MEDIAPART NORMAND, LE SCOOP LE PLUS LONG ?
Magouilles, pots-de-vin et boudin blanc… En plein marigot normand, Manuel Sanson et Gilles Triolier, deux journalistes incorruptibles, viennent de lancer Le Poulpe : 1er média local d’investigation sans pub et sans argent. Haut les coeurs !
Le juteux business des 1ères années de médecine (à Rouen et Caen) qui revendent leurs cours à prix d’or, les journalistes débarqués pour insubordination de Tendance Ouest, la radio du quotidien La Manche libre, les ambitions à peine voilées du roi de la palette (Palette Gestions Services) et propriétaire du journal Paris-Normandie, Jean-Louis Louvel, à la Mairie de Rouen… Ce ne sont que quelques unes des dernières révélations du nouveau média d’investigation Le Poulpe
sorte de Médiapart Normand, uniquement financé par ses lecteurs et une cagnotte Ulule de 6 000 euros, qui délie les langues des bords de Manche aux plages de Cabourg et du Havre. Mis en ligne depuis seulement quelques semaines, Le Poulpe se veut une réponse « au manque
d’investigation dans la presse locale » et une source « d’enquêtes approfondies consacrées à tous les pouvoirs de la région ». À sa tête, deux anciens journalistes du quotidien Paris-Normandie, Manuel Sanson et Gilles Triolier, respectivement correspondants de l’AFP et du Monde, et une poignée de pigistes déployés jusque dans les moindres bocages de l’Eure et du Calvados...
KESSEL ET LAZAREFF DU COTENTIN
« À raison de deux articles quotidiens par journaliste, une version digitale et des réseaux sociaux sur le terrain, beaucoup de nos concurrents sont désormais obligés de se concentrer sur l’info globale », note Gilles Triolier.
« La plupart des rédactions n’ont plus le temps, ni même l’envie d’aller se friter avec les puissants du coin qui les financent. Il y a une forte porosité avec les acteurs institutionnels, on va fricoter avec les milieux politiques, économiques, atteindre des niveaux de collusion insupportables ! Voilà pourquoi nous avons voulu proposer un média d’investigation totalement indépendant », ajoute le Directeur de publication du Poulpe qui a passé neuf ans à couvrir l’actualité locale à Pont-Audemer, Bernay, Verneuil sur Avre, etc. Bonne pioche ! À Rouen, siège de la rédaction du Poulpe, où l’équipe municipale n’a quasiment pas changé en près d’un quart de siècle (le tandem PS Yvon Robert-Valérie Fourneyron) et où règnent en maîtres les géants de la pétrochimie et de la pharmacie, c’est peu dire que Le Poulpe est attendu de pied ferme. « On reçoit énormément de soutiens, y compris de nos confrères », se félicite Gilles Triolier.
« Beaucoup de gens semblent trop heureux de nous filer des informations et de pouvoir enfin s’exprimer… » Problème : n’est pas Edwy Plenel qui veut. Avec juste une enquête et quelques sujets d’appoint par semaine (la grève des Nutella à Villers-Escale, les permis de polluer à la raffinerie Total de Gonfreville-l’Orcher, etc), une interface graphique de vidéo-club dans les 90’s, un serveur qui toussote un jour sur deux, très peu d’images, pas de vidéo, encore moins d’Instagram et une rigueur journalistique de moines encyclopédistes (c’est tout à leur honneur ndlr), les Kessel et Lazareff du Cotentin ont visiblement de la route à faire…
« Nous ne sommes pas des justiciers face aux épiciers », confirme Gilles Triolier. « On ne s’inscrit pas en opposition à la presse classique mais en complément. Nous voulons juste faire un pas de côté ». À un an des élections municipales (2020), dans une région où le Maire du 2 ème port de France envoie des selfies de sa bite (Luc Lemonnier au Havre) et où chacun place ses pions à la tête des rédactions ( Jean Allard, 1er adjoint au Maire de Rouen dans les 80’s, a même dirigé le quotidien
Paris-Normandie pendant dix ans depuis la Mairie), sera-ce vraiment suffisant ? Rien n’est moins sûr. Mais ça vaut quand même le coup d’essayer !