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ACCEPTABLE IN THE 90’S

Grâce à 90’s, touchante chronique adolescent­e. Jonah Hill signe un premier film en forme d’autobiogra­phie qui n’a rien d’une comédie. Et c’est l’heureuse surprise de ce début d’année.

- XAVIER MAGOT

90’S

JONAH HILL

(EN SALLE LE 24 AVRIL)

Avec sa bouille ahurie et sa bonhomie naturelle, il n’est rien de dire que l’on n’attendait pas Jonah Hill sur le registre du Teen-movie indépendan­t. Comédien hilarant chez Apatow (Super Grave) ou Scorsese (Le Loup de Wall Street), l’acteur nous avait jusque là plutôt habitué à un registre enlevé même si sa perte de poids spectacula­ire et ses récentes incursions chez Gus Van Sant (Don’t Worry, He won’t get far on foot) ou Harmony Korine (le très attendu Beach Bum) étaient des marqueurs forts quant au tournant qu’il voulait donner à sa carrière. C’est donc désormais chose acquise puisque le comédien propose avec son premier film en tant que réalisateu­r, un récit initiatiqu­e doux-amer qui, plus qu’une énième parabole sur le passage à l’âge adulte, propose une réelle réflexion sur le besoin d’appartenan­ce à un groupe par tout adolescent.

Pitch : Stevie, 13 ans, étouffe au sein de sa famille dysfonctio­nnelle. Pris au piège entre une mère célibatair­e accaparée par son travail et un grand frère fan de hip hop qui fait régner la terreur à la maison, il décide de se recréer une famille auprès de jeunes skaters qui trainent autour de chez lui. Entre première cuite et premier baiser, cet été 1995 transforme­ra Stevie à tout jamais.

FAMILLE DE FORTUNE

Incursion nostalgiqu­e dans la propre adolescenc­e de Hill, 90’s est autant une déclaratio­n d’amour à Los Angeles qu’une ode fétichiste à la pop culture de cette décennie. Car si le film cite aussi bien Jarmusch que Larry Clark, c’est via un prisme beaucoup plus personnel et incarné que son emploi des codes pop est envisagé. Ainsi chaque choix de tenues vestimenta­ires, chaque expression et chaque morceau sont des vraies madeleines geek pour tous ceux qui ont grandi durant ces années là. Seul exemple, et de taille, l’admirable bande originale du film où se mêlent à l’envie Wu Tang, A Tribe Called Quest, Cypress Hill, Morissey, Pixies ou Nirvana et qui serait a elle seule une raison suffisante d’aller voir le film.

Si la reconstitu­tion nostalgiqu­e est l’une des plus belles surprise du film, l’étude du milieu est quand à elle particuliè­rement réussie. Car à l’instar de Kids, ces skaters souvent constitués de garçons issus de familles monoparent­ales et lâchés dans la ville sans aucune surveillan­ce adulte, arpentent le bitume et se confronten­t en permanence à toutes les couches de la société (clochards, flics, dealers, gangs). Livrés à eux mêmes, ils se recréent une famille de fortune constituée d’acolytes eux aussi en luttent contre une solitude trop pesante. Et c’est là que tout le talent de Jonah Hill pour la mise en scène explose. Avec son casting hallucinan­t mêlant acteur débutant (Sunny Suljic, parfait de bout en bout) et skaters confirmés, il reconstitu­e parfaiteme­nt cet âge d’or se permettant même le luxe de recréer des séquences de skate shootées au Fish-eye en HI-8 dignes des premières vidéos World Industries. Un vrai coup de maître pour un grand premier film.

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