MONSTRES & COMPAGNIE
Il y en a marre, du bien. Des gentils. Des bons sentiments. C’est un cliché de le dire, mais à l’heure où il convient de ménager les esprits, les figures du mal sont plus que jamais nécessaires – deux primo-romanciers nous le rappellent. Les Monstres, le titre du livre de Charles Roux, prend même des airs de manifeste. On y trouve une définition, au tout début : « Le monstre est ce que l’on montre du doigt parce qu’il se distingue du reste. Individu ou créature, il peut prendre des formes diverses [et] attire les regards qui peuvent être pleins d’admiration ou de terreur. » Dans cette oeuvre elle-même monstrueuse, nous voilà embarqués par un Paris sous « le bain de la terreur » en raison des agissements d’un « monstre
invisible ». Un texte décadent et sinueux, porté par une grande inventivité et d’incroyables fulgurances. D’une autre manière, la monstruosité est également au coeur du bref et fort Elle, la mère d’Emmanuel Chaussade portrait d’une « mater dolorosa » par son fils, au moment où celle-ci entre en terre. Par petites touches et dans une écriture très soignée, l’auteur va dévoiler bien des faces sombres et perversités de ses protagonistes. Jusqu’au vertige. (Les Monstres, Rivages, 608 p., 23 € et Elle, la mère, Minuit, 96 p., 12 €)
Baptiste Liger