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JE SUIS OBSÉDÉE PAR LES OBSÉDÉS SEXUELS

NOTRE CHRONIQUEU­SE A FINI PAR SE RENDRE À L’ÉVIDENCE : SI ELLE ATTIRE AUTANT LES OBSÉDÉS, CE N’EST PAS UNIQUEMENT À CAUSE DE LA LONGUEUR DE SES JUPES.

- ROSANNA LERNER

Plus tôt dans le week-end, j’allais retoucher une robe chez le type de mon quartier qui fait encore ça pour vivre.

Pour la femme de petite vertu que je suis, toutes les robes que j’achète sont toujours trop longues. Samuel, mon retoucheur, me demande de l’enfiler après m’avoir interrogé sur la quantité de tissu que je voulais éliminer en comprenant que j’étais trop embarrassé­e de lui dire à quel point je voulais cette quantité importante. Je sors de derrière le paravent et il m’indique une petite plateforme face au miroir en me faisant signe de m’y hisser. Je m’exécute et de ses mains expertes, il entame le retroussag­e du tissu. Se faisant, on fait de la petite conversati­on. Je lui raconte que ces temps-ci, j’ai pas vraiment le moral, que je perds une masse de cheveux considérab­le, que ce doit être l’hiver... dans le reflet, Samuel est en train de fendre avec ses grands ciseaux cristallin­s ce qui couvre mes genoux. Je lui demande de s’arrêter mi-cuisse avant de continuer. Concentré, il m’ignore alors que je lui dis que ça m’a l’air bien et que maintenant, il peut continuer le travail tout seul. Dans ces moments-là, on ne sait pas. On ne sait pas si c’est nous qui exagérons ou si on est trop naïve d’avoir cru que cette situation n’allait pas ressembler à toute vapeur trait pour trait à un début de film X classé hard.

VOYEURS IMAGINAIRE­S

Je regarde Samuel en plongée m’examiner l’entre jambe comme si cette image enregistré­e allait lui servir de matière brute à se masturber pendant les dix prochaines années. Et je le laisse faire, parce que je l’aime bien Samuel. Et comme je le connais depuis longtemps, je sais que ce moment d’égarement ne peut pas aller plus loin. En fait ça me fait plaisir et je vais même jusqu’à être excitée, malgré moi. Disons que Samuel a un physique de radio. Un gars de l’ombre, comme on dit. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser que les images hyper porno qu’il est en train de fabriquer dans sa tête m’émeuvent profondéme­nt. Il n’y a personne dans sa petite boutique, seulement des vêtements suspendus qui habillent nos voyeurs imaginaire­s. Perdue dans mon esprit, l’air absent comme chez le gynéco, je m’efforce de ne pas penser à mes parents qui, s’ils assistaien­t à la scène, penseraien­t qu’il est question de prostituti­on. Pire, de viol ? Mais je suis consentant­e et j’en profite pour faire l’inventaire des garçons que j’aurais voulu ne pas me taper et des raisons pour lesquelles j’ai finalement cédé. Je pense à mon cousin par exemple qui m’a attirée pour une seule et unique raison : il a juste eu très envie de moi et ça m’a suffit pour que je me rende disponible pour lui pendant de longues années. Jusqu’à ce que je doive lui trouver d’autres qualités, à savoir aucune, et que cette réalisatio­n augure la fin de notre amourette. Je pense à ce moment-là que je suis la fille parfaite à harceler sexuelleme­nt et que ça craint vachement. Mais je me souviens de Pierre, un gros obsédé du cul qui, à une soirée, m’avait collé aux basques comme un acharné jusqu’à que je me rende compte que j’allais passer une des meilleures nuits de ma vie et qu’il me donne raison. Alors finalement c’est pas si mal d’être sensible à une certaine promesse que revendique­nt ceux à qui le sexe impromptu ne fait pas peur. Samuel m’est tout d’un coup plus sympathiqu­e encore. Il termine d’ajuster ses petites épingles pendant que je lui souris, pleine de mansuétude. Je me rhabille et me dirige vers le comptoir en étant fière d’avoir géré la situation en adulte, en me sentant accomplie d’avoir contribué à nourrir les fantasmes de ce brave homme. – « Combien je te dois cher Samuel ? » – « Rien du tout. »

JE LUI DEMANDE DE S'ARRÊTER MICUISSE AVANT DE CONTINUER.

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