AMIN PHILIPPE FAUCON
(3 OCTOBRE 2018)
Ciné social. Emmanuelle Devos et Moustapha Mbengue torses à demi nus contre des oreillers rayés sur l’affiche du prochain film de Philippe Faucon, ça peut surprendre. Mais, à part le choix de l’actrice multiprimée dont il est peu coutumier, on retrouve les problématiques sociales chères au réalisateur : l’exil, la confrontation des cultures, l’indépendance féminine... à la différence près qu’elles sont aussi déplacées hors du territoire hexagonal. Trois ans après le césarisé Fatima, c’est au personnage d’Amin, père de famille sénégalais qui vit seul en France que Faucon s’intéresse. Amin, roc discret et impénétrable qui encaisse les pressions sans faillir. Pris dans un entre-deux constant, il se déplace des chantiers bruyants où les engins éventrent des plaques de métal, aux jardins de particuliers où l’on creuse jusqu’au soir. Du foyer de travailleurs, aux maisons pavillonnaires. Du pays d’origine bercé par le soleil, au pays d’accueil plus sombre et froid. Le film se construit en plans fixes, dans un effet miroir entre France et Sénégal - deux réalités entre lesquelles Amin est partagé. Si le long-métrage ose quelques tirades surexplicatives qui mettent à distance, c’est dans les soupirs et les regards chargés qu’il saisit. Regards qui suscitent aussi l’union charnelle où les mots ne sont plus nécessaires. Une énième intrigue érotique pour captiver les spectateurs ? Non, un désir irrépressible de ne plus être entre deux, dans une société d’immigration encore trop cloisonnée.