L’ÎLE AUX CHIENS
WES ANDERSON (11 AVRIL 2018)
Il aura tout essayé. Après l’îlot métaphorique en forme de sous-marin, de train, de palace, Wes Anderson se paie une vraie île, mais avec des chiens qui parlent à la place des dandys moustachus. Mais, fidèle à lui-même, il fait de ses canidés des poètes bavards (doublés par Norton, Goldblum, Murray, bref, la dreamteam habituelle) jetés dans une histoire abracadabrante : placés en quarantaine suite à une épidémie canine, ils suivent un garçonnet nippon à la recherche de son propre toutou et se laissent entraîner malgré eux dans une lutte contre l’impérialisme japonais. Anderson a beau triturer sa formule dans tous les sens, convoquer Mr. Fox dans un contexte exotique façon Darjeeling Limited, mélanger l’errance poétique et un peu stagnante de La Vie aquatique avec le surrégime épique du Grand Budapest Hotel en saupoudrant le tout de paraboles politiques pour feindre un virage militant, il ne fait jamais oublier ce qui le fait courir. À savoir l’entretien maniaque d’un kit Polly Pocket sur lequel il règne en démiurge faussement sympa et vraiment tyrannique. Chaque clébard devient ici le jouet impersonnel (tous finissent par se ressembler et devenir interchangeables) de sa tambouille bien connue. Qu’il agrandisse son terrain de jeu ici n’est pas bon signe : un jour, c’est un pays, voire le globe entier qu’il va andersoniser. Brrr. YAL SADAT