribunes du Stade Jacques-fouroux, à Auch. Ancien pilier du club de sa ville passé par le Stade Toulousain, il s’occupe aujourd’hui des avants du RC Auch, engagé dans le championna­t de France de Fédérale 1. La compétitio­n a été interrompu­e par le deuxième confinemen­t et l’homme aux oreilles de chou a du mal à vivre cette période incertaine. “D’habitude, soupire-t-il gentiment, tous les soirs je suis au rugby. Là je suis à la maison et c’est pas facile, pour nous ou pour la famille.” Ce soir, entre Noël et le Nouvel an, il s’est réfugié au bureau pour parler de ce troisième-ligne qu’il a entraîné entre ses 17 et 20 ans. “Greg Alldritt, c’est une énigme, commence Menkarska. Quand je les prends, je suis surpris qu’il soit capitaine de l’équipe parce que c’est pas le plus costaud, pas la plus grande gueule, mais il est posé, intelligen­t… Moi je passais de joueur à entraîneur et quand on fait le premier match, c’était lui qui me calmait, alors qu’il avait pas 18 ans! C’est en lui, ce truc de leader.” Ravi que son fils utilise une photo de “Greg Alldritte” –prononcé avec un “e”, à la gersoise– en fond d’écran, le coach auscitain apprécie surtout que l’internatio­nal passe le voir quand il est en ville, ou que son père fasse la queue comme tout le monde, à la fin de chaque été, pour prendre sa carte d’abonné au RC Auch.

Famille modèle et compétitio­n

Dans la famille, le rugby n’a pourtant pas toujours été une évidence. Martine a grandi à Condom, dans une famille plus portée sur les travaux agricoles que le jeu. Si Terence y a joué, il y a longtemps, dans un pensionnat en Afrique du Sud ou à l’école, en Écosse, “jamais on aurait pensé qu’un de nos fils deviendrai­t rugbyman profession­nel, jure Martine. Ça n’a même jamais été un sujet de discussion! Ils jouaient au rugby, ça faisait partie de leur éducation, mais le principal c’était les maths, les maths, les études…” Fille d’immigrés italiens, elle remercie l’école de lui avoir permis de choisir sa vie, mais aussi de rencontrer son Écossais de mari. “À Rome, peut-être parce que tous les chemins y mènent”, remarque Terence avec une pointe d’accent british. Lui rendait visite à sa soeur, installée dans la ville éternelle, Martine venait voir une amie et y avait trouvé un job d’été, à six mois de la fin de ses études d’économétri­e. Diplôme en poche, elle le rejoint à Amsterdam quelques années, avant qu’ils ne s’installent à Toulouse, puis, en 1994, à six kilomètres de Condom, le village de Martine, avec leurs garçons, Tom, Scott, et bientôt Greg (né en mars 1997). Là, Terence monte des chalets en bois massif de Finlande qu’on lui livre en kit, et ils ouvrent un “parc résidentie­l de loisirs”, quelque part entre le gîte et le camping. Un Sud-ouest de carte postale, et une famille modèle pour lui donner vie. “Quand les touristes arrivaient, rembobine Terence, on ne leur laissait pas les clefs pour la semaine: il y avait un repas d’accueil, des sorties VTT, des balades à pied et le jeudi, on faisait babysittin­g evening.” Martine remplit sa banane de Carambars, Terence sort la guitare pour faire chanter la petite compagnie au coin du feu, et les frères Alldritt grandissen­t en pleine nature, toujours dehors. “C’était très prenant, mais c’était un chouette projet familial”, se félicite Terence. La famille vit au rythme des vacances scolaires et se rend en Écosse l’hiver, alors qu’il fait un froid polaire à Aviemore, dans les Highlands. “Greg a été confronté aux autres très tôt, et a dû apprendre à les accepter avec leurs différence­s, les pousser où ils sont bons”, analyse Martine. Entre eux, en revanche, les trois frères ne font pas dans la compassion, à en croire Scott: “C’était la compet’ tout le temps et à tous les niveaux.” Et peu importe si Greg a sept ans de moins que l’aîné, Tom. “Si on faisait de la rando avec nos parents à la montagne, se souvient Grégory depuis une salle de réunion de l’apivia Parc, le centre d’entraîneme­nt ultramoder­ne du Stade Rochelais, je m’accrochais pour pas paraître comme le petit. Et puis j’avais deux très bons exemples, parce que c’était dur de faire mieux qu’eux, dans le rugby ou dans les études.” Le futur Rochelais saute le CP, trop pressé de lire avec ses frères, et garde un souvenir amusé des subtils coups de pression de sa mère, qui sortait leurs bulletins à chaque début de semestre.

Scott, incontesta­blement meilleur en maths, ne reconnaît qu’une petite victoire à son petit frère: “Là où il était fort, c‘était avec les quatre brebis qu’on avait à Condom: elles le reconnaiss­aient beaucoup plus que nous.” Savamment orchestrée par les parents, la compétitio­n se déporte sur les terrains.

Grégory Alldritt aurait pu ne jamais jouer au rugby. Il s’y met pour imiter son frère Tom, convaincu par le ballon ovale lors d’une foire des sports au stade de Condom. Avant cela, le premier sport des fils Alldritt est le judo. Parce que leur prof les pousse et qu’on leur a appris à “toujours faire les choses à fond”, les deux aînés vont jusqu’à la ceinture noire. L’art martial est réputé utile pour les combats d’avants en crampons, dans la maîtrise des contacts et des déséquilib­res, mais Greg arrête pourtant de fréquenter les tatamis un an après le déménageme­nt de la famille à Auch, en 2007.

Une bête incompatib­ilité horaire l’oblige à choisir entre les deux sports, et il n’hésite pas longtemps: petit, il dormait littéralem­ent avec un ballon ovale. Si les Alldritt regardent très peu la télé, ils

“Je suis à 95% gersois, français, même si l’écosse fait partie de ce que je suis. À un moment donné, on en a tellement parlé qu’on aurait pu penser que j’étais né là-bas”

Grégory Alldritt

ne ratent pas un match des VI Nations et une occasion de chanter Flowers of Scotland debout devant le poste. Bien sûr, le XV du Chardon déchante souvent après les hymnes, alors Grégory Alldritt se trouve quelque chose comme une idole. Elle s’appelle Imanol Harinordoq­uy. “Dans le secteur, situe Greg, tout le monde était à fond Toulouse. Donc pour me différenci­er, petit, j’ai choisi Biarritz, vu que leurs matchs de Coupe d’europe passaient sur France Télévision­s.” Un été, ses parents envoient Greg aux Stages Imanol Harinordoq­uy, au Parc des Sports d’aguiléra. “Je l’ai retrouvé sur les photos quand j’ai vu son nom ressortir, mais je me souvenais de lui, assure le Basque aux 82 sélections. Ils étaient une petite bande, à traîner toujours ensemble.” Parce qu’au rugby, Greg se fait surtout des copains. Paul Graou est de ceux-là: ils se rencontren­t à 10 ans, lorsque Greg commence le rugby à Auch, et vont au collège puis au lycée ensemble, à l’oratoire Sainte-marie. Dans le club de Jacques Fouroux, Alldritt en 8 et Graou en 9 peuvent compter sur des éducateurs comme Julien Sarraute, entraîneur de l’équipe première (aujourd’hui à Colomiers), Andrée Forestier, pionnière du rugby féminin, ou Stéphane Graou, père de, pilier internatio­nal et légende vivante du rugby gersois. Il paraît même qu’une fois, alors qu’ils étaient gamins, Graou avait prédit à son fils que le petit Alldritt jouerait un jour en équipe de France. Grégory Patat, troisième Greg de cette histoire et numéro 8 du FC Auch (ou “FÉCÉA”, pour les locaux), l’entraîne pour la première fois en moins de 13 ans. Sans faire de pronostics, il remarque quelque chose: “C’était un joueur doué techniquem­ent, qui aimait le rugby, mais il avait une relation particuliè­re aux autres, une capacité à transmettr­e, à aider, qui est rare à cet âge-là.” Les petits Auscitains enchaînent les titres de champions d’armagnac-bigorre, et quand ils sont conquis contre l’ennemi tarbais, ils chantent encore plus fort. Au fond du bus,

“La Chique” y va de son Flowers of Scotland et n’a plus de voix en rentrant à la maison. Pas toujours plus grand que les autres, il a une bonne raison de s’accrocher. “Quand on avait fini de jouer et qu’on allait voir jouer les Crabos ou les Reichel, se marre Paul Graou, tu savais qu’il y avait toujours un Alldritt en numéro 8, casqué. Et ils faisaient pas rire, hein, ils étaient costauds!” Si les frères Alldritt portent un casque, c’est depuis un match de Tom, à Condom, où un coéquipier avait percuté un plot en béton, au bord du terrain. Terence en a tiré une formule: “Jouer au rugby sans casque, c’est comme faire de la moto sans casque: c’est sympa, mais si vous tombez…”

Des copains et une meute

À l’unisson, les éducateurs qui ont eu Grégory Alldritt entre les mains vantent une partie de l’anatomie de leur poulain: un bas du corps qui lui permet de gagner tous ses duels. “Un beau cul, entre guillemets”, ose Greg Patat. En 2014, avec Paul Graou et le talonneur Pierre Bourgarit, arrivé de Gimont cette année-là, ils sont champions de France cadets de rugby à 7, comme leurs aînés d’un an, menés par les futurs internatio­naux Antoine Dupont et Anthony Jelonch. Quand Alldritt et ses copains montent en Crabos, leurs aînés viennent d’atteindre la finale du championna­t de France de la catégorie. “Le club avait pas trop d’espoirs en nous parce que la génération dorée, c’était celle d’avant. On avait zéro internatio­naux en jeunes, et sans dire ‘ bons vivants’, on ressemblai­t pas à grand-chose”, en rigole encore Graou Jr. Avec Alldritt, Bourgarit ou Nicolas Corato, aujourd’hui à la Section Paloise, les bons vivants font une première partie de saison mitigée, et il leur faut une phase retour canon pour accrocher la dernière place qualificat­ive en phase finale. Ils se déplacent à Clermont-ferrand en quarts de finale, et c’est un match que Paul Graou, demi-de-mélée et Greg Menkarska, qui les entraînait cette année-là, rejouent avec plaisir. Graou: “Quand on arrive en bus, une heure avant le match, ils étaient déjà en tenue, tous pareils, Under Armour moulant, sur le terrain à se faire des passes… Nous, on avait un pilier qui jouait avec un short de foot et l’autre, Corato, avec un maillot deux fois plus épais parce qu’il avait déchiré le sien!” Il sourit de toutes ses dents. “On aimait bien avoir cette étiquette de pauvres paysans. Ce jour-là, ils ont pas touché terre.” Les Gersois l’emportent 25-8, rentrent encore en chantant, mais perdent le dimanche suivant à domicile contre Montpellie­r. Ils se consoleron­t à la Féria de Pentecôte de Vic-fezensac. “T’as pas de moyens, tu joues contre des grands clubs parce qu’on avait quand même un bon niveau, et t’apprends beaucoup dans les valeurs, l’attitude, la façon de se comporter”, philosophe leur numéro 8. Deux ans plus tard, Alldritt joue trop de matchs avec la première pour participer aux phases finales du championna­t de National B, dernier titre de l’histoire du “FÉCÉA”. Le club dépose le bilan après

la saison. Greg Menkarska regrette que “le financier” les ait empêchés de construire, mais sûrement pas le gasoil de leur car scolaire, payé avec sa carte bleue. “L’après-rugby, c’est dur. Et moi, si je tombe pas sur cette génération…”

Alors que le tout frais Rugby Club Auch doit repartir en division Honneur, Grégory Patat est déjà parti entraîner les espoirs de La Rochelle après un court crochet par L’USAP. En février 2017, il invite Greg et Terence, leur présente Patrice Collazo, en charge de l’équipe première. Les parents Alldritt rappellent à leur fils qu’il n’y a jamais que 10% d’élus, insistent pour qu’il continue ses études d’ingénieur, mais Greg saisit l’occasion de tracer sa propre voie. Convoité par plusieurs grosses écuries, il choisit La Rochelle, comme Pierre Bourgarit, et y trouve une forme de continuité, avec Patat et une histoire de valeurs, encore. Greg et tous ceux qui le connaissen­t racontent cette fois où Vincent Merling, le président du Stade Rochelais, a traversé le parking de Marcel-deflandre pour les saluer lui, Bourgarit et le jeune pilier Pierre Commenge, “alors qu’on était personne”, d’après Greg. Commenge avait remarqué que dans son club précédent, le président n’aurait jamais fait l’effort. “La Rochelle est un club avec cent fois plus de moyens, mais je retrouvais ces valeurs de petit club qu’on avait à Auch”, plaide le Gersois. Grégory Patat en fait naturellem­ent le capitaine de ses espoirs, mais ne s’abandonne à aucun favoritism­e: “Greg a toujours été dominant mais là, avec l’équipe première, il sentait qu’il lui manquait quelque chose. À ce niveau, un 8 doit finir les matchs, alors que lui baissait le pied dès la 60e minute.” Piqué par ce mentor à l’accent familier, Alldritt profite des installati­ons dernier cri pour se mettre vraiment à la muscu et fondre en quelques mois. Sur le terrain, Patat et Collazo ne le lâchent pas.

Ils lui demandent de multiplier les tâches, de rester actif dans les déplacemen­ts, et lui donnent un concurrent autant qu’un modèle de profession­nalisme: Victor Vito, double champion du monde avec les All Blacks. Alldritt dispute une dizaine de matchs en Top 14 pour sa première saison, en 8 ou à l’aile, mais ne sort bientôt plus du quinze, et découvre l’équipe de France dès sa deuxième saison chez les pros. “S’il avait été mis dans une équipe plus individual­iste, imagine Grégory Patat, peut-être que ça n’aurait pas marché pareil. Ils sont tout le temps ensemble avec ‘Bourga’, ils retrouvent ce côté famille qu’ils ont perdu en s’expatriant.” Le reste du temps, Aldritt sait qu’il peut compter sur “la meute”. Aujourd’hui demi-de-mêlée de L’US Montauban, en Pro D2, Paul Graou remonte à la source: “On devait être en cadets quand on a créé une conversati­on Messenger, à onze, pour aller au festival Tempo latino, à Vic. Depuis, il y a pas un jour où on s’est pas écrit.” La conversati­on s’appelle “la meute”, et elle réunit Graou, Alldritt, Antoine Dupont et plusieurs joueurs aujourd’hui entraînés par Menkarska au RC Auch. Quand ils se voient, ils se remémorent les soirées dans la préfecture du Gers, que les parents Alldritt tentaient de maîtriser en invitant les garçons à commencer l’apéro d’après-match dans leur rez-dejardin du centre-ville et à le finir dans les combles, aménagés en dortoir. Entre les deux, toute la clique passait la soirée au 18, une brasserie à la déco spartiate, et à la Paillotte, discothèqu­e perdue près de la gare. Le retour au bercail se faisait parfois en zigzag et un matin, Greg s’est même réveillé dans le mauvais jardin. Mais la pire ligne à son palmarès reste sans doute ce nouvel an 2015, fêté avec “la meute” dans une villa d’hossegor louée à son nom. Graou: “Quand on a vu l’état de la baraque à 7 heures du matin, au réveil… Il y avait de la bouffe partout sur les murs, moi j’avais pété le lustre, les palmiers étaient arrachés…” Martine et Terence avaient dû faire le tour des jardinerie­s de la région pour tirer les petits polissons d’affaire.

Si Greg Alldritt a pu passer profession­nel et s’imposer en équipe de France aussi naturellem­ent, en “gardant les pieds par terre”, comme dirait son père, c’est sans doute parce qu’il l’a fait avec les copains du rugby: en Bleu, il forme déjà un autre binôme 8-9 avec Dupont, et Bourgarit comme Jelonch frappent fort à la porte. “Notre rugby, assume Greg en parlant de ce XV de France qu’il aide à revigorer, sur le terrain, c’est 90% d’engagement et d’attitude, donc ça marche que si t’as envie de te battre pour ton pote à côté.” En tous cas, Imanol Harinordoq­uy, l’idole aux trois Grands Chelems, se régale: “On commence à faire peur, et au niveau internatio­nal ça change beaucoup de choses…” Le Alldritt casqué qu’on regarde à la télé peut rêver à 2023. “Gagner une coupe du monde dans son pays, s’illumine-t-il, en France, c’est le rêve ultime… Mais je me force à arrêter d’y penser parce que rien n’est acquis, à commencer par ma place en équipe de France.” En attendant, il décore ses insomnies d’images du Vieux Port de La Rochelle noir de monde, et d’un bouclier de Brennus brandi à bout de bras avec une autre bande: “Bourga”, toujours, mais aussi Romain Sazy, Kevin Gourdon ou Uini Atonio, “qui se sont battus pour mettre le club à ce niveau-là.” Avant le grand frisson et de nouveaux tourments pour Martine, Grégory offre d’autres émotions à ses proches. Le 23 février 2019, alors que Greg s’apprête à jouer son premier France-écosse au Stade de France, c’est bien lorsque La Marseillai­se retentit que son frère Scott a la chair de poule. Martine et Terence sont émus, eux aussi, et tellement fiers. Entré à la 70e minute, leur fils marque deux essais au ras. TOUS PROPOS RECUEILLIS PAR DAC

“Je trouve que c’est tellement violent, tellement rapide, et il est tellement jeune…”

Martine, la mère

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