« ÉCOUTE, C’EST DU ROSE TROMBONE ! »
Un parfum qui fait du bruit ? La jeune marque Orchestre Parfum propose une mise en musique inédite de ses fragrances (et vice versa). On l’a testé en live…
Imaginez un concert où, à chaque chanson jouée, l’on vous tend une mouillette imbibée d’une délicate fragrance. Vous la humez quelques instants avant de savourer les notes offertes par les virtuoses installés à quelques mètres. Vous pouvez même fermer vos yeux et vous concentrer pleinement sur l’ouïe, l’odorat… Bienvenue à un live de l’Orchestre Parfum – autant une marque qu’un band –, fondé il y a trois ans par un jeune musicien passé par l’Oréal. Explications.
Vous avez votre marque, l’Orchestre Parfum, en 2017, et depuis vous enchaînez les concerts. Il s’agit d’abord d’une fragrance, ou d’un groupe ?
Pierre Guguen : Les deux ! Cette année, nous avons donné un premier concert « parfumé et dessiné » au Bon Marché. C'était extraordinaire. Nous organisons aussi d'autres événements polysensoriels à travers le monde afin de présenter et partager nos fragrances musicales. Nous essayons de toujours avoir nos musiciens virtuoses lors de ces représentations même si c'est parfois difficile vu qu'ils tournent avec d'autres superbes projets musicaux. Nous avons fait l'année dernière une tournée d'une dizaine de dates entre Bruxelles et Moscou où nous donnions des concerts dessinés et parfumés dans les plus belles parfumeries du monde avec le dessinateur Adrien Demont.
Et chacun de ces concerts est « parfumé et dessiné » ?
En ce moment, oui. Le dessin créé une couche additionnelle d'expérience et emmène le public dans le domaine du conte – vers une narration polysensorielle.
Vos parfums intègrent des matières issues d’instruments de musique. Comment faites vous ?
Nous avons six fragrances musicales dans lesquelles le parfumeur a intégré des matières venues d'instruments de musique… J'ai par exemple demandé à des fabricants de guitares flamenca l'essence de bois qu'ils utilisent pour que notre parfumeur les intègre dans la fragrance. Ainsi, les matières premières de la musique se mélangent avec les plus belles notes de la parfumerie !
C’est une première ?
À ma connaissance, oui. Et nous en sommes très fiers ! C'est le fruit d'un travail d'enquête, de recherches et d'investigations dans les plus beaux ateliers de lutherie de France, d'Europe et du Maroc. Nous sommes allés voir tous ces artisans pour leur demander ce que sentaient leurs instruments de musique : les vernis, les produits d'entretien utilisés... Les fragrances sont ensuite devenues musicales en intégrant les matières premières de la musique, et en donnant carte blanche à des musiciens virtuoses pour qu'ils composent pour l'Orchestre Parfum.
des musiciens du jazz, de la musique africaine traditionnelle, de la musique traditionnelle japonaise, de la musique classique, de la percussion arabe. À quand du rock ?!
Bientôt ! Mais nous allons d'abord lancer deux fragrances électroniques au mois de mai avec des DJ.
Comment mettez-vous en avant votre association avec ces musiciens ?
Nous avons sorti un vinyle avec toutes les chansons composées pour nos parfums, nous sommes sur Youtube, Spotify… Nous sommes finalement comme un vrai groupe de musique, présent sur tous les réseaux. Nous sommes le Fragrance Band ! Et vous trouverez sur notre vinyle un QR code permettant de commander un kit d'échantillons et de trouver un parfum dans un des 20 endroits où nous sommes distribués…
Et avant l’Orchestre ?
J'ai commencé ma carrière dans le parfum il y a plus de 10 ans chez Comme des garçons à Barcelone, un des pionniers de la parfumerie de niche, au sein du groupe Puig (détenteurs des licences pour les parfums Paco Rabanne, Nina Ricci, etc., ndlr). J'étais chef de projet international, je travaillais sur la création du parfum de A à Z en faisant le lien avec tous les métiers. Le matin, je pouvais avoir un rendezvous avec des parfumeurs, avec des marchés l'après-midi, et travailler avec des créateurs sur le packaging le lendemain ou aller voir des producteurs de verre en Allemagne pour vérifier la conformité. J'ai ensuite fait la même chose chez l'Oréal, notamment pour la marque Viktor & Rolf. Ces deux expériences professionnelles ont été extrêmement formatrices. Ce sont deux véritables réservoirs de créativité avec une mise en oeuvre et un opérationnel bien huilés.
Vous vous êtes lancé dans la « musique parfumée » alors que vous travailliez encore chez Puig.
Oui, c'était sur une scène du Raval à Barcelone il y a sept ans et j'ai continué à faire de la musique en étant chez l'Oréal. J'avais monté un spectacle polysensoriel à Paris dans lequel il y avait du chant, de l'harmonica et des parfums. Un moyen de continuer d'expérimenter moimême le lien entre musique et parfum. Un jour, je me suis retrouvé à avoir à faire un choix : continuer dans un grand groupe et y faire carrière, ou me lancer dans un projet plus personnel combinant ces deux passions, la musique et le parfum ?
Quel a été le déclic ?
Lorsque j'ai visité les lutheries, les fabricants d'instruments de musique, et découvert cette géographie olfactive – c'est là que j'ai décidé de quitter l'Oréal, en décembre 2016. Mais avant de pouvoir franchir le pas, il me fallait comprendre et identifier l'odeur de la musique. C'est en visitant ces artisans que j'ai senti les cuivres des trombones, les bois des guitares, les cols, les vernis, les cuirs, les peaux des percussions…
Et aujourd’hui ?
Nous sommes désormais distribués dans plus de 20 pays, présents de Paris à Tokyo en passant par le Moyen-Orient, la Russie… Sans oublier notre site, à partir duquel nous livrons dans toute l'Europe !
« IL ME FALLAIT COMPRENDRE L’ODEUR DE LA MUSIQUE ! »